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L'homosexuel: caricature facile pour publicitaire peu inspiré

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La publicité use et abuse des clichés homosexuels. Mais à trop - et mal - vouloir séduire cette cible facilement associée à un fort pouvoir d'achat, ne risque-t-on pas de détourner l'ensemble des consommateurs?

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La publicité joue un véritable rôle social dans la mesure où elle permet de faire évoluer les mentalités sur des sujets du quotidien. Ainsi, il y a encore peu, le monde de la publicité était 100% hétérosexuel, situation qui a graduellement évolué. Signe d'une intégration de la communauté gay et par conséquent de son acceptation? La réalité ne semble pas si claire. Au départ, l'homosexualité était uniquement utilisée dans les publicités de prévention contre les maladies sexuellement transmissibles ou par les organismes militant pour l'égalité sociale. Puis, les marques plus généralistes se sont emparées du phénomène gay alors qu'il devenait «tendance». Pourtant, sans volontairement être homophobes, ces publicités ont enfermé les homosexuels dans un contraste avec les hétérosexuels. Rien d'étonnant, au fond, puisque notre société a toujours joué sur l'opposition hommes/femmes, essayant de faire rentrer chacun dans des cases communément acceptées.

Grégory Pouy (Vanksen Group):

«Sans le vouloir, ces publicités ont enfermé les homosexuels dans un contraste avec les hétérosexuels.»

Des marques opportunistes

Les homosexuels se sont alors vus représentés en «drama queens», incapables d'avoir des réactions mesurées, ou en bodybuildés soignés et égocentriques. S'il est vrai que les homosexuels prennent généralement plus soin d'eux, l'univers du luxe use et abuse de ces éphèbes musclés de manière très ambiguë en les figeant dans des poses lascives, mais sans jamais aborder clairement leur sexualité. De plus, pour la plupart de ces caricatures au goût douteux, «homosexualité» est synonyme de «masculin». En effet, les lesbiennes ne sont peu ou pas évoquées et apparaissent presque uniquement dans les publicités militantes. Il s'agit pourtant d'une niche particulièrement intéressante, elle aussi.

On sent donc clairement l'opportunisme maladroit qui vise à séduire une cible à fort pouvoir d'achat: des hommes considérés comme célibataires et sans enfant. D'ailleurs, en ouvrant un magazine dédié à la communauté gay, on réalise rapidement que les publicitaires manquent d'imagination et choisissent des personnes au physique avantageux, tous muscles dehors, que ce soit pour vendre une chemise ou un parfum pour chien... Certes, on pourra argumenter en se disant qu'il faut accepter que la publicité aille à l'essentiel sans laisser place à la nuance. Après tout, les idées doivent être vendues en une page seulement ou en 30 secondes chrono.

Mais quel intérêt d'utiliser l'image de l'homo pour s'en moquer ou admirer un corps d'athlète? Heureusement, sur l'initiative des associations luttant contre les maladies sexuellement transmissibles, quelques marques comme MTV, Guinness, Absolut, Hyundai ou encore Levi's commencent à comprendre la nécessité d'adapter réellement leurs messages à cette cible. Ces marques produisent des spots dédiés à ces communautés en leur délivrant un message bien spécifique. On ne se moque pas, on ne «ghettoïse» pas et on accepte la différence avec respect, tout simplement.

En publicité, il s'agit de sortir des clichés, notamment vis-à-vis des homosexuels.

En publicité, il s'agit de sortir des clichés, notamment vis-à-vis des homosexuels.

Vers une pub responsable?

Il est clair qu'ici la publicité ne joue pas son rôle social et se trouve simplement suiveuse et opportuniste. Evidemment, la publicité a toujours utilisé les caricatures pour vendre: des blondes écervelées en passant par les Noirs qui courent vite ou encore les parfaites ménagères. Les homosexuels ne sont pas les seules victimes de ces préjugés et il faut reconnaître que ces publicités sont majoritairement efficaces, car elles font appel à des lieux communs. Cependant, les marques auraient plus qu'intérêt à prendre en considération - lorsque cela s'avère pertinent - les homosexuels et les minorités de manière générale, de les micro cibler avec des messages spécifiques, qui se montreront d'autant plus efficaces.

GREGORY POUY, STRATEGY AND COMMUNICATION DIRECTOR, VANKSEN GROUP

 
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Grégory Pouy

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