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Publicité : jusqu'où aller sur le Net ?

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L'e-pub s'est définitivement ancrée dans le mediaplanning des marques. Plus fluide, plus créative, plus ciblée, mais aussi parfois plus intrusive, elle nous réserve encore bien des surprises pour 2008. Encore faut-il savoir profiter au mieux du potentiel offert par ces innovations foisonnantes.

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En 2011, le marché français de la publicité sur Internet devrait représenter 3,18 milliards d'euros, selon le cabinet eMarketer. Presque le double de son estimation pour 2007 (1,67 milliard d'euros). En se classant en troisième position derrière la Grande-Bretagne et l'Allemagne, la France rattrape donc son retard sur les autres grands pays européens. Les entreprises de B to B ont enfin sauté le pas et certains acteurs, comme le pure player Cashstore, annoncent, d'ores et déjà, pouvoir mener des campagnes de notoriété uniquement sur le Web. Le phénomène d'accélération est mondial : aux États-Unis comme en Chine, la publicité on line a atteint des sommets cette année et cela n'est pas près de s'arrêter. C'est notamment le constat que fait Maurice Lévy, le P-dg de Publicis qui, au cours du Forum des Médias de Monaco, en novembre dernier, s'est dit confiant sur la forte croissance de la publicité en ligne. Tout en soulignant les possibles dérives: « Beaucoup de personnes (les groupes médias et les sites communautaires, NDLR) font des plans basés sur la publicité et ils pourraient bien être déçus parce qu'il n'y aura pas assez d'argent pour tout le monde », avait-il alors asséné, comparant la situation actuelle à celle de la bulle internet du début du millénaire.

1,2 milliard de dollars de revenus publicitaires dans le monde sont générés par les sites de réseaux sociaux.

Modes à suivre

Si l'on regarde le domaine des réseaux sociaux, par exemple, il est vrai que le partenariat signé entre Google et Myspace d'un côté (900 millions de dollars) et l'acquisition par Microsoft de 1,6% du capital de Facebook pour 240 millions de dollars de l'autre côté, valorisent démesurément ces sites. Rapporteront-ils autant d'investissements publicitaires que prévu ? Pour l'instant, ils génèrent déjà quelque 1,2 milliard de dollars de revenus publicitaires dans le monde et cette somme pourrait grimper à 3,6 milliards de dollars en 2011, selon eMarketer. Mais sur le Net, les modes semblent passer en accéléré. Après l'ultra médiatisation de Myspace sont venues celles de Second Life puis de Facebook. En attendant la suivante...

« Les annonceurs font la part des choses entre les tendances de fond et le buzz, indique Françoise Renaud, directrice recherche marketing et nouvelles technologies de l'UDA. Il est aujourd'hui nécessaire de se tenir au courant de ce qui se passe sur le Net, car ce qui peut apparaître comme un épiphénomène au premier abord peut devenir important en prenant du recul. » Exemple du moment : Facebook, que les annonceurs regardent avec envie depuis que le site s'est ouvert à eux. Quelques jours seulement après l'annonce, des dizaines de marques ont donc apposé des bannières sur le «trombinoscope», à l'instar de Canal +, Barclays, Sephora ou Saranza. Mais avec quel succès ? « Le retour sur investissement (ROI) des bannières traditionnelles sur les réseaux sociaux se révèle être très faible, estime Forrester Research dans un rapport publié en août 2007. Ces sites ne peuvent donc pas être considérés comme des sites lambda dans les campagnes marketing des annonceurs et requièrent des stratégies adaptées, notamment plus interactives. » À suivre donc, les résultats de la première application de marque en français sur Facebook : le dooblebook qui permet à un membre de retrouver son double dans le site. Celui-ci a été lancé en début d'année par Virgin Mobile, avec Hémisphère droit. « L'idée était de sortir des sentiers battus de la communication. Mais avec cette application, nous sommes moins dans une logique de ROI que d'image, de relationnel », précise tout de même Julien Allissy, directeur marketing et communication de Virgin Mobile.

Car c'est évidemment là que se situe la vraie question : comment nourrir ma marque ? Dois-je être à l'avant-garde de ce qui se fait sur le Net ou attendre que le succès soit vérifié par d'autres ? Et surtout, « quelle histoire dois-je raconter ? », ajoute Mathieu de Lesseux, coprésident de Duke. Car Internet permet - surtout depuis l'an passé où les innovations techniques ont été très importantes tant du point de vue de l'équipement (généralisation de l'ADSL) que de la création (rich média, nouveaux formats) - d'inviter réellement l'internaute dans l'univers de la marque ou du produit. Même si les liens sponsorisés, ou les simples bannières, sont encore d'actualité et restent efficaces s'ils sont utilisés à bon escient. « Tout dépend du message que l'on veut faire passer, explique Fayçal Lardidi, directeur de DMC, filiale de FullSIX. Si ce dernier est suffisamment clair, une bannière statique peut être très impactante. Le rich média n'est pas une fin en soi » Confirmation chez Meetic : « Nous regardons avec attention et testons le rich média mais, curieusement, les résultats obtenus en termes de recrutement ne sont pas aussi bons qu'avec les bannières classiques », avoue Clary Schaming, directrice business development Europe de l'entreprise.

Stéphanie Alabert (Lycos) :

« Il est rare que l'internaute demande de la pub. Pour éviter d'être intrusif, il faut donc lui proposer quelque chose d'original, de surprenant. »

Créativité exigée

Et les nouveaux formats ne sont pas toujours simples à mettre en place. Selon une étude IAB/UDA/NPA Conseil, 62 % des marketeurs interrogés estiment qu'il est important d'expérimenter de nouvelles formes de communication en utilisant les médias numériques. Mais 33 % avouent qu'ils éprouvent des difficultés à les mettre en œuvre, notamment du fait de réticences de la part de la hiérarchie. Dommage, car face à la croissance effrénée de la publicité en ligne, qui peut parfois virer à l'encombrement publicitaire, agences et annonceurs se doivent de redoubler de créativité pour attirer et séduire l'internaute. « En France par exemple, si le nombre d'annonceurs au premier semestre (41 992) est en quasi-stagnation par rapport à 2006, le nombre de créations a lui augmenté de 22 % si l'on prend en compte les bannières uniques. 2007 a constitué une véritable charnière dans la nature de la communication sur le Web », précisait en fin d'année dernière Laurent Austin, responsable commercial chez AdRelevance (Nielsen online), lors d'un atelier de l'Adetem sur la question. Agences et géants du Web tels Yahoo! Microsoft ou Google rivalisent ainsi d'inventivité en proposant sans cesse de nouveaux formats (bannières vidéo diffusant du live, bannière interactive «livesquare» ...) ou de nouveaux modes de communication publicitaire tels les widgets de marques, la diffusion de publicité dans les pdf et les fils RSS, etc.

My média is rich

Au vu des avancées réalisées en 2007, quels vont donc être les axes de la publicité on line en 2008 ? « Internet est un média où l'on peut faire énormément de choses et cela va en s' accélérant. Mais attention, toutes ne sont pas bonnes », prévient Yseulys Costes, directrice de 1 000 Mercis. Un avertissement appuyé par des études qui pointent du doigt une critique, de plus en plus forte, des internautes envers la publicité on line. « Envahissante, agressive, banale, voire dangereuse », c'est ainsi qu'une majorité d'entre eux qualifierait l'e-pub, selon le quatrième volet de «Publicité et Société», réalisé par Ipsos pour Australie. Mais la plupart des marques et des agences travaillent déjà depuis un moment sur ces critiques. Selon les piges AdRelevance, les bannières utilisant le rich média sont devenues majoritaires, remplaçant ainsi le pop-up. « Une révolution, car l'arrivée de la vidéo a fait de la publicité un contenu à part entière, capable de véhiculer de l'émotion », estime Stéphanie Alabert, directrice des études chez Lycos. Un nouveau souffle de créativité et de qualité qui a donné lieu à des dispositifs publicitaires de plus en plus consistants, interactifs et transversaux, où les frontières entre formats (bannières, sites, mini-sites) se brouillent chaque jour un peu plus.

Cela a notamment permis l'installation des marques de luxe qui ont enfin pu produire un contenu à la hauteur de leurs exigences et ont donc massivement investi sur le Net en 2007. Récemment, en Espagne, les champagnes Freixenet ont ainsi profité du potentiel d'Internet pour en faire leur axe principal de communication en diffusant un film publicitaire de dix minutes, réalisé par Martin Scorsese. Un petit bijou qui a immédiatement fait le tour de la Toile... Mais cela a également un impact sur les marques davantage grand public. Pour PlayStation par exemple, dont la cible est jeune et surtout très au fait des nouvelles applications du Net, la publicité en ligne est fondamentale: « L'idée conductrice est que l'internaute doit directement être immergé dans l'univers des jeux, décrypte Nathalie Dacquin, directrice marketing de SCE (Sony Computer Entertainment) France. Nous sommes complètement axés sur le rich média ; s'il s'agit de bannières, elles sont interactives et proposent une expérience, un univers ludique. En fait, nous associons le concept de l'«advertainment» à celui du «fine tuning». Nous évitons d'être sur les sites trop généralistes et adaptons notre contenu en fonction des sites d'hébergement de notre publicité.» Une tendance confirmée par la communication mise en place par une entreprise a priori moins concernée par la séduction de «geeks» (mordus d'Internet) : Barclays. La banque qui investit dans le Web depuis 2003, s'est distinguée cette année avec une campagne particulièrement percutante: «La famille Barclays» (MediaedgeCIA et Milk). « Pour nous, les bannières restent indispensables pour assurer une bonne visibilité à un coût relativement faible. Mais elles doivent souvent se compléter par un dispositif plus large. Car aujourd'hui, si la publicité n'apporte pas un plus, elle se fait rejeter par l'internaute », commente Christophe Martel, directeur marketing internet de Barclays.

Christophe Martel (Barclays) :

« Les campagnes on line nous permettent d'avoir des taux de transformation beaucoup plus importants que sur les autres supports. »

Mathieu de Lesseux (Duke) :

« Le marketing des marques est en train de changer du fait de ce qui se passe sur Internet. »

Le prix de l'efficacité

Le coût, bien sûr, s'en ressent. Si le média est toujours très compétitif face à la télévision, « les campagnes à moins de 150 000 ou 200 000 euros, pour les marques grand public, ne servent pas à faire grand-chose d'autre que du saupoudrage », avertit Mathieu de Lesseux. Car, outre le fait que les campagnes ont pris de l'envergure, le ticket d'entrée en termes de création s'élève à la mesure des avancées technologiques. Et le prix de l'espace publicitaire prend lui aussi de la valeur... Heureusement, dans le même temps, la mesure de l'efficacité des campagnes s'est améliorée. « Depuis un an, nous n'avons pas lancé une seule campagne sans tester son efficacité du début à la fin, que ce soit avec les taux de clics ou ceux de conversions », explique Philippe Torloting, de Digitas. Et si cette mesure est encore plus précise qu'auparavant, c'est peut-être aussi parce que les nouvelles techniques de ciblage ont permis de gagner en efficacité. La fin de l'année 2007 aura été marquée par l'arrivée en France du ciblage comportemental. Tous les grands acteurs investissent dans cette nouvelle technique. « Il s'agit d'un vrai accélérateur de performance. Si l'on prend comme base 100 un ciblage aléatoire, le contextuel permet un taux de clics de 1 71 et le comportemental de 213. Ce qui montre un taux de réactivité très fort. Ensuite, c'est à chaque annonceur de trouver le bon mix », argumente Brigitte Cantaloube, directrice commerciale de Yahoo!. Surtout, c'est à chaque partie de le faire en respectant les règles de base de protection des données. Car la publicité ciblée est dans le collimateur de Bruxelles et de la Cnil, notamment suite à la polémique lancée par l'offre publicitaire, jugée intrusive, de Facebook. « Ce site a fait une erreur de jeunesse, admet Alain Sanjaume, directeur général de Wunderloop France, une société spécialisée dans le ciblage comportemental. Mais la législation française est beaucoup plus stricte que celle des États-Unis. Ainsi, le ciblage comportemental n'est pas intrusif et permet, au contraire, de personnaliser davantage la publicité, ce qui est une demande des internautes. »

Nouvelles pistes

Pour associer encore davantage l'internaute dans le processus et faire barrage aux critiques d'intrusion et de manque de créativité, de nouvelles plateformes se sont créées pour mettre en relation les marques et les blogueurs. Certaines se contentent déjouer les intermédiaires entre les deux parties pour diffuser bannières, rédactionnel ou jeux sur les blogs mais d'autres, comme BlogBang (Publicis), vont encore plus loin avec le User Generated Content (UGC). «Nous cherchons à impliquer ces influenceurs dans le discours publicitaire en les plaçant au coeur du dispositif de création», explique Julien Braun, directeur associé de BlogBang. La marque dépose ainsi un brief publicitaire sur la plateforme, en donnant quelques éléments créatifs, puis valide a posteriori les créations réalisées par les blogueurs. « Nous avons testé le concept pour promouvoir notre site Jeunes talents, chargé de découvrir des «graines de stars ». Dans ce contexte, il était pertinent d'associer des jeunes créatifs internautes», estime Cécile Berger, directrice marque et communication de SFR. Enfin, le support internet est lui-même en mutation. L'apparition sur le marché de nouveaux terminaux proposés par Apple, Nokia, HTC et autres, pourrait bien, enfin, amorcer l'arrivée de la publicité sur l'Internet mobile. Pour l'instant, elle reste embryonnaire et assez peu qualitative, mis à part quelques expérimentations servicielles (McDonald) ou de buzz (Dior sur l'iPhone). Mais, « c'est l'un des vecteurs de développement du Web », soutient Philippe Torloting. Même s'il faudra probablement attendre 2009 pour que l'usage se généralise et 2010 pour que la publicité mobile fasse partie de l'arsenal marketing grand public.

62% des marketeurs interrogés estiment important d'innover en matière d'e-pub.
(Source : étude IAB/ UDA/NPA Conseil)

 
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BEATRICE HERAUD

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