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LE CIBLAGE GENERATIONNEL REMIS AU GOUT DU JOUR

d'Unilever à intel, en passant par orange, doro et l'UCPA, les marques s'adressent à leurs clients en leur proposant une offre «produit» et/ou un discours adaptés à leur génération. des ados - digital natives, zappeurs et publiphobes - aux seniors, »happy boomers« dans la force de l'âge: tour d'horizon des stratégies qui cherchent à capter l'attention des consommateurs.

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Générations ciblées

Après les X, les Y, les matures et autres boomers, voici les «3W». Cette nouvelle génération désigne les individus de moins de 25 ans ayant vécu les trois ruptures du XXe siècle: boom Internet, place des femmes dans la société et respect de l'environnement. Elle doit être «chouchoutée» par les annonceurs. C'est du moins l'avis de Ralph Hababou, directeur associé du cabinet de conseil et formation PBRH, auteur du livre Génération W - Web, Women, Weather. « Il faut être subtile avec cette génération. Non seulement elle consomme à sa façon, mais en outre, elle décode les astuces et les pièges du marketing », explique-t-il.

Les générations se succèdent et les marketeurs les scrutent à la loupe. Apparue dans les années soixante, sous la plume du sociologue Daniel Yankelovich, la notion de marketing générationnel diffère de la simple segmentation par date de naissance. En effet, une génération regroupe des individus qui appartiennent à la même classe d'âge et qui, de plus, partagent les mêmes centres d'intérêts et les mêmes modes de consommations.

A GÉNÉRATION DES 3 W EST A SOIGNER! CAR ELLE DÉCODE LES ASTUCES ET LES PIEGES DU MARKETING.
RALPH HABABOU / PBRH

D'un côté, les étapes de la vie guident les achats. de l'autre, les individus ne s'identifient pas toujours à leur génération.
Pour faire mouche, les marques doivent mixer les données générationnelles et comportementales.

DES OFFRES MIEUX ADAPTÉES A LA CIBLE

Les marques ont d'abord intégré la notion de ciblage générationnel au coeur même de leur offre. Et ce, dans tous les secteurs d'activité. Dans la grande distribution, « certains produits sont conçus pour des cibles précises. Puis, comme les besoins évoluent, d'autres produits sont proposés. Le déodorant Axe, par exemple, vise les garçons dès l'âge de 11 ans. Les jeunes de 20-25 ans ont des besoins différents, la marque y répond en intégrant d'autres fonctionnalités », explique Anne Gabrielle Dangu, média et CRM director d'Unilever France. Dans le high-tech, Intel - qui emploie 75 ethnologues chargés d'étudier les comportements à travers le monde - a développé Ordissimo, une gamme de produits visant à faciliter l'accès des seniors à l'ordinateur. « Il s'agit d'un marché confidentiel, mais nous avons une démarche similaire pour les enfants avec l'offre Classmate, mini PC éducatif dédié aux élèves du primaire », commente Laurent Vernat, directeur marketing de Intel France. En termes de communication directe, les techniques favorisent le ciblage générationnel. « Sur Internet, on risque des déperditions si on diffuse une bannière publicitaire sur tout un site. Mieux vaut exposer le message publicitaire en contextuel, en identifiant, parmi l'audience du site, les internautes correspondant le plus au profil recherché », indique Xavier Lautour, directeur du pôle CRM d ' Havas Digital. Des plateformes logicielles permettent d'accéder aux données de Facebook afin d'optimiser le ciblage des campagnes, les cookies scrutant en permanence le comportement des internautes. « En intégrant le ciblage générationnel dans la stratégie, il est possible de proposer une offre globale et, en parallèle, une offre spécifique par génération », souligne Raphaël Savy, p-dg d'eCircle.

LA DONNÉE GÉNÉRATIONNELLE DOIT ÊTRE AFFINÉE POUR MENER A BIEN UNE CAMPAGNE MARKETING
XAVIER LAUTOUR HAVAS DIGITAL

RISQUES ET LIMITES D'UNE NOTION MACRO

Jusqu'à présent, le marketing générationnel a davantage servi à définir une offre qu'à orchestrer une campagne pour en faire la promotion. « La seule segmentation liée à l'âge n'est pas toujours efficace car elle est trop large », constate Philippe Besnard, directeur général Europe continentale de Specific Media, régie publicitaire on line spécialiste des techniques de ciblage. Pour nombre de marketeurs, la notion de génération ne suffi t pas. « C'est une donnée macro qui permet de comprendre les attitudes et les attentes des consommateurs, mais elle n 'est pas assez précise pour guider une campagne de marketing direct », souligne Xavier Lautour (Havas Digital). En clair: cette connaissance doit être complétée par des données comportementales.

C'est pourquoi Didier Farge, président de Conexance MD lui préfère la notion «d'étapes de la vie», qui permet une segmentation plus fi ne de la cible. « A l'intérieur de chaque génération, les comportements sont hétérogènes. Parmi les seniors, par exemple, certains sont connectés en permanence sur le Web alors que d'autres jamais », explique l'expert. D'où la nécessité de prendre en compte d'autres variables et, notamment, les données comportementales. « Les actes d'achats en disent long sur les étapes de vie », remarque Didier Farge (Conexance MD). Ils permettent de déjouer le piège lié à l'identification d'un individu à une génération qui n'est pas forcément la sienne! Guidés par leur soif de liberté, les jeunes désirent être plus «vieux» alors que les plus âgés cultivent la coquetterie de se croire plus jeunes... Frédéric Serrière, dirigeant de Senior Strategic détaille: « L'AARP (Association for the Advancement of Retired Persons), aux Etats-Unis, fait partie des meilleurs exemples de stratégie générationnelle déployée vers les seniors. L'association a défi ni trois générations chez les seniors: les papy boomers, les 65-75 ans et les plus de 75 ans. Elle leur adresse un magazine à la fois unique et différent. La page de couverture ainsi que 60 % du contenu, sont les mêmes pour tous. Mais 40 % du contenu est spécifique à chaque cible. Le lecteur est libre de s'identifier à la génération qu 'il veut. »

L'UCPA innove avec un ciblage multigénérationnel des moins de 40 ans

Le portefeuille clients B to C de l'UCPA est composé à 70 % d'adultes et à 30 % d'adolescents qui fréquentent les centres de vacances. Face à la régression de ses parts de marché sur le segment adulte, l'UCPA a réagi. En cinq ans, l'association a stoppé l'hémorragie. « Nous avons regagné environ 10 % de fréquentation de nos centres sur cette population et nous avons également renforcé la fidélisation », observe Thina Cadierno, directrice client de l'UCPA.
Alors qu'elle cible les adultes depuis sa création il y a 45 ans, l'UCPA a évolué et distingue aujourd'hui quatre segments générationnels: les adultes (18-39 ans), les juniors (13-17 ans), les teens (11-13 ans) et les kids (6-11 ans). « Les résultats de nos analyses montrent qu'il n'est pas utile de scinder les 18-25 ans d'un côté, et les 26-39 ans de l'autre. Les comportements changent peu après 25 ans chez nous », explique Thina Cadierno.
En revanche, la segmentation entre les kids, les teens et les juniors semble pertinente. C'est pourquoi elle s'affiche dès la page d'accueil du nouveau site internet, mis en ligne le 23 novembre et créé par Business Lab, agence spécialisée en marketing digital. Chaque génération bénéficie d'un onglet permettant d'accéder à une offre dédiée. « Le discours de la marque doit être finement adapté à chacune des cibles. Nous affichons des stages rassurants aux parents de jeunes enfants ; des stages de sport rythmés par les animations et les fêtes aux juniors; des programmes qui ressemblent à ceux des juniors, mais qui, en réalité, sont plus calmes aux teens, etc. », détaille Julien Sivan, directeur associé de Business Lab. La haute couture du ciblage générationnel!

ZOOM
Doro séduit les plus de 65 ans avec des produits sur-mesure

« Libérés des contraintes de la vie professionnelle et familiale, les seniors représentent un énorme potentiel », déclare Benoît Goblot, p-dg de Senior Agency, agence de publicité et de marketing senior. Mais attention, car, à lui seul, le terme senior coiffe deux générations: les papy boomers et leurs parents! Pour Yan Claeyssen, co président d'ETO, agence de marketing relationnel: « Les premiers sont des happy boomers, autrement dit des individus en pleine forme, curieux, hédonistes, avec lesquels il est hors de question d'utiliser les vieilles méthodes marketing du coupon de réduction ou de la loterie. Les seconds sont plus ou moins alertes, plus ou moins dépendants et n'ont pas toujours envie de l'admettre. D'où la nécessité d'adapter le discours. »
UNE COMMUNICATION HABILE
Depuis 1974, Doro fabrique des téléphones à usage résidentiel. Au fil des années, son marché arrive à maturité.
Pour faire face à cet essoufflement, une idée germe: mettre au point un produit dédié aux seniors. Le projet se concrétise avec la fabrication d'un poste téléphonique à grosses touches intégrant une alarme. Les bons résultats des combinés fixes encouragent l'entreprise à dupliquer le principe sur les mobiles. Loin d'être aussi sophistiqués que les smartphones, les téléphones Doro offrent une simplicité maximale, qui facilite la vie des seniors, quelles que soient leurs déficiences (vue, ouïe, dextérité...). « Avec ce téléphone adapté, les personnes âgées sont facilement joignables et plus autonomes et leurs enfants sont moins inquiets », précise Jérôme Arnaud, p-dg de Doro. En termes de marketing et de communication, la stratégie est plus nuancée. « Nous avons appris à parler aux seniors », souligne Jérôme Arnaud. « D'après les études, les personnes de plus de 65 ans se voient 19 ans plus jeunes, alors que les autres tranches d'âges se rajeunissent de cinq à dix ans. Il faut donc s'adresser à eux comme à des personnes qui aspirent à utiliser des appareils simples et non comme à des personnes souffrant de déficiences », ajoute-t-il. Une campagne TV lancée en fin d'année 2010 communique sur la simplicité de l'offre. Le fabricant - qui a défini six segments à l'intérieur de la cible senior - analyse le rapport de cette génération avec les nouvelles technologies. Les données «maison» indiquent que le taux d'équipement des Français en téléphone mobile (toutes générations confondues) s'élève à 80 %. Il tombe à 60 % entre 60 et 70 ans et chute à 40 % après 70 ans. « Le potentiel de vente est donc énorme », observe le président de Doro. Toujours selon les enquêtes «maison», 60 % des seniors interrogés estiment que les nouvelles technologies sont »intimidantes et discriminatoires». Deux bonnes raisons pour Doro de poursuivre son ciblage générationnel et de s'adresser aux plus de 65 ans. Cette stratégie semble faire ses preuves. Fin 2007, les ventes aux seniors totalisaient 12 % du chiffre d'affaires. Aujourd'hui, elles en représentent 82 %.

JEROME ARNAUD / DORO

«Les personnes de plus de 65 ans se voient plus jeunes d'environ 19 ans, selon certaines études. Il faut s'adresser à eux en conséquence. »

Après les combinés fixes, Doro propose une gamme de mobiles adaptés aux seniors, d'une simplicité maximale.

ZOOM
The North Face fait jouer sa cible avec Zipper Act!

Les adultes ou matures sont divisés en deux grandes catégories: les adultes de moins de 34 ans et les 35-49 ans. Les premiers construisent leur vie et consomment. Les seconds gèrent leurs acquis et disposent d'un certain pouvoir d'achat. Ces deux cibles sont évidemment très convoitées par The North Face, la marque de vêtements de sport haut de gamme. Lorsqu'elle décide de faire appel à une agence de communication, l'entreprise vise deux objectifs: rajeunir sa cible et créer du trafic en magasin. « Les 30-45 ans constituent aujourd'hui notre coeur de cible. Mais, pour préparer l'avenir de notre business, nous souhaitons élargir notre audience auprès des 25-30 ans. Nous devons leur faire entendre le discours de la marque, les inciter à pratiquer un sport de plein air, à découvrir la nature, etc. », explique Eric Pansier, directeur marketing de The North Face.
DES CAMPAGNES «LOCALISÉES»
En réponse au brief de la marque, Brandcasterz, agence de communication spécialisée en marketing de contenu, a créé un label communautaire baptisé Zipper Act! « Ce label nous permet de raconter de nouvelles histoires et de sortir du carcan «vêtements pour des athlètes férus de montagne« dans lequel la marque est positionnée », indique Olivier Missir, CEO de Brandcasterz. En France, l'agence a orchestré une campagne d'affichage publicitaire. A Paris, des bâches ont été déployées dans les grands magasins. En province, des affiches ont fleuri dans les stations de métro. Puis, en Grande-Bretagne, en Ecosse, en Suède et en Italie, l'agence a organisé un grand jeu-concours appelé Zipper Act. Pour toucher ces jeunes citadins moins enclins à l'exploit sportif et les inciter à aller dans les magasins de Glasgow, Birmingham, Stockholm et Milan, le jeu se déroule sur Facebook, réseau de communication privilégié de la cible. Pour cet événement, Brandcasterz n'a pas souhaité, comme le veut l'usage, créer une plateforme dédiée. Elle a préféré parier sur l'attractivité du réseau social. L'information est relayée sur Twitter. Le reste de l'opération se déroule en magasin. Les prospects sont invités à se faire prendre en photo ou à tourner une séquence vidéo sur le thème de la fermeture Eclair. Un système de vote permet de départager les concurrents. Menée du 18 octobre au 18 décembre, l'opération a rencontré un véritable succès. Pour preuve: un mois seulement après son lancement, le jeu avait déjà attiré plus de 3 000 personnes. « Pendant le dernier week-end du mois de novembre, le trafic a littéralement explosé dans les magasins et les ventes ont significativement augmenté », se félicite Eric Pansier. Le directeur marketing de The North Face a également apprécié la nouvelle ambiance créée dans les points de vente grâce au jeu. Alors que l'objectif de l'opération, qui a coûté entre 2 et 3 % du budget marketing annuel de la marque, semble atteint, annonceur et agence planchent déjà sur le déploiement de Zipper Act dans d'autres villes.

OLIVIER MISSIR /BRANDCASTERZ

«Ludique, le nouveau label de The North Face permet de renouveler l'image de la marque. »

L'idée de l'agence Brandcasterz: inviter les prospects à se faire prendre en photo ou à tourner une séquence vidéo sur le thème de la fermeture Eclair. En un mois, ce sont 3 000 personnes qui ont participé au jeu-concours.

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Orange vise les «digital tribes« (15-24 ans)

« Volatile, cette population est prescriptrice et représente une source de revenus futurs », observe Raphaël Savy, p-dg d'eCircle, prestataire en marketing direct on line. « Craignant les dérapages et les rumeurs, la génération Z se montre méfiante », constate Julien Sivan, directeur associé de Business Lab, agence de communication spécialisée en marketing digital. Orange a bien compris ces enjeux. Pour s'assurer que les jeunes gens lui resteront fidèles même en grandissant, l'opérateur vise les 15 à 24 ans.
UNE WEB SÉRIE COMME APPAT
« En 2008, nous avons décidé de bâtir une stratégie autour de la glisse », explique Jean-Eric Naon, sponsoring manager d'Orange France. Cet univers est, en effet, intrinsèquement communautaire, en affinité avec le sport, mais aussi avec la musique et la mode. D'après les analyses d'Orange, 60 % des «digital tribes« font partie d'un réseau social, 60 % pratiquent un sport et 80 % surfent sur le Web chaque jour. Ces jeunes utilisent principalement Internet pour se divertir et pour rester en contact avec leurs amis. « Sachant que les jeunes sont très consommateurs de contenus en ligne, nous avons voulu investir le Web grâce à notre team de riders pour aller les chercher là où ils se trouvent », ajoute Jean-Eric Naon. Orange décide donc de créer une Web série. L'agence de communication alternative, spécialiste de la cible «jeune«, Inside Media, décroche le marché. « Pour s'adresser aux jeunes, il faut tenir compte de deux postulats. Primo, ils zappent et consomment du contenu sur différents écrans simultanément: ordinateur, téléphone mobile, télévision. Deuxio: ils sont publiphobes », souligne son président Eric Florand. Fort de ce constat, et en réponse au brief d'Orange, Inside Media propose de créer une marque spécifique, Master Class, pour produire une Web série dédiée aux sports de glisse. Cette série de dix épisodes suit les aventures d'Eric et de Valentine, deux jeunes Parisiens d'une vingtaine d'années, dans leur découverte des sports extrêmes. Surf, skate-board, kitesurf, snowboard, etc., Eric et Valentine vont tout tester, avec les conseils des meilleurs riders du monde. L'objectif d'Orange - franchir le cap des 150 000 vidéos vues à l'issue des dix épisodes - est atteint dès la diffusion du troisième épisode! « Pour générer de l'audience, il ne suffit pas de diffuser une vidéo sur YouTube. Il faut proposer un contenu de qualité correspondant aux attentes de la cible », précise Eric Florand. Supplantée pour l'occasion par Master Class, même si elle en reprend les codes et couleur, la marque Orange n'apparaît que dans le générique. L'audience est boostée par le plan média: la série est diffusée sur le site d'Orange, sur Dailymotion, mais aussi sur des sites de sport. En complément, l'opérateur a créé une page Facebook «Ride Sessions« et projette, après ce premier succès, de créer une plateforme dédiée.

Véronique Méot

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