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L'écotaxe s'élargit aux catalogues et mailings

Dès juillet prochain, le gisement des imprimés soumis à l'écotaxe augmentera de 60% en raison d'un amendement présenté au Sénat et inséré à la loi de finances 2008. Les fédérations professionnelles dénoncent un manque de concertation et un impact financier qui pourrait atteindre plusieurs dizaines de millions d'euros.

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Le gouvernement français a profité de la trêve des confiseurs pour publier au Journal officiel, en date du 27 décembre 2007, la loi 2007-1822 de finance 2008. Dans celle-ci figure l'article 84, présenté sous forme d'amendement par Philippe Marini, sénateur-maire de Compiègne. Il prévoit l'élargissement du périmètre des imprimés soumis à l'éco-contribution volontaire, qui oblige tout émetteur d'imprimés à assumer financièrement la fin de vie des papiers usagés. Seront donc assujettis, à partir du 1er juillet prochain, les catalogues de vente par correspondance, les imprimés publicitaires adressés, la presse d'entreprise, les magazines de marque et certains encarts publicitaires publiés dans la presse. Dans un deuxième temps, au 1er janvier 2010, les papiers bureautiques achetés en ramettes s'y ajouteront.

Tout débute le 27 octobre dernier quand Philippe Marini, également rapporteur général de la commission des Finances du Sénat, plaide dans un rapport pour «un élargissement progressif des assiettes et une augmentation pas à pas des taux des nouvelles écotaxes».

Le 22 novembre dernier, dans un rapport général sur la loi de finances 2008, il prend position pour l'élargissement de l'assiette et détaille le futur amendement additionnel. Deux arguments sont mis en avant: d'abord le dispositif ne couvre en 2007 que 25% du gisement des imprimés traités par les collectivités; ensuite la définition des imprimés assujettis est complexe, peu intelligible et encourage à l'évasion de certains opérateurs économiques. Directement concerné, EcoFolio, l'éco-organisme de la filière papier, confie avoir participé à la nouvelle définition des papiers assujettis.

Sans concertation

Cette publication au Journal officiel est la conclusion d'une période d'un mois au cours de laquelle cet amendement a successivement été présenté, voté et promulgué. Un empressement qui ne serait pas dû à la présence de ce texte précis, mais à la volonté de valider l'ensemble de la loi. La méthode a, depuis, été condamnée: la Fédération de la vente à distance (Fevad), la Fédération de l'imprimerie et de la communication graphique (FICG) et l'Union des annonceurs (UDA) dénoncent le contenu du texte et le manque de concertation préalable à sa présentation. Une situation surprenante, car ces trois associations ont été sollicitées lors de la création d'EcoFolio et la mise en place de la contribution volontaire. Si ces fédérations n'ont pas encore réalisé d'études économiques sur leurs secteurs respectifs, la Fevad estime qu'il faut s'attendre à un impact de quelques dizaines de millions d'euros. Pascal Bovero, délégué général de la FICG, estime que «ces nouvelles réglementations conduiront à une accélération de la bascule vers les médias interactifs, une baisse significative des volumes et une dégradation de l'image du papier». L'avis est donc unanime: ce texte entraînera sans nul doute de très lourdes conséquences pour les acteurs de la VAD et les annonceurs.

@ Ademe (2006)

61% du gisement assujettis en 2010

Modifiant l'article L.541-10-1 du code de l'environnement, l'article 84 révise essentiellement l'assiette des imprimés assujettis à l'écocontribution. Jusqu'au 30 juin prochain, 25% des 4,5 millions de tonnes de papiers collectés sont concernés. Au premier juillet, 40% du gisement global (soit 1,81 million de tonnes) sera soumis à l'ecotaxe. En 2010, cette part atteindra les 61% (2,76 millions de tonnes). Seront toujours exonérés dans deux ans les livres, les imprimés réalisés dans le cadre d'une mission de service public (journaux municipaux, par exemple) et la presse (presse gratuite d'information, presse payante sur papier journal et presse magazine).

Pour Géraldine Poivert, directrice générale d'EcoFolio, cette décision est une «bonne nouvelle pour l'environnement et participe à une économie plus vertueuse». Cependant, à 35 Euros HT la tonne d'imprimés, la question financière est évidente. En année pleine, le potentiel de contribution avant le premier élargissement atteint 39,7 MEuros, puis 63,4 MEuros avec les nouveaux assujettis, et enfin 96,7 MEuros grâce aux futurs assujettis de 2010. La contribution en nature, autre nouveauté, qui offre des espaces de communication pour la promotion de la collecte, de la valorisation et de l'élimination des déchets, ne devrait avoir que peu d'incidence sur ces chiffres. Les premiers bénéficiaires seront bien évidemment les collectivités locales, ce qui explique pourquoi l'Association des maires de France (AMF) a également été consultée lors de l'écriture de cet amendement. Atteignant d'ores et déjà 30 MEuros en année pleine, le soutien financier apporté par EcoFolio aux collectivités augmentera de 23 MEuros grâce au premier élargissement et de 22 MEuros avec le second. Un montant qui s'ajoute à la valorisation des déchets papier (comme la vente des imprimés usagés aux papetiers). Jacques Pélissard, président de l'AMF et député à l'origine de l'amendement à la loi de finances rectificative de 2003 qui a introduit la taxe sur les «imprimés non sollicités», estime qu'«à terme, il faudrait assujettir toute la chaîne graphique pour garantir une stagnation du montant de la contribution». Montant toutefois fixé par EcoFolio.

Une année fructueuse

Si I'éco-organisme n'existe que depuis un an, son premier bilan est très positif, même s'il ne concerne qu'un exercice partiel de trois mois. Cinq mille émetteurs, représentant 95% du gisement assujetti en 2006, ont adhéré à l'organisme. Celui-ci récoltera près de 9 MEuros cette année, dont 8 MEuros seront reversés aux collectivités locales. 74% de ce montant proviendront du commerce et de la distribution, 20% de la presse gratuite d'annonce et 6% des services et de l'industrie. Une ventilation assez proche de la répartition du conseil d'administration d'EcoFoliooù siègent dix représentants des contributeurs. Celui de BNP Pari bas, Jean Favarel, confirme que «l'évolution de ce conseil fait partie des réflexions actuelles». Maintenant que la loi est promulguée, tous les professionnels attendent les décrets qui encadreront son application. Et les fédérations auront à coeur de renouer le dialogue avec le législateur.

Réactions

@ Marc Bertrand

Marc Lolivier, délégué général de la Fevad

«Nous avons été très surpris de voir cette mesure présentée en bout de course devant le Sénat et être adoptée en première lecture alors que le gouvernement avait émis un avis défavorable. Nous pensions qu'une concertation entre le législateur et les représentants des futurs contributeurs aurait lieu. Nous avons tenté de nouer le dialogue dès le mois de novembre pour alerter le gouvernement et sommes intervenus pour appeler à voter contre car les répercussions économiques seront graves. Nos premières estimations, sur l'impact de cet amendement, atteignent plusieurs dizaines de millions d'euros. Nous sommes consternés par la méthode et réfléchissons à développer notre propre éco-organisme.»

Françoise Renaud, directrice recherche marketing et nouvelles technologies de l'UDA

«Sur la forme, la méthode est inadmissible. Lors de la création d'EcoFolio, nous avons été contactés pour participer à son développement. Maintenant, le législateur n'a plus besoin de nous consulter alors que l'impact sera lourd pour les entreprises. Sur le fond, le texte est imprécis et soumis à interprétation. Nous serons donc amenés à contacter le législateur. Nous estimons, par ailleurs, qu'il est encore trop tôt pour élargir le périmètre du gisement soumis à l'ecotaxe car EcoFolio n'a pas encore tiré de bilan en année pleine. De plus, l'éco-organisme sera certainement déstabilisé, car les nouveaux assujettis auront à coeur d'y tenir un rôle plus important qu'aujourd'hui.»

Samir Azzemou

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