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[Tribune] Sale temps pour les marques nationales du secteur alimentaire ?

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[Tribune] Sale temps pour les marques nationales du secteur alimentaire ?

Dans un contexte d'inflation, de plus en plus, le consommateur se pose la question du vrai bénéfice à acheter des marques nationales, observe Hélène Delpont, Senior Client Officer chez Ipsos en France, qui partage les défis qui s'imposent à elles face à la croissance des MDD.

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L'inflation du secteur alimentaire (+11,9 % en 2023 et +7,3 % en 2022) correspond à une croissance en valeur dans la plupart des catégories. Il n'en n'est pas de même en ce qui concerne la croissance volume, qui ne concerne quasiment que les catégories "plaisir" et dont les champions sont Ferrero, Mondelez, Andros... Les vraies grandes gagnantes de l'année 2023 sont les marques de distributeurs (MDD), avec des ventes en hausse de 11,7 % en valeur et de 2,3 % en volume.

Des conséquences en matière de proximité...

Tout se passe comme si les marques nationales connaissaient une "premiumisation de fait", par rapport aux marques de distributeurs, et aux marques premier prix... Une prémiumisation subie qui concerne l'ensemble des gammes, perturbe l'organisation des portefeuilles. Les marques mainstream, à de rares exceptions près, cherchent désormais leur place. Le phénomène conduit à une perturbation des habitudes d'achat, et à une perte de proximité avec le consommateur que les résultats de nos études commencent à souligner.

Dans la plupart des catégories, la reconnaissance de la valeur ajoutée des marques nationales s'érode, ainsi que la perception de leur supériorité en termes de qualité par rapport aux MDD, qui capitalisent sur leurs progrès en termes organoleptiques et sur les engagements qualité des distributeurs. Dans ce contexte, la part des innovations baisse chez les marques nationales, d'où un déficit d'animation et de renouvellement qui les pénalise également.

... Et en matière de confiance

La tension entre les industriels et les distributeurs qui est très relayée médiatiquement, touche l'image des marques nationales, qui finissent par apparaitre comme manquant de transparence ou d'honnêteté, sont stigmatisées pour leurs pratiques de "shrinkflation" à tel point que 63 % des Français pensent que la quantité de produit diminue quand son prix n'augmente pas - pratique que 67 % jugent inacceptable - et surtout 71 % estiment que les marges des grandes marques sont l'une des causes principales de l'inflation[1]. Le mouvement de revendication des agriculteurs n'aide pas non plus les marques, qui posent la question des écarts de prix entre achat aux producteurs et vente aux consommateurs. Il n'aide pas non plus les marques qui apparaissent comme des profiteurs de guerre.

De plus en plus, le consommateur se pose la question de la vérité du prix et du vrai bénéfice à acheter les marques nationales et force est de constater qu'elles ne l'aident pas à trouver la réponse. D'abord, parce qu'elles ont réduit leurs investissements publicitaires (ce qui diminue leur présence à l'esprit, leur prise en considération lors de l'achat, la proximité et l'empathie avec elles et leurs valeurs), ensuite parce que les distributeurs, eux, communiquent de plus en plus, via des campagnes publicitaires ou grâce à la présence de leurs dirigeants sur les plateaux de télévision, qui se positionnent comme des chevaliers blancs de la protection des consommateurs, enfin parce qu'elles ne s'expriment pas et ne prennent pas position dans un débat public pourtant en phase avec les préoccupations des Français : inflation et hausse des prix sont la première de leurs inquiétudes depuis deux ans[2].

Trois défis s'imposent aux marques nationales : justifier leur prix tout en évitant le piège de la prémiumisation malgré elles, ne pas se laisser diaboliser dans un paysage où la plupart des éléments sont à charge, reprendre le leadership pour éviter que leurs communications soient perçues comme autre chose que du rattrapage.

[1] Ipsos Inflation Monitor Index - Décembre 2023

[2] Ipsos What Worries the World - Décembre 2023


L'auteure : Hélène Delpont, Senior Client Officer chez Ipsos en France. Après avoir exercé 15 années à la direction d'agences média internationales telles que Carat Expansion, Mindhsare France et Omnicom, Hélène Delpont rejoint Ipsos en 2013. Elle dirige l'expertise dédiée à l'Efficacité Publicitaire durant 5 ans. Depuis 2018, elle occupe le poste de Senior Client Officer, rattachée aux grands comptes d'Ipsos en France.

 
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