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Conjuguer la mode au singulier-pluriel

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L'hystérie des défilés, les emportements lyriques des médias, les couper-coller des bureaux de style, tous ces "Canada dry" de la mode en cachent souvent les véritables enjeux : choix financiers, économiques et commerciaux et mouvements de société qui s'y reflètent. Un nouveau questionnement sur les liens entre mode culture et humanités se fait jour.

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Hors de la mode point de salut ? Serait-ce la mode qui définit la culture aujourd'hui ? « Le monde de la publicité est le monde d'un jour. C'est un monde nécessairement plat, sans profondeur, sur lequel le temps dépose des entités discontinues côte à côte : chaque jour, chaque entité temporelle est un tout en soi... De cette façon, on transforme entièrement les structures de la vie humaine... L'homme du commun est invité à découper sa vie en tranches, une suite de vies d'un jour, régulées par l'horloge de la mode », écrivait déjà l'écrivain et peintre britannique Wyndham Lewis, en 1928, dans son ouvrage, L'Occidental et le temps. Et, aujourd'hui, le phénomène se serait amplifié au point d'avoir donné naissance à un homme-présent qui veut abolir le temps* dans le renouvellement permanent de la sénescence programmée. Et c'est bien la mode qui mène la danse. Ses images se succèdent et s'interpénètrent à une vitesse éblouissante. La nouveauté pour la nouveauté et l'accélération à tout prix sont telles qu'elles pourraient faire dire, pour parodier la phrase de Coco Chanel, « La mode, c'est ce qui est déjà démodé ». Mais, comme l'a souligné Marc Fumaroli, professeur au Collège de France lors d'une récente conférence**, « Si j'en crois mon expérience américaine, l'émergence tempétueuse de la société d'information et de communication a réveillé l'appétit, peut-être à titre de contrepoids, pour tout ce qui échappe à une envahissante technosphère où l'on peut sans doute brûler d'enthousiasme futuriste, mais aussi être atteint de claustrophobie. » Et c'est ce dont la mode pourrait être en train de s'inspirer, si l'on en croit Carole Réfabert, cofondatrice, avec Gérard Caron de l'agence Scopes, "l'Observatoire comparatif du monde de la consommation en images". « Le secteur de la mode se tourne de plus en plus vers un marketing de la personne. Mais il doit faire face à une situation paradoxale, explique-t-elle. Les personnalités sont de plus en plus protéiformes. Les consommateurs font de plus en plus appel aux marques pour signaler une appartenance, se redonner un identité en commun dans un monde mécanique et désenchanté. Et, en même temps, ils recherchent des propositions de plus en plus personnalisées et singulières de se démarquer face à l'uniformisation de la société. Chez la même personne, coexistent le goût pour des produits de grandes marques à l'assise internationale et de petits labels de proximité plus individuels. Le produit consommé qui vient donner une identité éphémère à un moment de vie ne suffit plus. Je constate l'omniprésence d'une quête existentielle de repères inscrite dans une durée. Regardez le Japon qui met en doute un système aveugle où toutes les différences s'estompent par un retour sur des valeurs asiatiques. Nous semblons nous préoccuper de nouveau de la valeur de nos humanités. Le consommateur est confronté à une immense liberté à laquelle il veut donner son sens. » Que nous réserve la mode demain ? Alors que clonage, vache folle, effet de serre, pollution, épidémies... sèment l'inquiétude, ce sont des valeurs existentielles qui vont faire l'objet de la réflexion créative. Vieillir harmonieusement, trouver une nouvelle organisation de son temps, intégrer le sport et l'hygiène musculaire dans sa vie quotidienne tel est le courant de fond qui va guider la mode. La santé deviendra l'attribut commun à tous les secteurs de consommation. Un défi entrepreneurial qui balaiera l'imitation à moindre coût au profit de la plus forte valeur symbolique. * Le Sacre du présent, de Zaki Laïdi. Editions Flammarion. ** "Les humanités sont la mémoire vivante du passé", dans le cadre de l'Université de tous les savoirs de la Mission 2000.

BON OU MAUVAIS "TASTE" ?


Le salon textile Première Vision s'est doté, en 1996, d'un observatoire international. Cette année, il édite la revue Taste, confiée à la journaliste et écrivain Laurence Benaïm et à Michel Mallard pour la direction artistique. « Notre but est de rendre compte d'une situation à un moment donné, de mettre en perspective ces observations, de les décoder en faisant parler de nombreuses personnalités et, pour la première fois, des créateurs de mode », explique Laurence Benaïm. Pour les amateurs d'art contemporain, pour s'amuser avec les plus récentes "projections" en matière d'attitudes de consommation ("Fishwear", "Artillect", "Blackolor", "Kidults", "Sur mesure global", "Védicaments", "Virtuality show", "Greentech"...), pour l'entretien avec Daniel Sibony, psychanalyste et professeur de mathématiques, sur le bon et le mauvais goût, pour les photos de Jean-Baptiste Mondino, de Jean-Pierre Khazem, de Guido Morafico, etc.

 
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