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Julien de Préaumont (Withings): "Le consommateur veut être maître des données concernant sa santé"

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Julien de Préaumont (Withings): 'Le consommateur veut être maître des données concernant sa santé'

Contraction de wi-fi et things ("choses", en angais), Withings est le pionnier français de la santé 2.0. Son directeur marketing, Julien de Préaumont, nous dévoile la stratégie marketing de ce fleuron de la "French tech", considéré par certains comme l'Apple de demain.

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Comment Withings est-il devenu un ­acteur majeur de la santé connectée?

Tout a démarré par le lancement, à l'été 2009, du produit qui est toujours notre best-seller, la balance connectée, capable d'enregistrer des courbes de poids et de donner un retour intéressant grâce à l'application associée. Depuis, nous avons largement étendu notre gamme avec un système de surveillance du sommeil, un tensiomètre, un pèse-bébé intelligent, deux montres intelligentes, une caméra connectée, un bracelet traqueur d'activité...

Selon le cabinet Roland Berger, d'ici à 2017, le marché de la santé connectée pèsera, en France, environ 3 milliards d'euros. Comment expliquez-vous ce phénomène?

Premièrement, cette révolution du "quantified self" ("auto-­mesure", littéralement) est intrinsèquement liée à la généralisation du smartphone. C'est, en effet, l'écran du mobile qui sert d'interface pour visualiser les données issues des objets connectés (poids, rythme cardiaque, tension ou encore calories dépensées...). Deuxièmement, l'avènement des technologies sans fil a rendu ces produits financièrement accessibles. Enfin, sociologiquement, le consommateur se préoccupe de plus en plus de sa santé et se veut ­désormais maître de l'information qui le concerne.

Vous concevez des produits connectés. Comment parvenez-vous à faire comprendre qu'il ne s'agit pas de simples gadgets ?

Grâce à notre gamme complète, nous disposons d'une approche à 360 degrés de la santé. Nous couvrons les principaux aspects du secteur, y compris l'activité, le sommeil, le poids et le rythme cardiaque. Chaque donnée collectée est envoyée vers l'application "Health Mate", qui l'analyse et propose des outils de coaching et de motivation permettant d'améliorer le bien-être au quotidien. De cette manière, nos clients peuvent accéder, de façon durable, à leurs données de santé.

Pour aller plus loin, vous pouvez consulter le diaporama suivant : 7 objets connectés qui vont révolutionner votre quotidien.

Quel marketing utilisez-vous pour faire connaître vos produits ?

Nous réalisons un vrai travail d'éducation du consommateur -notamment par la démonstration- et formons les ­vendeurs dans les points de vente. Pour convaincre, nous recourons principalement à la mise en place de corners santé dans des enseignes comme la Fnac, Darty ou Boulanger en France. De même, nous ­investissons Best Buy ou Target aux ­États-Unis. En parallèle, nous avons noué un partenariat fort avec le réseau Apple Store.

Pourtant, avec le récent lancement de votre montre connectée, l'Activity, vous vous positionnez comme concurrents d'Apple et de son iWatch. De plus, à l'instar de la marque à la pomme, vous adoptez une approche très orientée produit...

Apple et nous partageons effectivement des valeurs similaires, comme le design, le service, l'expérience utilisateur. Mais nos produits sont différents. L'iWatch est, en quelque sorte, l'équivalent d'un smartphone porté au poignet. Nous avons opté pour la création d'un accessoire de mode connecté, agréable à porter et bénéficiant du savoir-faire d'experts suisses de l'horlogerie. La vraie révolution de cet objet est qu'il garde la forme d'une montre traditionnelle. Selon nos analyses, jusqu'ici, les bracelets connectés étaient réellement portés quelques mois, puis rangés dans un tiroir. Nous avons donc fait le pari de mettre au point une montre esthétique, à la mode, pas un gadget qui s'adresse aux geeks. C'est aussi la raison pour laquelle nous avons choisi Colette, ce haut lieu de la branchitude parisienne, pour effectuer le lancement de notre modèle premium, et attirer ainsi les fashionistas. Nous avons suivi la même stratégie de distribution sélective à l'international, en nouant, notamment, un partenariat avec Selfridges et Harrod's, à Londres.

Julien de Préaumont, directeur marketing et entrepreneur dans l'âme

Diplômé de l'Edhec Business School, Julien de Préaumont s'est d'abord laissé tenter par la création d'entreprise. Il a en effet participé à la création de Betkup, un site communautaire de paris sportifs pour lequel il parvient à lever 500000 euros en mai 2011. "Nous faisions face à des poids lourds, tels que le PMU ou la Française des Jeux. Face à eux, nous n'avions qu'une arme : l'inventivité." Julien de Préaumont est admiratif d'Elon Musk, le serial-entrepreneur californien, père de PayPal... Il y a, d'ailleurs, travaillé durant trois ans à la sortie de ses études.

Envisagez-vous d'utiliser d'autres circuits de distribution?

Pour Activity, nous visons également le réseau des horlogers. Plus généralement, pour nos objets connectés, nous cherchons aussi à intégrer le circuit des pharmacies. Nous pensons qu'installer des corners "objets connectés" en officine aurait tout son sens.

Internet joue un rôle important dans votre stratégie. Comment ­expliquez-vous sa montée en puissance?

Très souvent, les clients se laissent d'abord tenter par un achat en point de vente. Or, en commençant à se familiariser avec l'objet, ils se connectent à l'application et c'est là que nous entrons en contact avec eux. Nous disposons d'un pôle CRM très fort. Nous rythmons la vie de nos consommateurs en leur proposant régulièrement de nouvelles fonctionnalités gratuites sur l'application afin d'optimiser l'apport de leur objet connecté. Pour enrichir les fonctionnalités existantes, nous prenons en compte les commentaires des utilisateurs, nous nous inspirons de leurs usages... Par exemple, sur l'appli balance, nous avons ajouté, à la demande de certains consommateurs, l'indication de la météo. Ces améliorations constantes créent du lien, de la confiance et incitent le client à revenir sur notre site pour connaître les nouveautés. Il ­découvre alors notre offre dans son intégralité. Pour le ­séduire, nous multiplions aussi les ­tutoriels, les vidéos de présentation, les contenus explicatifs...


Comment utilisez-vous les ­réseaux ­sociaux?

Nous offrons aux utilisateurs de nos appareils la possibilité de communiquer leurs données sur Facebook, où nous totalisons déjà 67000 fans. Les consommateurs peuvent le faire auprès des communautés qu'ils ont choisies : amis, famille... Nous nous sommes d'ailleurs rendu compte de l'effet incitatif de la donnée quand elle est partagée. Des statistiques montrent que ceux qui communiquent leurs résultats (nombre de pas parcourus dans la journée, par exemple) sont plus actifs que les autres. Cette émulation est saine et favorise une meilleure hygiène de vie.

En parallèle, vous ne boudez pas les médias traditionnels...

"Nous travaillons avec des influenceurs qui utilisent nos produits au quotidien"

Nous y investissons, en effet, même si cela reste modeste. Nous avons parrainé, en fin d'année, "Le Petit Journal" de Canal +. Avec Eggs et My Media, nous avons aussi lancé, en novembre dernier, une campagne d'affichage comportant 55 faces numériques (des supports JCDecaux), installées à La Défense. Elles indiquaient aux passants le nombre de pas qu'il leur restait à effectuer et le nombre de calories qu'ils ­allaient brûler pour se rendre de leur position à quelques points stratégiques de La Défense. Au travers de ces campagnes, nous souhaitons asseoir notre identité de marque auprès du grand public. C'est dans cette même logique que nous avons procédé à la refonte de notre logo, il y a quelques mois. Le nouveau symbole rappelle l'existence de notre écosystème de santé, composé de cinq dimensions : coeur, poids, sommeil, activité et environnement. Ces dimensions pointent les unes vers les autres, exprimant la synergie de nos objets, qui participent à créer une expérience de santé à 360 degrés.

Toujours dans l'optique de booster la notoriété votre marque, utilisez-vous le placement de produits ou comptez-vous vous offrir le soutien d'égéries?

Nous travaillons avec des influenceurs, qui utilisent nos produits au quotidien. Nous pouvons citer le fils de Rupert Murdoch ou encore Boris Diaw, le joueur de l'équipe de basket San Antonio Spurs. Ce dernier a notamment fait le buzz en portant notre montre connectée dans sa chaussette lors d'un match de basket (les règles en NBA interdisant le port de bijoux pendant la compétition) et en affichant, sur Instagram, le nombre de pas qu'il avait ainsi effectués durant la partie.


Quels sont les prochains axes de communication que vous envisagez de développer?

Toutes les données collectées via nos objets connectés sont disponibles sur une seule et même application. Elles sont ainsi analysées pour être plus lisibles par l'utilisateur et assorties de conseils. Nous allons donc renforcer notre stratégie de brand content pour valoriser notre rôle de "coachs santé". Nous cherchons également à attirer l'attention sur certaines problématiques de santé publique, sur la base des études que nous réalisons à partir des données collectées par nos produits.

"Nous souhaitons valoriser notre rôle de "coachs santé""

Dernièrement, nous avons ainsi publié une carte classant les villes françaises de plus de 100000 habitants en fonction du surpoids de leurs habitants. Selon les informations récoltées grâce aux utilisateurs de nos balances connectées, nous avons pu déterminer que sur les 37 villes françaises de plus de 100000 habitants, 30 totalisaient plus de 40% de personnes en surpoids.

Songez-vous à cibler les professionnels de santé?

Aujourd'hui, nos produits sont exclusivement vendus au grand public, mais dans un deuxième temps, nous envisageons, bien sûr, de cibler le marché des hôpitaux, des cliniques... À terme, nous souhaitons en effet intégrer davantage nos produits dans les parcours de soins, en offrant, par exemple, aux médecins la possibilité de suivre à distance la santé de leurs patients.

Withings, une start-up en pleine croissance!

Start-up française créée en 2008 par deux spécialistes des télécoms, Cédric Hutchings et Éric Carreel, la "pépite" Withings est très vite repérée. En 2010, les fondateurs lèvent 3?millions d'euros auprès de Ventech, puis, en 2013, 23,5?millions d'euros auprès de Bpifrance, IdInvest, Partners 360, Capital Partners et Ventech. C'est aussi l'année où la jeune pousse franchit le cap des 80 collaborateurs. Actuellement, elle emploie plus de 150 salariés et réalise 90?% de son chiffre d'affaires en dehors de l'Hexagone.

 
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