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La sinueuse route de la conquête automobile

Publié par Clément Fages le - mis à jour à
La sinueuse route de la conquête automobile

Connectée, autonome, partagée... Alors que se dessine l'avenir de l'automobile, les constructeurs doivent faire face aux nouveaux enjeux écologiques et digitaux.

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"Henri Ford disait : si j'avais demandé aux gens ce qu'ils voulaient, ils auraient répondu : "des chevaux plus rapides." Pendant des années, le produit était au centre de l'offre, et en lui-même générateur de demande", expliquait Pierre Jalady, directeur général de Mini France, à l'occasion de son intervention lors du Marketing Day sur le futur de l'automobile. Est-ce toujours le cas ? "Le pourcentage de possesseurs de Mini est passé de 90 à 30 % entre 2000 et 2018 ! On passe véritablement de la possession à l'usage avec le développement des offres de leasing." Et si le leasing a brouillé la notion de prix, ce n'est pas la seule raison du renforcement du poids de la marque dans un secteur automobile de plus en plus challengé pour son impact environnemental. Depuis 2012, le nombre d'immatriculation de véhicules diesel a ainsi été divisé par deux, préfigurant un autre changement majeur, au-delà de la voiture connectée et autonome : le passage à l'électrique.


Faire connaître ses valeurs et ses nouveautés

Cette année, la Jaguar I-Pace, un SUV 100% électrique, a été élue voiture de l'année 2019 lors du Salon de l'Auto de Genève. Elle viendra concurrencer Tesla, comme la nouvelle Taycan de Porsche, qui a déjà enregistré 20 000 pré-commandes avant son lancement en septembre. Mais il n'y a pas que l'électrique : "Il faut savoir prendre en compte son époque et répondre à toutes les problématiques de mobilité. Seat lance avec Segway une trottinette électrique et nous travaillons au développement du gaz naturel véhiculaire issu du biométhane", explique ainsi Anne Lainé, directrice marketing de Seat France, en lice pour les Trophées Marketing 2019. Même logique chez Toyota : "Donner du sens à notre marque est plus essentiel que mener une guerre des prix. C'est ce que signifie notre signature de marque "Start The Impossible". Nous voulons nous inscrire dans la mobilité de demain. Nos publicités mettent toujours en avant l'offre, mais les éléments récurrents restent le Made In France ou la motorisation hybride, qui représente 65 % de nos ventes", explique ainsi Carine Pâris, Head of Advertising de Toyota France. Après l'obtention d'une certification Origine France Garantie pour sa Yaris produite à Valenciennes, le constructeur japonais diffusait en mars 2019 le premier spot TV obtenant lui aussi le label.

Les constructeurs se mettent au vert

Toyota a stoppé la production de véhicules diesel pour la majorité des gammes, et des modèles comme la Corolla ou le Rav4 ne sont plus disponibles qu'en motorisation hybride. Un segment qui a vu son nombre d'immatriculations augmenter de 7 % en 2018. Le constructeur s'investit aussi en dotant en février l'entreprise Hype, lancée par la Société du Taxi Électrique Parisien (STEP), d'une flotte de 500 taxis (des berlines Toyota Mirai à hydrogène). De son côté, un constructeur comme Renault a décidé de préempter ces nouveaux marchés en rachetant la société parisienne Yuso, à l'origine d'un algorithme de gestion des flottes de taxis et du service de VTC électrique Marcel, qui roule depuis en Renault Zoé.

En exposant leurs valeurs, les marques sont devenues des étendards. Mais encore faut-il le faire savoir ! La notoriété reste un moteur essentiel d'un secteur caractérisé par un cycle d'achat long : "On considère seulement deux à trois marques ou modèles. Il faut entrer dans la " shopping list " du client, en travaillant sa "likeability", et c'est ce que nous faisons en nous rattachant au festival Lollapalooza à Paris. L'acheteur type d'une automobile a en moyenne 54 ans, et le conducteur 45 ans. Chez Seat, ce chiffre est de 35 ans, ce qui fait de nous la marque la plus jeune du marché, d'où ce positionnement sur la musique", détaille Anne Lainé. Le développement de la notoriété s'accompagne d'un gros travail d'image, Seat ayant lancé sept nouveaux véhicules depuis 2017, participant ainsi à la modernisation de sa gamme. Parmi ces véhicules, 3 SUV, sur un segment en croissance de 4 % l'an dernier, qui pèse désormais 36 % du marché et qui est en partie à l'origine des résultats records de PSA en 2018, tant lié au rachat d'Opel (qui a vu son CA croître de +156 % en 2018) qu'au SUV Peugeot 3008.

Jeep accélère sa notoriété

En février 2018, Jeep a passé un accord de naming avec la Ligue Nationale de Basket : avec Jeep Élite, la marque a généré un ROI de 6,6 sur la période février-juin 2018 (pour un investissement de plus d'un million d'euros selon la LNB). Elle enregistre 15 000 ventes en 2018, soit une hausse de 23 % vs 2017. Elle a aussi su saisir de belles opportunités : dans le cadre du relancement de l'émission Burger Quiz par Alain Chabat sur TMC, Jeep, sponsor de la première édition dans les années 2000, s'est vu proposer le même rôle... sans contreparties autres que la fourniture d'une Jeep Renegade aux rares gagnants ! Une belle opération, alors que l'émission rassemble près d'un million de spectateurs à chaque diffusion.

Le digital révolutionne le parcours client

D'un autre côté, le segment des citadines (55 % de PdM), sera animé par le lancement de la Clio V, un pari pour Renault, qui mise sur son modèle phare, n°1 des ventes hexagonales depuis 2013, pour rivaliser avec la 208 de son concurrent Peugeot. À moins que la e-208, sa nouvelle version électrique, crée la surprise ! Dans cette rivalité, la marque au losange, comme tous ses concurrents, doit innover et digitaliser son marketing. C'est l'une des autres grandes tendances pointées du doigt par Pierre Jalady, le patron de Mini : "Depuis 20 ans, le secteur a été bouleversé par la baisse du nombre de visites en concession, qui est passée en moyenne de 4,7 à 1,2 selon nos chiffres ! Cela change totalement le tunnel de conversion."

Un constat partagé par Isabelle Fossecave, directrice Corporate eBusiness et ancienne Head of Advertising and Digital du groupe Renault : "70 % de nos clients passent sur notre site, il est donc essentiel de faire de nos owned media des outils performants ! Dans ce cadre, le contenu, de la vidéo au configurateur, est un bon moyen d'engager et de travailler le branding. Mais il faut aussi anticiper les nouvelles tendances pour comprendre comment les consommateurs en parlent et adapter nos stratégies SEO et SEM. Enfin les stratégies data deviennent essentielles. DMP, cluster d'audience... Ces outils permettent de suivre les moments de vie de nos clients, alors qu'on change en moyenne de véhicule tous les 3 à 7 ans, et d'être susceptibles de faire des campagnes push au moment du lancement de nouveaux véhicules." En matière d'innovation produit, le constructeur se distingue via par exemple l'application My Renault Z.E., qui permet d'interagir avec un véhicule électrique à distance. "Cela nous offre la possibilité de séduire au-delà de notre coeur de cible et d'aller à la conquête de nouveaux clients technophiles." Enfin, s'adapter au digital, c'est aussi se mettre au niveau des standards imposés par les DNVB : dès le mois d'avril 2019, Seat va ainsi proposer une offre de leasing sans engagement, "qui permettra de changer à loisir de véhicule ou de kilomètrage. C'est le Netflix de l'automobile", embraye Anne Lainé, qui prévoit de communiquer sur l'offre en mai.

La stratégie d'acquisition digitale d'Opel

"Détecter les parcours des visiteurs du site, qualifier leur intérêt réel et les retoucher dans l'heure pour les faire venir en concession essayer la voiture. La relation humaine et la prise en main sont essentielles pour un achat aussi impliquant : un essai, c'est un taux de transformation multiplié par 4 !", explique Nicolas Czorny, co-fondateur de l'agence Small is Bigger, qui travaille pour Opel. Provenance de l'internaute (moteur de recherche, emailing, publicité display), ou temps passé sur site permettent d'établir un scoring d'intérêt, validé au téléphone via l'analyse des verbatims. "En 4 ans, nous avons traité des dizaines de milliers de leads, et doublé le taux de transformation."

 
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