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« La pensée marketing est obsolète »

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Face à un consommateur à qui on ne la fait plus, Vincent Leclabart, président fondateur de l'agence Australie, prêche pour une création ambitieuse qui doit s'affranchir le plus possible du marketing.

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Quelles pourraient être les conséquences de la “consumer democracy” pour le publicitaire ?

Vincent Leclabart : “Le consommateur, c'est votre femme”, m'a-t-on toujours appris. Aujourd'hui, il n'a pas le moral, pas les moyens, même si majoritairement il a envie de dépenser. On ne la lui fait plus (cf. la deuxième version de l'étude “Publicité & Société”), il a les moyens de s'exprimer, mais, au fond, c'est toujours ma femme. A moi de trouver les mots justes pour lui parler.

Dans un numéro récent, Benoît Helbrunn disait : « Le problème du marketing, c'est qu'il neutralise le discours et donc le désir, et ça c'est le plus grave. » La création publicitaire a-t-elle encore la faculté de réveiller le désir ?

VL : La création publicitaire travaille sur le désir. Désir de croire, de posséder, de paraître, d'être… Elle possède ce pouvoir incroyable et, par chance, les Français attendent ça d'elle, comme le montre l'étude “Publicité & Société”. La création publicitaire ne se situe pas au même niveau que le marketing. Elle est à son service et, en même temps, elle peut et doit s'en affranchir le plus possible.

Si une belle idée créative restera, aujourd'hui comme hier comme demain, une belle idée, en revanche ses terrains d'expression resteront-ils les mêmes ?

VL : Une idée n'a pas d'adresse permanente. Elle peut se trouver à tous les niveaux : stratégique, créatif, médias. La prise en compte récente de l'ensemble des moyens dans la pratique publicitaire (la publicité, c'est aussi de l'événementiel, du Web, du street marketing, de la promotion des ventes ou du packaging) offre un champ d'expression immense pour ceux qui auront des idées.

Au siècle dernier, Jacques Séguéla aurait dit : « Moins de tests, plus de testicules ». Quelques décennies plus tard, la formule garde toute sa pertinence. Où la machine à idées s'est-elle bloquée ?

VL : Jacques Séguéla a repris Bernbach qui avait dit : « Don't measure opinion, make it ». La machine à idées n'est pas cassée, c'est le machiniste qui préfère s'occuper de la photocopieuse.

Si, aujourd'hui, vous deviez lancer Australie, quel en serait le modèle ?

VL : Le modèle n'a pas changé : des publicitaires, avant d'être des spécialistes ; de l'envie et le courage de dire ce que l'on pense. Le métier reste toujours à inventer. Les compétences techniques, ça se trouve. La clientèle, ça se construit avec le temps, comme la réputation. La confiance accordée aux inconnus qui démarrent est toujours aussi faible, mais la concurrence s'est raréfiée même si elle s'est renforcée.

Pour expliquer la pauvreté de la pensée marketing actuelle, outre l'effet mondialisation, globalisation, les observateurs évoquent la pauvreté de la culture et le clonage des équipes, celles des annonceurs et de leurs partenaires. Partagez vous cette opinion ?

VL : La pensée marketing est non seulement pauvre, mais elle est obsolète. A force de codifier, d'ériger des règles et des best practices, tout le monde sait à peu près ce qu'il faut faire et ne pas faire. Résultat : c'est celui qui propose son modèle qui peut gagner. Le marketing doit revenir à un marketing d'offre. Et les bons deuxième classe du marketing doivent être remplacés par des militants.

L'annonceur idéal, c'est qui ?

VL : L'annonceur idéal, demain comme aujourd'hui, c'est celui qui veut changer le monde.

 
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Propos recueillis par Rita Mazzoli

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