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Méthodologie

La boîte à outils du Management transversal
Chapitre VII : Gérer les situations délicates

Fiche 01 : Les niveaux d'ouverture

  • Retrouvez 8 fiches outils dans ce chapitre
  • Publié le 1 déc. 2017
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La boîte à outils du Management transversal

8 chapitres / 58 fiches

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Choisir le niveau d'ouverture adapté pour améliorer la relation

En résumé

Les niveaux d'ouverture, outil issu des travaux du psychologue Will Schutz, décrivent les niveaux de conscience que le manager transversal peut avoir dans une situation relationnelle émotionnellement déstabilisante (tension, conflit).

Aux niveaux -1, 0 et 1, il rend son interlocuteur totalement responsable de la difficulté relationnelle.

Aux niveaux 2, 3, 4 et 5, il assume sa responsabilité personnelle dans la situation.

L'ouverture comporte 2 facettes :

  • tout d'abord, l'ouverture à soi, c'est-à-dire la conscience de soi : il s'agit de rendre conscient une partie de ce qui était jusqu'à présent hors du champ de la conscience ;
  • puis l'ouverture à l'autre : elle consiste à choisir de divulguer à l'autre une partie de l'expérience vécue pour aider à la résolution de la situation conflictuelle.

Pourquoi l'utiliser ?

Objectif

Se doter d'un outil opérationnel pour gérer la dimension émotionnelle d'un conflit.

Contexte

Toute situation qui génère un ressenti négatif chez le manager transversal : relation tendue ou ouvertement conflictuelle avec l'un de ses interlocuteurs.

Comment l'utiliser ?

Étapes

  • Prendre conscience de ce qui se passe pour soi dans la situation.
  • Identifier le(s) niveau(x) d'ouverture actuel(s) utilisé(s) avec son interlocuteur et choisir le niveau d'ouverture à l'autre adapté pour sortir du conflit.

Méthodologie et conseils

Le manager transversal prend conscience des raisons émotionnelles qui l'amènent à maintenir le conflit.

  • Niveau -1 le déni : c'est l'absence de conscience de soi (de ses comportements, ses sensations, ses émotions) ou de la situation. Le manager transversal se leurre. Par exemple, il n'a pas conscience d'un changement de comportement chez l'un de ses interlocuteurs.
  • Niveau 0 la rétention : c'est être conscient de la situation mais sans reconnaître totalement son vécu et sans l'exprimer. Lors d'une réunion, le manager transversal est en désaccord avec un participant mais il ne l'exprime pas car il trouve de " bonnes " raisons de se taire : " cela ne sert à rien ", " à quoi bon".
  • Niveau 1 le blâme : il s'agit de s'ouvrir en accusant l'autre et en le rendant responsable de la situation. A ce niveau, le reproche est une attaque formulée de manière agressive.

    À ces trois premiers niveaux d'ouverture, le manager transversal rend l'autre complètement responsable de la situation. Ces niveaux tendent à entretenir ou amplifier le conflit.

    Aux niveaux d'ouverture suivants, le manager transversal a conscience et assume la responsabilité de ses comportements et de son ressenti dans le conflit.

  • Niveau 2 le ressenti : la personne prend conscience de ses émotions et les exprime : " je me sens agacé, énervé ", " je suis en colère ".
  • Niveau 3 l'explication : il s'agit de décrire les faits concrets qui sont à l'origine de la situation.
  • Niveau 4 la projection : le manager transversal prend conscience de ce qu'il imagine que l'autre pense de lui, des pensées qu'il lui attribue à son sujet.
  • Niveau 5 la peur : c'est le niveau ultime de la prise de conscience de soi, celui où le manager transversal identifie la peur sous-jacente qui, non surmontée, explique son implication dans le conflit et la difficulté à en sortir.
Avantages
  • Cet outil permet au manager transversal de prendre conscience de son ressenti négatif et de le désamorcer pour sortir d'un conflit.
  • Il est particulièrement utile dans des situations dans lesquelles il ne comprend pas de prime abord l'émotion négative qu'il ressent dans une situation.
Précautions à prendre
  • S'isoler au calme facilite la prise de conscience.

Comment être plus efficace ?

L'ouverture à soi (la conscience de soi)

Pour accroître la conscience de soi, le manager transversal se posera utilement les questions suivantes :

  • Niveau 2 le ressenti

Qu'est-ce que je ressens face à cette situation ?

Il pourra identifier l'une des 4 émotions de base (colère, peur, tristesse, joie) et affiner en identifiant l'intensité de son émotion. Par exemple, dans le registre de la colère : " je me sens agacé, en colère " ou dans le registre de la peur : " j'ai le trac, je me sens angoissé, paniqué ".

  • Niveau 3 l'explication

Quelle est la situation (les faits) ? Il s'agit d'expliciter le(s) déclencheur(s) de l'émotion en décrivant factuellement la situation. Les faits, les comportements sont observables : ce sont les éléments que pourrait capter une caméra vidéo.

  • Niveau 4 la projection

Qu'est-ce que j'imagine que l'autre pense de moi ? La question est ici de prendre conscience du " film " que se fait le manager transversal à propos de la situation. Quelle est l'interprétation qu'il donne aux comportements de son interlocuteur ? Par exemple : " il ne m'a pas invité à la réunion, donc il pense que je ne suis pas suffisamment important ", " Il ne m'a pas fait remonter des informations, donc il pense que je ne suis pas assez compétent ".

  • Niveau 5 la peur

Quelle est la peur qui est activée chez moi ? Selon Will Schutz, les trois peurs personnelles profondes sont :

  • la peur d'être insignifiant : la crainte de ne pas avoir de valeur, de ne pas être digne d'attention ;
  • la peur d'être incompétent : la crainte de ne pas savoir faire, de ne pas être en capacité de faire face aux situations ou de se prendre en charge de façon autonome ;
  • la peur de ne pas être aimable : la crainte de ne pas être digne d'être apprécié, de ne pas être sympathique.

Une même situation donnera lieu à une explication et une projection différente en fonction de la problématique qui concerne plus particulièrement le manager transversal. Par exemple, " il ne m'a pas invité à la réunion " (explication) pourra être interprété (la projection) comme " il considère que je ne suis pas assez important, que je ne suis pas compétent ou il ne m'apprécie pas ".

L'ouverture à l'autre

L'hypothèse est que le conflit est entretenu par manque d'ouverture à l'autre (niveaux - 1, 0 ou 1) et que pour en sortir, il convient donc de s'ouvrir davantage.

Le choix du niveau d'ouverture à l'autre sera fonction du degré de confiance dans la relation : les niveaux 2 et 3 sont bien souvent suffisants pour débloquer la situation. Les niveaux 4 et 5 supposent une confiance élevée dans son interlocuteur.

  • S'ouvrir à l'autre va consister à :
  • niveau 2 exprimer son ressenti : " vis-à-vis de vous, je ressens... " ;
  • niveau 3 décrire les faits : " parce que j'ai constaté... " ;
  • niveau 4 verbaliser sa projection : " je me suis imaginé que vous pensiez que j'étais... " ;
  • niveau 5 exprimer sa peur : " et j'ai peur d'être... ".

Et terminer en exprimant son besoin et en formulant sa demande : " j'ai besoin de... aussi je vous demande... ".

S'ouvrir à soi permet de choisir le niveau d'ouverture à l'autre.

CAS : Un responsable sécurité et un directeur de filiale sont en conflit

Contexte

Le responsable sécurité d'un grand groupe industriel est en conflit avec le directeur d'une filiale du groupe. Le premier reproche au second de l'empêcher de contacter directement les collaborateurs impliqués dans la politique sécurité. Le directeur, quant à lui, se plaint de ne pas être informé des interventions du manager transversal dans sa filiale. Cette situation est problématique car la filiale a été choisie comme pilote pour mettre en place les dernières évolutions de la politique sécurité du groupe.

Intervention

À l'aide des niveaux d'ouverture, ils prennent conscience qu'ils se sentent tous les deux agacés (niveau 2). Ils verbalisent les faits (niveau 3) et prennent conscience de l'interprétation (niveau 4) qu'ils en ont fait : le responsable sécurité imaginait que le directeur le considérait comme incompétent. Le directeur imaginait quant à lui que le responsable sécurité le considérait comme peu important. Cette situation les mettait en contact avec leurs peurs personnelles respectives d'être incompétent et insignifiant (niveau 5). Forts de cette prise de conscience, ils ont pu échanger sur leurs besoins respectifs et définir des règles du jeu pour commencer à coopérer.

Jean-Pierre TESTA, Bertrand DEROULEDE

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