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La boîte à outils du Design management
Chapitre VI : Évaluer et financer le projet design

Fiche 02 : Risques internes du projet design

  • Retrouvez 4 fiches outils dans ce chapitre
  • Publié le 28 nov. 2017
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La boîte à outils du Design management

9 chapitres / 52 fiches

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des risques et des gains


En résumé

Les risques internes associés au design sont incontournables mais ne doivent pas être un obstacle au développement du projet design. Ils sont à analyser dans leur contexte et au regard de ce que le projet peut apporter à l'entreprise. Certains risques soulignent l'importance de la crédibilité du design manager, de sa capacité d'influence auprès du CODIR, de son management pour créer de la cohésion dans son équipe, de la robustesse des technologies de l'entreprise ou des implications temporelles ou financières. En somme, il s'agit d'une approche multidimensionnelle du risque.

Pourquoi l'utiliser ?

Objectif

Construire une appréciation multidimensionnelle du risque du projet favorise une approche plus juste du projet qui prend en compte le contexte interne de l'entreprise (la stratégie menée, les ressources disponibles, les enjeux pour les parties prenantes etc.). Il existe de nombreux risques internes et l'objectif consiste à identifier ceux qui ont le plus d'impact (score élevé). L'évaluation doit, en outre, intégrer les gains anticipés et espérés pour mesurer le niveau d'incertitude réel en interne lié au projet design.

Contexte

Les risques sont inhérents à toutes actions et projets dans une entreprise. Cependant, ils sont plus significatifs :

  • si le projet est particulièrement novateur (création d'une nouvelle gamme de produits par exemple) ;
  • si le manager et/ou les acteurs du projet design sont peu expérimentés ;
  • en période de crise ou de difficultés économiques où les gains paraissent plus difficiles à obtenir.

Comment l'utiliser ?

étapes

1. Lister tous les gains et les risques susceptibles de survenir au cours du projet design. Pour essayer d'être le plus exhaustif, réunir l'ensemble des parties-prenantes du projet et leur demander de citer tous les bénéfices, puis tous les risques potentiels. Leur demander de les hiérarchiser.

2. Une fois la liste établie, isoler les risques sur lesquels l'équipe a peu voire pas de pouvoir d'action (les ressources allouées spécifiquement pour le projet, la stratégie globale de l'entreprise). Imaginer les moyens de contrer chacun des autres risques (comment trouver d'autres ressources, comment mobiliser tous les acteurs ?).

3. Dresser un bilan pour évaluer si les gains espérés et anticipés dépassent les risques et les pertes possibles. Evaluer l'ampleur du risque par la mesure de la criticité du risque.

4. En cas de bilan négatif, le projet design peut être mis en oeuvre sous réserve que le CODIR y voit un enjeu supérieur (afficher une image d'avant-gardiste, marquer un territoire concurrentiel, souder une équipe après une crise forte en interne).

Méthodologie et conseils

  • Solliciter l'avis de plusieurs personnes dans l'entreprise. Non seulement cela permet d'avoir une vision plus pertinente sur le projet, mais cela a le mérite de mobiliser les acteurs autour de lui.
  • Si le bilan " gains/risques " est défavorable, garder en mémoire le travail mené et repérer ce qui a fait basculer le bilan pour le ré-exploiter plus tard.
Avantages
  • Certains projets design peuvent sembler très risqués de prime abord et pourraient être abandonnés trop rapidement.
  • La liste établie rend le projet plus réel pour chacun des acteurs impliqués en interne.
  • En cas de bilan mitigé, cet outil favorise le dialogue sur chacun des gains et risques afin de décider si le projet design peut être lancé.
Précautions à prendre
  • Il est bienvenu de coupler cet outil avec une analyse des risques externes.
  • L'évaluation du projet design ne doit pas se focaliser uniquement sur les risques mais également prendre en compte la stratégie design de l'entreprise.

Comment être plus efficace ?

Le cas de la structure en silo : levier ou frein à la prise de risque design ?

La structure d'une organisation influence le développement de la stratégie design, ne serait-ce que par l'existence ou non d'un service ou département " Design " clairement identifié. Les études montrent en particulier que la structure en silo (appelée également " structure en M " pour représenter visuellement la succession de divisions dans l'organisation) est un obstacle significatif au développement du design. La prise de risque, en général, est voulue, maîtrisée, anticipée ; des procédures sont alors imposées pour les décisions et actions. Or, un projet design peut difficilement s'engager à respecter des étapes précises - même si le design manager tend vers ce respect. Les structures imposant un chemin et ne permettant pas l'exploration des à cotés considèrent le design comme un risque fort. Cela soulève le rôle de la direction et du CODIR : quelle est leur position face au non-respect des procédures susceptibles de survenir au cours du projet design ? Quelle est la confiance réciproque entre la direction et le design manager ? Cette qualité s'avère d'autant plus importante dans de telles structures.

Les structures en silo freinent également l'articulation entre les différentes divisions. Le design, la R&D, l'ingénierie, le marketing, le commercial sont chacun isolés dans leur fonction. Même si des projets multidisciplinaires se mettent en place, force est de constater que chacun apporte ses connaissances sans chercher à en créer de nouvelles dans une logique transdisciplinaire. Le design peut alors être évalué comme risqué par les autres fonctions, car consommateur de ressources et perturbateur dans la gestion de projet (remise en question des évidences, apport de connaissances nouvelles...).

C'est pourquoi les structures en silo sensibles au design cherchent à créer des espaces de dialogue, d'échanges, de débat entre l'ensemble des fonctions pour encourager la création de lien. Cela n'est pas une sinécure, notamment quand ces entreprises ont une dimension internationale qui impose d'intégrer les différences culturelles, la distance géographique, le décalage horaire etc. Néanmoins, de telles firmes y parviennent, moyennant des investissements non négligeables. Par exemple, Air Liquide délivre des gaz pour des clients industriels et de la santé. Elle intervient dans plus de 80 pays. Pour accélérer son innovation, elle a choisi de créer " i-lab " qui est un laboratoire de nouvelles idées. C'est une structure de réflexion au même titre que les " think-tanks " mais aussi d'expérimentation (" corporate garage ") des idées. Les équipes transdisciplinaires proviennent de l'Europe, des États-Unis et de l'Asie. L'un des principes forts est de matérialiser rapidement les idées (grâce à l'impression 3D, à la modélisation numérique) et de les tester. Enfin, cet espace est inséré dans l'éco-système mondial et recherche des partenariats avec des start-ups notamment, ce qui lui permet de gagner en flexibilité et ainsi de contrebalancer la lourdeur de sa structure.

CAS de la PME et du risque design

Évaluer le risque design

Au-delà de sa taille, la PME est définie principalement par son manque de ressources (financières, humaines, matérielles). Cela amène souvent chaque collaborateur à être polyvalent. C'est une réelle opportunité de développement du design. Imaginons une situation de création de nouveau produit en PME. Chaque membre de la petite entreprise peut être plus facilement sollicité à partager ses idées, ses connaissances dans un espace souvent délimité par le projet. La collaboration avec une agence est susceptible de l'aider à aller plus loin dans l'émergence de nouvelles idées, l'exploration d'une thématique. Cependant, certains membres de la PME peuvent penser qu'ils sont finalement capables de développer le projet sans l'aide du designer. Ce risque est d'autant plus fort avec des personnes créatives. L'enjeu est alors de bien spécifier le rôle de chacun avant de lancer le partage des idées. Si les membres et le dirigeant possèdent une connaissance pertinente du marché, les contraintes de faisabilité, les critères d'évaluation de la viabilité économique d'une idée, le designer apporte, quant à lui, une méthode de travail spécifique qui est le fruit d'un long apprentissage.

Bérangère SZOSTAK, François LENFANT

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