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Automobile et environnement : les Français sont-ils prêts à agir ?

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Que ce soit au niveau européen ou national, les nouvelles mesures visant à réduire la pollution de l'air par l'automobile témoignent d'un volontarisme politique jamais encore observé. L'environnement est aujourd'hui au coeur des débats de société et la prise de conscience d'un certain niveau d'urgence à agir est importante.

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De grandes questions se posent aux intervenants du marché automobile et des problématiques environnementales, pouvoirs publics et politiques, constructeurs automobiles, associations… L'environnement est-il réellement un sujet d'intérêt pour les automobilistes français ? Peut-on attendre d'eux des modifications comportementales pour participer activement à la réduction de la pollution (en termes d'achat, de choix de transport, choix de carburant…) ? Les campagnes de communication sur le sujet ontelles réussi à sensibiliser les Français ? Dans ce contexte, comment sont perçus les constructeurs automobiles ?

Les automobilistes français pétris de bonnes intentions, mais…

Aujourd'hui, le travail de sensibilisation s'opère et produit ses premiers effets dans la prise de conscience de l'urgence à agir. Cependant, le temps de l'action ne semble pas encore venu. Comme le montre l'Observatoire sensibilité et comportements des automobilistes vis-à-vis des réglementations environnementales (Oscare), neuf automobilistes français sur dix reconnaissent volontiers que le niveau de pollution est un critère important au moment d'acheter un véhicule. Ce sont également neuf automobilistes sur dix qui déclarent être disposés à payer 10 % de plus une voiture qui polluerait moins.

…visiblement pas encore d'actes concrets

La mobilité des ménages est toujours assurée à 80 % par la voiture. Ainsi, l'Oscare montre que les conducteurs français sont peu enclins à renoncer à leur voiture : 7 % pensent utiliser un autre mode de transport moins polluant dans les six prochains mois. Dans ce contexte, et en dépit de la mise en avant par les pouvoirs publics des transports en commun, la société française se trouve aujourd'hui dans une situation de quasi-statu quo. Les transports en commun seraient l'alternative la plus envisagée, mais seuls 3 % des automobilistes ont l'intention de les utiliser en lieu et place de la voiture.

Une certaine méconnaissance de l'impact écologique de l'automobile

Malgré une communication et un niveau d'informations plus importants que par le passé, la culture des automobilistes français sur les problématiques environnementales semble encore limitée. Dans les faits, seul un sur cinq envisageant d'acheter une voiture dans les six prochains mois choisirait un modèle de puissance inférieur à celui qu'il possède aujourd'hui. Ceci pouvant être une bonne solution de réduction des émissions de gaz carbonique. Dans le même ordre d'idée, le dispositif “étiquette énergie” (apposé sur les véhicules neufs) est sans doute une mesure contribuant à informer les automobilistes français. Cependant, selon l'Oscare, seul un automobiliste sur deux en a déjà entendu parler (y compris pour les personnes envisageant d'acheter une voiture neuve dans les six mois). De plus, et même après explications, les automobilistes ont tendance à largement sousestimer le niveau des émissions de leur véhicule principal. 69 % des Français classent leur véhicule principal dans les catégories A, B ou C, alors que, si l'on se réfère aux ventes de véhicules neufs, 40 % sont classés dans ces trois lettres. On mesure ainsi tout le travail qui reste à réaliser pour que la prise de conscience soit suffisamment forte pour modifier les comportements. Dans un registre plus positif, ce dispositif étiquette énergie semble néanmoins être un bon vecteur d'information, une majorité de Français estimant que cette mesure pourrait être efficace pour réduire la pollution automobile. Le dispositif étiquette énergie n'est pas le seul mis en avant par les pouvoirs publics. Les biocarburants ont également occupé le devant de la scène médiatique, mais pour quels résultats… La forte médiatisation réalisée par le gouvernement sur les biocarburants (éthanol) ne semble pas avoir permis d'inscrire fortement cette alternative dans l'esprit des automobilistes. Les biocarburants sont les plus cités par 60 % des conducteurs comme une énergie alternative crédible que ce soit le colza (35 %) ou l'éthanol (14 %). Cependant, cette énergie ne distance pas de beaucoup l'électricité (59 %) et le gaz (53 %) qui n'ont pourtant pas bénéficié récemment de la même couverture médiatique. Au regard de la campagne médiatique de la fin 2006, les biocarburants ne suscitent pas un engouement généralisé. Au total, si les carburants classiques venaient à disparaître, un tiers des automobilistes français adopteraient finalement les biocarburants. L'électricité, même en l'absence d'une offre de véhicules sur le marché, pourrait être une bonne alternative aux carburants classiques. Les gaz (GPL, hydrogène), arrivent en troisième position, cités par 15 % des automobilistes. Au regard de ces résultats, le consensus sur l'énergie du futur à adopter n'est toujours pas réalisé que ce soit au niveau politique, économique et, finalement, au niveau des automobilistes français. Au total, pour obtenir une plus grande efficacité en termes de communication sur ce sujet, la pédagogie couplée à un discours politique et économique (de la part des constructeurs) homogène et consensuel pourrait favoriser le passage à l'action.

Toyota dans la roue des constructeurs français

Dans le contexte d'une prise de conscience et de nouvelles réglementations plus strictes, les constructeurs emboitent le pas des pouvoirs publics et investissent massivement le sujet de l'environnement. Différentes stratégies sont mises en place : offrir une gamme propre ou utiliser un véhicule “fer de lance”. Les constructeurs français ont adopté une stratégie qui consiste à développer des gammes complètes afin de limiter les émissions de gaz carbonique sur chaque segment. A ce titre, Renault est le constructeur qui réalise, selon les automobilistes, le plus d'efforts pour produire des véhicules propres (cité par 20 % des automobilistes français). La stratégie concurrente consiste à développer un véhicule emblématique de la volonté de réduire les émissions de CO2. Toyota, avec la Prius, est le principal constructeur à avoir choisi cette stratégie. On doit reconnaître qu'aujourd'hui, cette politique est payante. Grâce à ce modèle, Toyota est le deuxième constructeur cité (17 %) par les automobilistes français (devant Peugeot et Citroën). A noter que la Toyota Prius est le modèle considéré comme le moins polluant du marché automobile français (cité par 8 % des automobilistes) devant la Renault Clio (5 %). Quand on s'attache à l'avis des seuls “experts” (soit les Français ayant une certaine connaissance des constructeurs), Toyota supplante Renault et se place en première position. Cette situation est finalement assez paradoxale. Les constructeurs français ont aujourd'hui les gammes qui, en moyenne, produisent le moins de gaz carbonique (par rapport à leurs concurrents). Cette donnée n'est finalement pas reconnue massivement par les Français… S'agit-il encore d'un problème de communication ? Et si, finalement, les campagnes menées par les pouvoirs publics comme des constructeurs, certes abondantes, n'étaient pas adaptées pour inciter à l'action. La sensibilisation est acquise (par la peur, les scénarios catastrophes…). Il apparaît que le temps de l'éducation soit venu pour enfin favoriser l'action.

 
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Denis Morlat, directeur d'études au département quantitatif services et industrie de Research International France

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