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L'évaluation financière de la valeur d'une marque : un outil au service du marketing

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La presse se fait régulièrement l'écho des sommes, parfois astronomiques, mises sur la table pour le rachat de telle ou telle entreprise. Au centre de toutes les opérations : la ou les marques en jeu. Combien acheter ou vendre telle marque en portefeuille ? Quel prix accepter de payer pour une entreprise détentrice d'une marque forte ou à potentiel ? Une question qui a maintenant ses réponses grâce à des outils d'évaluation qui peuvent servir également aux directions marketing à piloter leurs marques pour de la création de valeur.

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Si les entreprises qui inscrivent leurs marques à leur bilan sont encore rares, le besoin en outils d'évaluation de la valeur financière d'une marque se fait de plus en plus sentir et les situations qui en nécessitent l'utilisation se multiplient. Il s'agit, bien sûr, de cas de rachat ou de cession d'entreprise, l'évaluation permettant alors d'obtenir une base de négociation. Novaction a souvent utilisé sa méthode Brand Health Check pour des clients qui voulaient auditer une marque en vue d'un achat éventuel. « Une marque qui a un bon pull, c'est-à-dire une bonne demande consommateur (positionnement prix, équilibre entre qualité perçue et prix, force de la marque...) mais un push (facteurs opérationnels, investissements publi-promotionnels et part en linéaire) faible va pouvoir être vendue plus chère que si c'était l'inverse », explique Jérôme Simulin, directeur du développement de Novaction. Dans Créer et protéger ses marques, (Lamy/Les Echos Editions), Marion Grunow-Jannin précise qu'en cas de fusion, une valorisation des marques permet de déterminer d'une part, la parité des actions des deux sociétés et, d'autre part, la valeur d'apport de la société qui veut fusionner. La marque, peut alors, dans certains cas, constituer un élément essentiel de la valeur de l'entreprise. L'évaluation financière de la valeur d'une marque est également nécessaire pour évaluer des préjudices dus, par exemple, à une copie, à de la contrefaçon, à des utilisations illicites d'une marque déposée, à de l'imitation illicite, à de la concurrence déloyale. Elle a sa place quand il s'agit de déterminer le niveau de royalties dans le cas de contrats de licence, ou encore d'évaluer une prime d'assurance sur une marque. Elle est également nécessaire quand la marque est inscrite à l'actif du bilan ou s'il est décidé de procéder à un apport partiel d'actifs comprenant sa marque. Elle peut se révéler utile dans le cadre de comptes consolidés si une société est filiale d'un groupe et entre dans le périmètre de consolidation. Elle est utile dans le cadre de la gestion d'un portefeuille de marque, en cas de réorganisation d'un groupe, de restructuration comptable (que vaut une marque face à un investisseur ?) ou pour des raisons fiscales (héritage, impôts et taxes, répartition charges/investissements). Dans tous les cas de figure, comment mesurer la valeur d'une marque, un bien immatériel, pour qu'elle soit acceptable par toutes les parties (entreprises, commissaires aux comptes, experts-comptables, banques d'affaires, fonds d'investissement...) ? « L'évaluation financière de la marque suppose la réalisation d'un audit préalable de ses caractéristiques marketing et des sources de valeur ajoutée qu'elle apporte à l'entreprise », précise Maurice Nussenbaum, directeur associé de Sorgem et responsable de Sorgem Evaluation. « Cette définition doit déboucher sur l'identification de résultats attribuables à la marque, que ceux-ci soient appréhendés à partir du chiffre d'affaires ou des bénéfices », ajoute Guy Jacquot, responsable de l'évaluation des marques chez Sorgem Evaluation. A partir de là, l'évaluation d'une marque met en jeu une triple expertise, au confluent de trois mondes : le juridique (conseils en propriété industrielle, telles Nomen Valorimark, Novamark...), le financier (les grands cabinets d'audit ou d'expertise comptable tels Coopers & Lybrand, Deloitte & Touche, Andersen, Boston Consulting Group...) et le marketing (direction marketing des entreprises et leurs sociétés d'études). Ces compétences, longtemps séparées, se rejoignent aujourd'hui. Les cabinets d'audit font souvent appel à des instituts d'études marketing, qui pour certains, ont, depuis quelques années, allié compétences marketing et expertises comptables pour ouvrir des filiales ou départements spécialisés en évaluation financière des marques. C'est le cas de Sorgem avec Sorgem Evaluation. C'est également celui - plus récemment - du groupe Ipsos avec le partenariat entre Ipsos Marketing et Societex, cabinet d'évaluation et de conseil en rapprochement d'entreprises. Qu'il s'agisse de Sorgem Evaluation ou d'Ipsos, mais aussi de FutureBrand, entité du groupe Interpublic axée sur la marque (dont la filiale française est FutureBrand Menu), la méthode de valorisation proposée est fondée sur des modèles conduisant à la définition de la classe de risque et de la prime de risque de la marque, c'est-à-dire du taux à appliquer pour actualiser les revenus attendus ; tout cela à partir d'un audit stratégique (capacité de la marque à se décliner sur de nouveaux produits ou secteurs, capacité à l'international, capacité de séparabilité sous forme de revenus de licence ou par cession, capacité de l'entreprise à valoriser ses marques, identification des sources de valeur ajoutée). Taylor Nelson Sofres propose avec Conversion Model, une méthodologie qui vise à identifier la force d'engagement de la marque auprès de ses clients et son potentiel d'attraction auprès des non-clients. Toutes ces méthodes permettent de comprendre où repose la valeur de la marque d'un point de vue financier et marketing. « Et ce, ajoute Shailendra Kumar, expert européen en matière de Brand Valuation chez FutureBrand, en apportant des réponses dans un langage compris par le financier comme le marketing. »

Création de valeur et marketing


L'évaluation financière des marques, au départ apanage du département financier, est devenue aujourd'hui un nouvel atout pour le marketing : la prise en compte par les directions marketing de la création de valeur attachée à la marque devient désormais pour elles un levier important face à la direction générale. Les responsables marketing voient là un outil légitimé par les directeurs financiers et comptables, évaluant les effets à long terme de décisions marketing. Pour Jean-Noël Kapferer, il s'agit là d'un symbole, celui du « passage des dépenses commerciales du statut de charges à celui d'investissements, d'actifs, productifs de résultats économiques futurs avec un fort degré de certitude ». L'évaluation financière des marques est-elle devenue pour le marketing un nouvel outil de pouvoir ? Si c'est le cas, le métier de la valorisation a de beaux jours devant lui. D'autant qu'il vient, pour certaines entreprises, aider les directions des ressources humaines à indexer les salaires des responsables marketing sur la valeur des marques qu'ils gèrent.

Les grands rachats de ces derniers mois


Royal Canin par Mars, pour une dizaine de milliards de francs. Ralston Purina par Nestlé, pour 80 milliards de francs. Quaker Oats par Pepsico, pour 13,4 milliards de dollars. Virgin Stores en France par Lagardère Media, pour 1 milliard de francs. Orangina par Schweppes Cadbury, pour 700 millions d'euros.

 
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Anika Michalowska

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