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La boîte à outils de la stratégie
Chapitre VIII : Management stratégique

Fiche 06 : Gérer le changement stratégique

  • Retrouvez 10 fiches outils dans ce chapitre
  • Publié le 15 août 2016
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La boîte à outils de la stratégie

8 chapitres / 56 fiches

Gérer le changement stratégique passe d'abord par l'établissement d'un diagnostic du changement nécessaire pour en connaître l'ampleur et la nature. S'agit-il d'une adaptation, d'une reconstruction, d'une évolution ou d'une révolution ? Le style de conduite du changement doit ensuite être adapté à l'entreprise et à la situation. Enfin, la transformation stratégique nécessite un pilotage avisé et une bonne utilisation des leviers de changement.

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Les 4 types de changement

Source : d'après Julia Balogun, Veronica Hope Hailey et Éric Viardot.

Source : d'après Julia Balogun, Veronica Hope Hailey et Éric Viardot.

Pourquoi l'utiliser ?

Objectif

L'inertie et la résistance au changement, présentes dans la plupart des entreprises, obligent le dirigeant à s'intéresser à la conduite du changement nécessaire à la mise en oeuvre d'une stratégie. On peut distinguer différents types de changements suivant leur ampleur (le paradigme actuel peut-il être maintenu ?) et leur nature (peut-on agir de façon incrémentale ou faut-il être radical ?).

Contexte

Le changement incrémental, pas à pas, est le plus confortable pour les salariés et le plus souhaitable pour l'entreprise. Un changement radical, plus douloureux, peut s'imposer dans certaines circonstances, par exemple en cas de crise.

Comment l'utiliser ?

Étapes

Les 4 types de changement sont :

  • L'adaptation : ce type de changement peut être obtenu de manière incrémentale sans modifier le paradigme. Cette forme de changement stratégique est la plus courante et la plus simple à piloter.
  • La reconstruction : il s'agit d'un changement rapide qui peut provoquer des bouleversements dans l'entreprise, mais sans modifier son paradigme. Exemple : un plan de réduction de coûts nécessaire pour résister à une crise conjoncturelle.
  • L'évolution : elle nécessite un changement de paradigme, mais de manière progressive. Le changement peut être planifié, surtout pour les entreprises apprenantes, capables de se régénérer en permanence grâce aux expériences et aux compétences des salariés. Ainsi, une culture du partage des connaissances et de leur diffusion (Knowledge Management) doit être favorisée pour mettre en oeuvre la nécessaire transformation numérique de l'entreprise.
  • La révolution : elle implique une transformation rapide et radicale du paradigme, quand l'entreprise se révèle incapable de répondre aux pressions environnementales ou concurrentielles. Elle peut même déboucher sur des crises aiguës qui menacent sa survie. Exemple : France Télécom au début des années 2000, lors de sa mutation en une entreprise internationale compétitive qui deviendra Orange, un des principaux opérateurs de télécommunications dans le monde.

Méthodologie et conseils

Gérer le changement stratégique, c'est accompagner les transformations de l'entreprise.

Le dirigeant doit recenser les forces qui facilitent le changement (motrices) et celles qui l'entravent (conservatrices). De nouvelles forces peuvent être mises en action afin de vaincre les réticences. Ainsi les managers intermédiaires ne sont pas de simples relais de transmission de la stratégie et encore moins une source d'inertie et de blocage. Ils doivent, au contraire, jouer le rôle très positif de réformateurs dans l'élaboration et le déploiement de la stratégie pour devenir de véritables agents du changement.

Avantages

  • Le diagnostic du changement permet d'anticiper les difficultés de conduite du changement, en fonction de sa nature et de son ampleur.

Précautions à prendre

  • Remettre en cause le paradigme d'une organisation est un exercice périlleux et la conduite du changement peut se révéler alors longue et douloureuse pour l'entreprise.

Comment être plus efficace ?

Les styles de conduite du changement

Les styles de conduite du changement peuvent mettre l'accent sur :

  • L'explication et la communication : les raisons du changement et les moyens de sa mise en oeuvre sont présentés et expliqués aux salariés. Ce style suppose qu'il n'y a pas de situation d'urgence. Il nécessite une réelle confiance entre le dirigeant, les managers et les collaborateurs.
  • La collaboration et la participation : tous les salariés concernés par le changement sont impliqués dans sa conduite (identification des problèmes stratégiques, définition des priorités, prise de décisions et planification). Cette approche permet d'obtenir l'appropriation des décisions et renforce l'adhésion des collaborateurs.
  • L'intervention d'une autorité : une autorité (équipe projet ou groupe dédié) coordonne le processus de changement, mais en délègue la mise en oeuvre. Elle prend en charge certaines phases du processus de changement : recherche et propositions d'idées nouvelles, récolte de données, planification détaillée...
  • La vision du dirigeant : le dirigeant est chargé de définir clairement l'orientation de la stratégie et la manière de la déployer. C'est une conception hiérarchique de la conduite du changement stratégique.
  • La coercition et la contrainte : elles peuvent être utilisées quand le changement nécessite d'être imposé par une autorité hiérarchique. Elles s'avèrent parfois nécessaires en cas de crise grave.

La conduite du changement peut mener certains managers à un comportement aberrant : l'escalade de l'engagement (escalation of commitment). Il s'agit de la tendance à poursuivre une action ne produisant pas les effets attendus parce que l'on ne veut pas se résoudre à perdre les ressources (temps, argent, énergie) déjà engagées. Même face à un échec annoncé, il devient de plus en plus difficile d'envisager l'abandon des actions menées au fur et à mesure de leur avancement. L'attachement psychologique des décideurs au projet initial les pousse à persister dans une voie sans issue.

Chaque étape du processus de changement nécessite un style de conduite du changement différent. Le contexte et les circonstances conduiront également à un style spécifique.

CAS des 8 étapes de la transformation stratégique

John Kotter, professeur à la Harvard Business School, publie en 1995 un article sur les limites des opérations de changement stratégique. Il met l'accent sur l'ordre chronologique indispensable des étapes à suivre par la direction de l'entreprise.

  • Créer un sentiment d'urgence : à partir, d'une part, des réalités du marché et de la concurrence et, d'autre part, d'une discussion explicite sur les crises potentielles ou les principales opportunités. Kotter estime que pour qu'un changement ait lieu, 75 % des salariés doivent se sentir concernés.
  • Former un groupe en charge du pilotage de l'opération : ses membres doivent être des dirigeants, mais également des représentants des autres parties prenantes influentes. Ce groupe doit être encouragé à fonctionner comme une équipe. Il doit représenter une coalition d'agents du changement, champions de la transformation stratégique envisagée.
  • Développer une vision : formuler une vision claire afin d'orienter les efforts et concevoir les stratégies permettant d'y parvenir. Cette vision doit être assez audacieuse pour mobiliser et suffisamment réaliste pour ne pas décourager les salariés.
  • Communiquer la vision : en utilisant de multiples canaux, et s'assurer que le comportement du groupe de pilotage est cohérent avec la vision. Cette communication devra être top-down (descendante), mais aussi bottom-up (ascendante).
  • Responsabiliser les collaborateurs (empowerment) : une fois l'organisation mise sous tension, supprimer les obstacles au changement, faire évoluer les systèmes et structures qui brouillent la vision, encourager la prise de risque et les idées, les initiatives et les actions originales.
  • Planifier et obtenir des réussites à court terme : la transformation stratégique peut prendre des années, mais les individus ont besoin de voir rapidement des résultats (" quick wins "). Ces premières victoires, même modestes, doivent être célébrées et leurs responsables récompensés.
  • Consolider les améliorations et provoquer de nouveaux changements : lorsque la crédibilité du changement est établie, il faut changer encore plus de structures, de systèmes et de politiques et promouvoir ceux qui peuvent mettre en oeuvre la vision. Il faut réactiver le processus de changement. Il s'agit de transformer alors les petites victoires en grands succès.
  • Ancrer le changement dans la culture de l'entreprise : lorsque le changement prend forme, il faut montrer comment il a contribué à la performance et institutionnaliser les nouvelles approches. Idéalement, le changement continu, pratiqué dans les organisations apprenantes (s'adaptant de façon agile aux évolutions) permet de piloter les transformations stratégiques sans à-coups, en limitant la résistance au changement.

Bertrand Giboin © Dunod

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