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[Vision 2024] Alexandre Guérin, DG Ipsos France:"Pessimistes, les Français s'engouffrent dans la nostalgie"

Publié par Marie-juliette Levin le - mis à jour à
[Vision 2024] Alexandre Guérin, DG Ipsos France:'Pessimistes, les Français s'engouffrent dans la nostalgie'

Le spécialiste des études de marché vient de publier les résultats de son enquête annuelle Predictions*. Ce rapport décrypte l'opinion de 25 000 personnes dans le monde sur l'année qui vient de s'écouler et leurs perspectives sur l'avenir. La France n'a pas le moral et les consommateurs se replient sur eux-mêmes. Présentation avec Alexandre Guérin, DG Ipsos France.

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L'état d'esprit des Français n'est pas au beau fixe pour aborder 2024, selon votre dernière étude. La France est en bas du classement en ce qui concerne les perspectives pour 2024. Pourquoi ce pessimisme ?

L'enquête révèle que l'optimisme est en hausse : 70% des personnes à travers les 34 pays étudiés s'attendent à ce que 2024 soit une meilleure année pour eux, soit une augmentation de 5 points par rapport à l'année précédente. Cette tendance mondiale est toutefois à nuancer, les Français se montrant particulièrement pessimistes. En effet, seuls 46% d'entre eux s'attendent à ce que 2024 soit une meilleure année pour eux. Je pense qu'il y a des raisons historiques et culturelles et d'autres liées à l'évolution de la société dans un mode de polycrises (climatiques, économiques, inflation...) Depuis toujours, les perceptions des Français sont plus sévères que dans les autres pays du monde. Sur la confiance, la satisfaction de produits et services, le rapport des salariés avec leur employeur, on constate un biais culturel. Cela traduit également une forme d'exigence. Alors que les Français semblent satisfaits de leur situation personnelle, ils ont du mal à se projeter sur les opportunités de l'avenir et la direction du pays. C'est un pessimisme projeté. En parallèle, cet état de crise permanent de la société provoque un effet de halo qui masque l'impact des bonnes nouvelles. Le sentiment de déclin, de déclassement mais aussi de colère est bien présent.

Confiants envers les fonctionnaires, les Français sont méfiants envers la publicité dans votre étude. Comment expliquez-vous ce sentiment ?

Les Français font confiance pour moitié aux fonctions de proximité à savoir les professeurs, les fonctionnaires, les médecins mais envers les élites, la défiance est forte. Cela laisse un espace intéressant pour les marques car même si les Français ne font pas confiance aux publicitaires, ils considèrent que les marques ont un rôle à jouer dans la société. Là aussi, c'est une spécificité française même si dans les autres pays du monde le manque de confiance existe. Un peu moins cependant dans les pays anglo-saxons.

Les Français prônent le retour à la nostalgie. « Certains jeunes auraient même préféré être nés dans les années 70 », dites-vous. Comment expliquez-vous ce phénomène ?

L'impression générale, c'est que le monde et la France marchaient mieux avant (score élevé de 73%). Les autorités avaient des résultats et tenaient mieux leurs engagements. Cette idée de la nostalgie est assez fédératrice. Les Français déclarent s'inspirer à 71% des valeurs du passé car ils pendent que la France est en déclin (82% en hausse de 7 points VS 2022) avec une crise de l'autorité. Ce pessimisme va se poursuivre en 2024. La nostalgie et la simplicité gagnent du terrain à mesure que les individus se détournent de la scène nationale et internationale.

Vous expliquez que l'inflation a transformé la relation des Français avec les marques. Plus de la moitié disent privilégier des marques qui reflètent leurs valeurs personnelles... Qu'est-ce que cela signifie ?

On observe que les marques sont sorties gagnantes de la période du Covid. Avec l'inflation et la hausse des prix, les arbitrages se font en faveur des marques blanches et MDD. Mais, dans le rapport des Français aux marques, l'enjeu est de devenir une marque engageante c'est-à-dire en ligne avec son ADN tout en répondant aux attentes des consommateurs. 52% des Français achètent des marques qui collent à leurs valeurs dont près de 60% des jeunes issus de la génération Z et Y. Ce n'est pas le rôle des marques de changer le monde, mais les marques peuvent changer leurs mondes pour créer des liens de proximité au-delà des grands discours.

Les JO en 2024 sont-ils perçus comme une occasion de se réjouir en 2024 ?

Les Français sont partagés sur la capacité de la France a remporté plus de médailles qu'en 2020.

Et l'environnement ?

C'est un sujet d'inquiétude très présent. Pas moins de 85% des Français s'attendent à voir les températures augmenter en 2024 et 78% pensent que le pays devra faire face à plus de phénomènes météorologiques extrêmes en 2024. 53% anticipent que le gouvernement fixera des objectifs plus stricts de diminution des émissions carbone.

Enfin, comment les Français appréhendent-ils l'IA ?

En France, un tiers des citoyens pensent que l'intelligence artificielle entraînera la création de nouveaux emplois, et 64% s'attendent à ce qu'elle en détruise. Nous n'en sommes qu'au tout début de l'histoire même si 51% Français ont conscience de l'impact de cette technologie de rupture dans leur vie quotidienne. Mais pour la moitié des Français, l'IA génère de la nervosité et de l'anxiété.

*Global Advisor predictions 2024- Enquête menée par Ipsos via sa plateforme Global Advisor. 25 292 personnes de 34 pays ont été interrogées du 20 octobre au 3 novembre 2023.


 
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