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Aldi, le modèle qui rapporte

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Un fer à repasser vapeur à 11,99 €, des rideaux de voilage pour 2,99 €, des bottines de pluie pour femme aux prix de 6,59 €, un cabas en palmier naturel à 2,89 €, c'est possible ! Aldi en vend tous les jours. Pourtant, effaçons d'emblée une idée reçue : le prix n'est pas l'unique clé du succès d'une enseigne comme Aldi. La preuve ? Sur ce terrain, les hard discounters sont battus, assez nettement du reste, par les gammes premiers prix des distributeurs traditionnels. Leclerc avance le chiffre moyen de 10 % d'économies avec sa gamme économique Eco+ par rapport aux produits des hard discounters.

Une mécanique parfaitement huilée


Son essor, Aldi le doit d'abord à un concept parfaitement maîtrisé. Plutôt que le prix, ce sont deux éléments qu'il convient de mettre en avant. D'une part, une idée de départ : proposer un assortiment restreint. Avec un peu plus de 600 références, Aldi a pour règle de limiter au strict nécessaire la présence en rayon d'articles identiques ou similaires. Cela permet d'acheter chaque article en grande quantité et d'optimiser toutes les opérations relatives à cet article, depuis la réception jusqu'à sa mise en rayon. D'autre part, une organisation qui s'appuie sur une logique de massification et sur une logistique parfaitement rodées : grande rigueur dans la négociation, gestion directe à partir d'entrepôts centraux, chasse systématique à toute dépense superflue... Au niveau des négociations, Aldi met tout en oeuvre pour s'assurer des prix avantageux sur des quantités considérables : engagements sur le long terme avec des producteurs, ce qui permet à ces derniers de produire dans de meilleures conditions et au meilleur coût, commandes par camions complets, économie d'emballages superflue... Côté logistique, le géant germanique s'est développé selon la technique de la "tâche d'huile" : ouverture de quelques magasins, puis création d'un entrepôt, puis multiplication des points de vente pour saturer cet entrepôt, et ainsi de suite un peu plus loin. Cette rationalité s'étend jusqu'au concept de vente, dépourvu, c'est le moins que l'on puisse dire, de tout luxe superflu. Les magasins sont implantés en périphérie pour limiter les coûts fonciers. Toutes les manutentions inutiles sont supprimées. De très nombreux produits tels que le sucre, la farine, le lait, les lessives, etc., sont proposés à la vente sur palettes, dans leur emballage d'origine. Tout cela au service non pas du prix le plus bas, mais du meilleur rapport qualité-prix. "Il y a un cas, et un seul, où nous ne faisons pas de compromis : c'est lorsque la réduction du prix d'achat se traduit par une baisse de qualité", explique l'enseigne. Plus que de simples mots. Du reste, l'enseigne, dont on ne peut pas dire qu'elle multiplie les largesses à l'égard de ses clients, prend tout de même un engagement : si un client n'est pas satisfait d'un produit, il peut le rapporter sans autre justification que d'indiquer que cet article ne le satisfait pas. Il est alors remboursé.

Des clients qui adhèrent au système


On pourrait se dire, au regard de nos luxueux hypers et supermarchés, que ces magasins présentent malgré tout peu d'attraits. Erreur. Le coup de génie des hard discounters, Aldi en tête, est d'avoir transformé le "moins" en "plus". Fini le large choix, l'achat d'impulsion, le service : Aldi modifie le comportement d'achat du consommateur, pour qui cette rupture est positive. Assortiment court et sobriété deviennent synonymes de rapidité d'achat, de clarté, d'efficacité, voire de sécurité. Le client apprécie le fait de ne pas avoir à arbitrer entre plusieurs produits identiques, une seule marque en rayon offrant a priori une garantie de qualité. Et comme celle-ci est effectivement au rendez-vous, il n'y a pas de déception. Les clients acceptant sans sourciller les inconvénients du système. Résultat : ça va fort pour les Aldi et consorts. Depuis la création du hard discount fin des années quatre-vingt, le développement fut spectaculaire. L'abaissement des seuils d'autorisation à 300 m2 n'y a rien changé. Fin 2002, les magasins de hard discount flirtaient avec les 3 000 unités pour 2 millions de mètres carrés de surface vente. Des chiffres à rapprocher des 5 500 magasins et des 6,5 millions de mètres carrés affichés par les supermarchés traditionnels. Plus impressionnant encore, l'élan ne s'essouffle pas. En 2002, le hard discount a fait un bon en avant phénoménal (et inédit, toutes enseignes confondues) de 1,5 point de parts de marché, soit 10,9 % de PDM enseignes (source : étude Référenseigne). A ce rythme-là, il ne lui faudra plus très longtemps pour rattraper Intermarché, troisième distributeur français (12,3 % de PDM). Pour cette même année 2002, plus de 800 000 nouveaux foyers ont été conquis si bien que désormais, 60 % des clients fréquentent les magasins de hard-discount. Certes, l'impressionnante croissance de l'année dernière s'explique en bonne partie par les mètres carrés gagnés et par l'arrivée de l'euro, qui s'est traduite par une hausse des prix.

De moins en moins hard ?


Mais les enseignes n'ont pas vraiment trouvé la parade. Les premiers prix ? Ils ont principalement une vocation défensive. Et, s'ils sont compétitifs au niveau de l'étiquette, leur qualité est en général inférieure à celle des enseignes de hard discount, allemandes. Plus ennuyeux, là où les hard discounters sont restés parfaitement rationnels, les enseignes traditionnelles ont multiplié les messages contradictoires. A se demander si elles n'ont pas plus brouillé leur image qu'autre chose... Brouiller l'image, telle est aujourd'hui la menace qui pèse sur les hard discounters. En effet, au cours des dernières années, les enseignes ont évolué, avec l'apparition d'un "soft discount", qui est plutôt le fait d'enseignes françaises. Au programme : élargissement des gammes, apparition de grandes marques, développement de services (nouveaux moyens de paiement acceptés), développement de la publicité (les budgets ont progressé de 20 % sur un an). Aujourd'hui, la grande majorité des hard discounters s'engouffre dans cette voie. Même une enseigne comme Lidl tend à "s'humaniser", absorbant les trois quarts des investissements média des hard-discounters. C'est là que l'on retrouve la spécificité d'Aldi, enseigne sûre de son fait qui semble poursuivre son chemin sans se laisser distraire par ce qui se passe autour d'elle. La chaîne allemande est la seule à ne déroger en rien aux principes originels du hard discount. Force inébranlable ou forme d'autisme ? Après tout, pendant qu'Aldi poursuivait son développement méthodique, Lidl, arrivé après lui, optait pour un développement boulimique qui lui a permis d'acquérir un parc deux fois supérieur à celui d'Aldi. Et, avec moins de magasins, Leader Price truste les premières places en matière d'image parmi les hard discounters.

HISTORIQUE


Après la guerre, des détaillants, les frères Albrecht, avaient pour ambition de développer un commerce discount en Allemagne, un peu comme Leclerc le faisait en France. Ils sont même venus examiner les pratiques de l'épicier de Landernau... Mais outre-Rhin, ils se sont heurtés à l'hostilité de leurs pairs, et surtout, des fournisseurs qui ont refusé de les livrer. C'est ce refus qui a obligé les frères Albrecht à changer radicalement de voie, à trouver une alternative aux grandes marques et à développer un concept inédit.

CHIFFRES CLÉS


Aldi France Parc de magasins : 525 Surface de vente : 345 000 m2 Surface moyenne : 660 m2 Nombre de références : 600 à 700. Le hard discount en France Un peu plus de 3 000 magasins Plus de 2 millions de m2 Près de 15 000 collaborateurs.

 
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Jean-François Cristofari

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