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[Success story] L'incroyable histoire de la "spritzmania"

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[Success story] L'incroyable histoire de la 'spritzmania'

Inconnu il y a quatre ans, l'Aperol Spritz est devenu un des cocktails les plus vendus en France. Retour sur une success story orchestrée par le groupe Campari et Baron de Rotshchild, distributeur de la marque Aperol en France.

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Prenez un rayon de soleil ­d'Italie, un distributeur rodé aux stratégies ultra-premium, incorporez un zeste de publicité et laissez patienter deux à trois ans, vous obtiendrez un des succès ­marketing les plus marquants de l'année 2015. Arrivé sur le marché français il y a quatre ans, le spritz fait incontestablement partie des cocktails stars de l'été 2015, ­déstabilisant le mojito et éclipsant le rosé-pamplemousse. Pourtant, cette liqueur un brin amère, née en Vénétie en 1919, n'est qu'un apéritif local lorsque Campari rachète Aperol en 2003. Le groupe décide alors de projeter la marque sur la scène internationale et de la positionner comme un produit premium, offrant au ­cocktail ses lettres de noblesse. Coup de maître, la société a la bonne idée de préempter le nom du "spritz" pour l'associer à sa liqueur, à l'inverse de la majorité des cocktails. Le succès est vite au rendez-vous: l'Aperol Spritz est le spiritueux le plus vendu en Italie, devançant Martini ainsi que la marque mère, Campari. À l'international, la marque multiplie ses ventes par quatre depuis 2003, affichant une croissance de 7 % en 2014. Et aux États-Unis, le breuvage orangé est inscrit parmi les cocktails clés de l'influente International Bartender Association en 2012. En France, l'hyper­croissance des ventes témoigne de cette percée d'Aperol sur un marché des spiritueux pourtant très concurrentiel et ­réglementé : en 2015, il s'en est écoulé quelque 750 000 litres, soit 75 fois plus qu'en 2011 !

Construire une demande

À l'origine de ce succès, une stratégie marketing de premiumisation menée par RFD (Rothschild France Distribution), le distributeur français de l'Aperol. Que le groupe italien ait choisi RFD, connu pour distribuer des marques d'alcool de prestige comme les vins Mouton Cadet, est en soi signifiant.

Pour créer la demande autour du nouveau cocktail, l'Aperol Spritz s'est d'abord concentré sur la région parisienne "qui reste en France le lieu où naissent les tendances" et le Sud-Est "pour sa proximité italienne et sa clientèle premium", précise Stéphane Cronier, directeur des spiritueux chez RFD. "Chi va piano, va sano": alors même que 80% du business se fait en grande distribution, la marque privilégie le réseau CHR, qu'elle va travailler au corps pendant trois ans. Car si l'Aperol Spritz possède une image premium, ce n'est pas du fait de son prix mais d'une stratégie de distribution sélective. "Nous sommes partis sur le terrain former les barmaids et expliquer le produit. Cette phase d'éducation du marché est essentielle quand on lance un produit totalement inconnu: toute la stratégie a consisté à construire une demande." Outre les établissements haut de gamme que sont les bars et les hôtels chics, Aperol est aussi distribué dans le réseau Nicolas, plus perçu comme un caviste que comme un super­marché des vins, ainsi que chez Monoprix, reconnu pour son ­positionnement premium.

En parallèle, RFD cible en priorité les jeunes actifs urbains de 25-35 ans, plutôt CSP+ et prescripteurs en matière de tendances: "Installés professionnellement et n'étant pas encore contraints par les obligations familiales, ils disposent d'un bon pouvoir d'achat, sortent beaucoup et aiment découvrir les nouveautés. Enfin, c'est un âge où le palais développe un goût pour l'amertume, délaissant à l'inverse les saveurs trop sucrées."


Des marges élevées

Et la mayonnaise prend: peu à peu, le spritz s'installe dans les habitudes des consommateurs branchés et devient "la" boisson à la mode. Son faible coût de fabrication n'est pas pour rien dans l'engouement des cafés et des restaurants à mettre en avant l'apéritif italien. Bénéficiant d'une fiscalité plus favorable qu'un alcool fort, l'Aperol avec ses 15° affiche un coût initial oscillant entre 80 et 90 centimes ­d'euros le verre, contre le double pour un mojito, qui utilise le rhum. Mais son prix de vente est chic. Un positionnement qui en fait une poule aux oeufs d'or pour les commerçants qui en tirent une marge importante.

Afin de transformer un phénomène de mode en habitude de consommation durable, le groupe Campari part à la conquête du grand public en 2013 et inonde la grande distribution. Des animations et des séances de dégustation sont organisées dans les magasins. Pour soutenir cette offensive en GMS et faire connaître le produit au plus grand nombre, la marque se dévoile dans la rue, les Abribus et les transports via une massive campagne d'affichage dans les 30 plus grosses agglomérations françaises. "Notre objectif est aujourd'hui de développer la notoriété d'Aperol", rapporte Stéphane Cronier. Pour le distributeur, la marque possède un énorme potentiel de développement sur le marché français et doit encore monter en puissance: "Nous ne sommes qu'au début de l'histoire."

Aperol n'en abandonne pas pour autant sa clientèle premium, qu'elle continue à adresser en nouant des partenariats ciblés avec des lieux chics et branchés, ambassadeur de la marque. Ainsi de la Folie Douce, un réseau de bars-clubs-restaurants alpins qui, de Megève à Courchevel, drainent une clientèle aisée, ou bien encore du Pavillon du Lac, lieu de sortie parisien raffiné sis aux Buttes-Chaumont qui a fait du spritz son cocktail phare, star de ses soirées DJ du jeudi. La "spritzmania" a de beaux jours devant elle.

L'Aperol Spritz : recette d'un succès

Au titre des ingrédients auxquels l'Aperol Spritz doit son succès, figurent à la carte :

- Un produit simple à forte marge : peu cher à produire, l'Aperol s'accompagne d'une dose de prosecco, un vin blanc italien au coût très abordable. En conséquence, le spritz est pour les bars et les restaurants un produit très rentable, un argument de poids pour Aperol lorsqu'il s'agit de les convaincre de mettre en avant son produit.

- Un contexte porteur : la mixologie, cet art du cocktail, revient en force comme en témoigne la multiplication des bars à cocktails dans la capitale.

- Des origines séduisantes : les racines italiennes du spritz véhiculent une image positive du cocktail à la couleur orangée. L'Italie est associée à la convivialité, mais aussi à un sens de l'élégance.

- Un prix bas pour conquérir le grand public : l'Aperol est commercialisé à partir de 15 euros en grande distribution et le spritz est un cocktail simple à réaliser.

 
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