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Comment rendre son magasin ''responsable'' ?

Publié par Thomas Loisel le - mis à jour à

L'essor d'initiatives écologiques et la prise de conscience, chez les consommateurs, des enjeux climatiques poussent les marques à s'engager dans une démarche sociale et environnementale forte.

Sensibiliser, éduquer et impliquer les magasins dans une démarche environnementale relève d'un long processus. Dans un monde hyperconnecté, les consommateurs sont de plus en plus exigeants et susceptibles de fuir les entreprises qui ont mauvaise ­réputation. Selon l'institut YouGov, 64 % des Français estiment que les entreprises ne soutiennent pas assez les efforts individuels en matière de protection de l'environnement. Si bien que les marques se sont depuis peu emparées du sujet.

En 2018, les Galeries Lafayette ont créé Go for Good, pour un commerce plus ­responsable, éthique et solidaire, et Carrefour héberge, depuis mai ­dernier, un site d'e-commerce "zéro déchet" baptisé Loop. En arrière-plan, la loi invite les entreprises à prendre leur part de responsabilité dans la lutte contre le réchauffement climatique et les grands enjeux sociaux de ce siècle. Le projet de loi antigaspillage pour une économie circulaire a été ­présenté en conseil des ministres le 10 juillet dernier. Les mesures qu'il regroupe ont pour but d'endiguer le gaspillage afin de préserver nos ­ressources, mobiliser les industriels pour transformer les modes de production, informer les consommateurs pour les amener à consommer mieux et, enfin, améliorer la collecte des déchets pour lutter contre les dépôts sauvages.

"Le sujet brûlant, c'est d'aider les consommateurs à choisir des produits plus responsables", témoigne Régis Koenig, directeur de la politique services et de l'expérience client du groupe Fnac Darty. Précisément, l'enseigne spécialisée dans l'électroménager, qui traite chaque année 2,5 millions de demandes de SAV, fait de la ­"durabilité " l'un des fils rouges de sa stratégie. Pour la deuxième année, Fnac Darty a publié le Baromètre du SAV afin d'informer le grand public sur la durée de vie des équipements électroménagers. "Face au constat de la canicule et du dérèglement ­climatique, nous avons pris la décision de montrer la voie", souligne Régis Koenig. Par ailleurs, le groupe a renforcé son engagement en faveur de la durabilité des produits avec la création du label "Le choix durable par Darty" et l'extension de l'indice de réparabilité aux smartphones.


Des magasins en mission ... écologique

Alors que le commerce équitable "Made in France" est en hausse de 34 %, selon une étude de l'Insee, les magasins Altermundi s'engagent en faveur des produits durables ou fabriqués localement. Depuis sa création, en 2003, l'enseigne ­s'efforce de référencer des produits respectueux de l'homme et de l'environnement, issus du commerce équitable, bio ou fabriqués en France. Elle propose aussi des produits "zéro déchet" afin de réduire l'utilisation du plastique à usage unique (bouteilles d'eau, pailles en plastique ... ). "Les consommateurs sont de plus en plus nombreux à se soucier de la provenance des produits et de leurs conditions de fabrication", observe Thibaut Ringô, directeur général d'Altermundi. Ces boutiques proposent des ­produits de décoration, de mobilier et de mode, tous issus du commerce responsable et portant des valeurs d'éco-conception, d'insertion et de consommation raisonnée. ­"L'éco-conception est pour nous une question de cohérence globale. Il nous paraît logique de distribuer des produits éthiques dans un endroit qui soit respectueux de la planète", poursuit le directeur général.

L'enseigne profite du Black Friday, symbole consumériste, pour faire entendre sa voix. Avec d'autres marques, elle a créé, en 2017, le Green Friday, qui réunit plus de 200 acteurs s'engageant à ne pas faire de réductions cette journée-là, mais à reverser 10 % de leur chiffre ­d'affaires du jour à Zero Waste ou encore à Hop, une association qui lutte contre l'obsolescence programmée. En plus de faire la part belle à l'insertion en formant et en réintégrant des personnes en difficulté, Altermundi creuse son sillon par le sourcing. "Nous pensons qu'il est essentiel de redynamiser le commerce de proximité, car les centres-villes sont délaissés, ce qui nuit à la consommation locale", observe Thibaut Ringô. Face à l'appétit grandissant des consommateurs pour cette nouvelle manière d'acheter, le vent est clairement porteur pour l'enseigne, qui a ajouté, cette année, deux nouvelles adresses à son réseau - rue de Lévis et rue du Commerce à Paris - et dont le chiffre d'affaires progresse chaque année de 30 % depuis trois ans.

De son côté, la Camif milite, depuis quelque temps, pour une consommation plus responsable. En 2019, l'enseigne s'est recentrée sur le canal digital, fermant sa vingtaine de magasins physiques. "L'heure est au moins et au mieux, à savoir une communication plus responsable, plus locale, en centre-ville, le tout inséré dans une économie circulaire", assure Emery Jacquillat, p-dg de la Camif. Pour chaque produit, une fiche décrit ses conditions de production : le client sait où il a été fabriqué, par qui, les matières utilisées et les certifications obtenues. L'engagement est concret : informer les citoyens, proposer des solutions de réparation et intégrer davantage de composants de recyclage. "Nous nous sommes recentrés sur l'équipement durable de la maison", plaide Emery Jacquillat. L'enseigne, qui réalise 73 % de son chiffre d'affaires avec 137 fabricants hexagonaux, a fait le choix du "Made in France". Elle ­s'efforce aussi de favoriser les articles issus du recyclage (meubles), éco-conçus (jouets, articles de jardin ... ), réparables (en partenariat avec le réseau d'insertion Envie), ainsi que les textiles porteurs du label Gots, grâce à des procédés respectueux de l'environnement et socialement responsables. Un bel exemple d'engagement, distingué par une étude Ifop de 2018, qui place la Camif en tête des enseignes françaises les plus engagées dans la consommation responsable et le développement durable en ce qui concerne l'ameublement et l'équipement de la maison.


Et la grande distribution dans tout cela ? Longtemps perçue comme le "ma uvais élève " de la consommation responsable, elle a fini par évoluer sous la pression de consommateurs de plus en plus attentifs à ces critères . Si certaines enseignes continuent à brandir l'argument des prix bas, d'autres se renouvellent par un discours plus responsable, où dominent la proximité avec les clients et les circuits courts.

Lidl montre l'exemple à la grande distribution

Depuis 2014, Lidl a ainsi opéré un virage à 360° en privilégiant le recyclage et la diminution de la consommation d'électricité. Le premier pion a été de transformer ses 1 500 magasins tricolores, préambule de son concept Lidl of Future (LOF) qui doit se conclure en 2021. Dans la continuité de sa montée en gamme et de son repositionnement comme supermarché de proximité, Lidl France a repensé le modèle de ses magasins pour améliorer le confort de ses clients et de ses collaborateurs. Plus d'espace, plus de caisses pour simplifier le parcours d'achat, une façade vitrée pour gagner en luminosité, et des couleurs sobres et des matériaux nobles pour une ambiance conviviale. Éco-conçu, le bâtiment tend vers une empreinte écologique nulle. Lidl a aussi adopté des emballages 100 % recyclables et mis en place un système de valorisation des déchets (tri sélectif, compression du papier et du carton, recyclage du plastique ... ).


Lancé officiellement en 2014 à Montauban, ce projet pharaonique de 5 milliards d'euros apporte une plus-value ­indéniable : "Nous sommes passés d'une surface moyenne de 800 m2 à 1 200 m2 par magasin avec le même nombre de produits. Cela nous a permis de multiplier par 1,7 le chiffre d'affaires de chaque magasin", affirme Michel Biero, directeur exécutif achats et marketing de Lidl France. Au rayon produits, dont 72 % sont issus du "Made in France", Lidl a mis ­l'accélérateur sur la réduction du gaspillage : "Dans notre objectif zéro déchet, nous avons décidé de proposer des cagettes à 1 € contenant des fruits et légumes ou produits abîmés ou défraîchis", relève Isabelle Hoffmann, chef de projets RSE chez Lidl France. La moitié du montant récolté est reversée aux Restos du Coeur, si bien qu'en 2018, le chèque s'élevait à 1,7 million d'euros. De surcroît, Lidl France est l'une des toutes premières enseignes en France à être certifiées Iso 50 001 sur l'ensemble de son réseau. Cette démarche volontaire atteste de la mise en oeuvre d'un système global de gestion de la performance énergétique dans toute l'entreprise et va même plus loin que la législation en vigueur. Enfin, Lidl est le premier distributeur à se positionner sur du 100 % de matériaux recyclés et/ou certifiés FSC sur les emballages et les composants à base de bois. Beau virage pour une enseigne qui a, elle aussi, su conquérir le coeur des Français.

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