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Les budgets MD entamés par l'arrivée de la Distribution en TV

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Depuis le 1er janvier, la grande distribution a investi les écrans télé. Cette révolution sectorielle engendre des réarbitrages au sein des budgets publicitaires des enseignes. S'il n'est que partiellement touché, l'univers du hors-médias en fait indirectement les frais.

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Impossible d'y échapper dès le premier jour de la nouvelle année, la grande distribution a fait son entrée dans le PAF. Les spots TV de Champion, d'Auchan et de Système U, en tête, rappellent au bon consommateur les valeurs refuges le guidant vers des achats plus “malins”. “Plus facile la vie”, “La vie Auchan, elle change la vie”, “Les nouveaux commerçants”… autant de slogans à reprendre, en choeur, au rythme des habillages sonores, plus ou moins intrusifs. Pour ces grands consommateurs d'achat d'espace que sont les enseignes de la grande distribution, l'ouverture de cette nouvelle fenêtre de tir est une aubaine pour relayer des campagnes institutionnelles. De fait, ce qui était jusqu'alors une exception française dans le paysage européen va inévitablement entraîner des arbitrages en matière d'investissements publicitaires. Selon les prévisions du BIPE, pas moins de 200 M€ nets seront investis en 2007 dans les écrans TV (soit un bonus de 4,7 % pour ce média). A titre de comparaison, ce volume d'investissement équivaut à celui du secteur de l'automobile. Ce montant représente un peu moins de 20 % des investissements totaux de la distribution, ce qui relativise tout de même le phénomène. Pour autant, toujours selon la société de conseil, les distributeurs n'augmenteront pas leurs dépenses totales. A l'évidence, le montant investi en TV s'opérera au détriment des grands médias mais aussi du sponsoring et du “below the line”. « Ainsi, les 200 M€ seront pris à hauteur de 120 millions aux médias traditionnels (radio, affichage…), à hauteur de 60 millions au hors-médias et à hauteur de 20 millions au sponsoring TV », précise Thierry Fabre, directeur du pôle médias au BIPE (voir infographie ci-contre). Cependant, précise l'expert, cette catégorie d'annonceurs est habituée à travailler rapidement et à monter des campagnes sur des médias plus souples que la TV, ce qui pourrait freiner leur appétit à prendre des parts de voix sur ce média jusqu'alors inexploité. Ces prévisions sont confirmées par MPG (filiale du groupe Havas). « Dans l'océan du hors-médias, environ 80 millions d'euros seront récupérés pour alimenter une visibilité télé », analyse Nadine Medjeber, directrice études.

L'angle d'attaque des distributeurs

Dans ce contexte, les marques candidates doivent fourbir leurs armes assez rapidement et se positionner sur l'échiquier télévisé. Le premier à dégainer est Système U qui a lancé son premier spot dès le 1er janvier peu après minuit. Suivi de près par Auchan qui, avec le même empressement et malgré son faible maillage national (40 % seulement des Français sont susceptibles de fréquenter un magasin Auchan), ne voulait pas manquer le coche. « Il y aura un “avant” et un “après” le 1er janvier 2007 », annonce Jean-François Cherrid, directeur marketing d'Auchan France. « Tout ce que nous avons fait en construction de territoire sera soit conforté, soit remis en cause », poursuit-il. Ainsi, la télévision servira avant tout à renforcer l'image institutionnelle des enseignes, notamment à cause du cadre législatif, assez restrictif. Ainsi, les candidats n'ont pas le droit de communiquer sur des offres ayant une durée de vie de moins de quinze semaines (ce qui exclut tout message à caractère promotionnel). Recrutement pour les uns, notoriété pour les autres. Chacun peaufine son message. « Nous souhaitons avant tout moderniser notre image de marque auprès des non clients », explique Thierry Garnier, Dg de Champion. Pour autant, aucune enseigne ne délaissera les autres médias même si des réajustements sont à l'ordre du jour. « Nous ferons un peu moins de radio et d'affichage mais surtout nous allons réduire le nombre de nos catalogues sur l'année et les dotations dans notre programme de fidélité », justifie Thierry Garnier. « L'idée, explique Pierre Bersagol, directeur de la communication publicitaire d'Auchan, n'est pas d'opposer un média à un autre, mais de les faire interagir (la radio, les catalogues, Internet…). Mais, déjà, depuis un certain temps, les catalogues ont pris le pas sur la PQR. D'ailleurs, nous allons diminuer notre communication au niveau régional. Nous allons ajuster notre politique PNA et non la réduire. Elle reste d'un poids plus important que la publicité TV. » Chez Système U en revanche, de l'aveu même de Serge Papin, son P-dg, aucune coupe franche dans les budgets de communication n'est à l'ordre du jour. « Nous prévoyons une croissance de notre chiffre d'affaires de 6 % ce qui nous offre une marge importante pour investir dans la publicité télévisée mais aussi dans la radio qui est très complémentaire. Cependant, nous avions déjà entrepris de baisser nos volumes d'imprimés sans adresse et nous allons continuer dans cette voie. » L'enseigne prévoit également une baisse de 20 % de ses investissements dans l'affichage et les dotations. Les nouveaux médias entrent également dans la danse et servent les stratégies des enseignes. Pour preuve, Champion a, dès la fin de l'année, diffusé son film publicitaire sur les portables Orange, via un MMS.

Les agences affinent leur campagne

Les agences restent prudentes et misent plus que jamais sur la mixité des médias. Eric Pietrini, président de l'agence Proximity BBDO, indique que dans le cas de la marque Auchan, dont il a signé la nouvelle campagne, « le rééquilibrage va se faire en partie au détriment de l'affichage et de la presse magazine ». Et de préciser : « Pour le reste, à périmètre constant d'investissement, les efforts vont porter sur des réductions de coûts en interne et un arbitrage sur certains catalogues régionaux. Il y aura Actus davantage de communication au plan national et au plan local. Je ne vois pas des enseignes de l'envergure de Carrefour ou d'Auchan stopper leurs campagnes de mailing ou de PNA, qui restent des éléments importants du marketing mix. L'arrivée de la publicité à la télévision est juste un outil complémentaire de promotion des marques. » Même écho chez Euro RSCG & Cie : « A très court terme, je ne vois pas de changement radical. Parmi les médias les plus touchés, il y aura la presse, déjà jugée peu stratégique. La télé reste un mass média alors que le marketing direct est un outil relationnel efficace de ciblage. Dès lors, l'un ne peut pas se faire au détriment de l'autre », note Vincent Mayet, directeur associé de l'agence. Outre ce contexte de repositionnement budgétaire, le MD est confronté à un autre cadre réglementaire, peu favorable. C'est la mise en place de l'écotaxe qui vient grever les budgets consacrés aux ISA. En effet, comme le rappelle Françoise Renaud, directrice du marketing relationnel et des nouvelles technologies de l'UDA, « cet élément perturbateur risque d'avoir plus d'impact, au final, que le transfert de ces investissements entre médias ». Enfin, il faudra compter avec l'avènement du géomarketing qui permet d'optimiser la distribution d'ISA et qui pourrait, à terme, réduire leur volume.

 
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Marie-Juliette Levin et Isabelle Sallard

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