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Nouveautés Apple (2/2) : le futur manager de nos vies personnelles ?

Publié par Philippe Crouzillacq le | Mis à jour le

"Notre ambition est de remplacer le portefeuille" a déclaré, mardi 9 septembre, le p-dg d'Apple Tim Cook. L'expert Guillaume Rio, responsable des tendances technologiques de l'Echangeur by LaSer, nous explique que les visées du groupe américain vont, en réalité, bien au-delà...

e-Marketing.fr : Apple vient de dévoiler sa solution de paiement Apple Pay. En quoi est-elle différente de ce qui existe déjà sur le marché ?

Guillaume Rio : Chez Apple, le principe c'est "de faire mieux que les autres, mais après". L'intelligence d'Apple a donc été d'attendre qu'il y ait une certaine maturité autour du NFC (aujourd'hui embarqué sur 30% de smartphones fonctionnant sous Android) pour frapper un grand coup en associant dans le cadre d'une transaction physique, la technologie de paiement sans contact NFC à la biométrie, avec la fonctionnalité Touch ID, ce qui est de nature à rassurer le consommateur. Mais Apple ne s'est pas arrêté là puisque des accords de partenariat ont été passés avec Sephora, Groupon, Staples, Target, Disney, autant de noms qui représentent, aux États-Unis, un total de 220 000 points de vente. Ce sont des enseignes du quotidien. Il s'agit là d'une sectorisation très intelligente qui vise à imposer très rapidement une solution comme Apple Pay.

e-Marketing.fr : Comme le disait Tim Cook, le p-dg d'Apple, "finies les cartes !", qu'elles soient bancaires ou de fidélité. Comment tout cela fonctionne-t-il ?

Guillaume Rio : Avec Apple Pay, toutes les cartes (de paiement ou de fidélité) peuvent être dématérialisées. Pour l'utilisateur qui ne souhaiterait pas rentrer son code, il y a un système, l'OCR (Optical Character Recognition) qui permet de scanner une carte et de la dématérialiser automatiquement dans Apple Pay. Les cartes sont stockées dans le compte iTunes de l'utilisateur. Il vaut donc mieux qu'il ne soit pas "hacké". On assiste de facto à la création d'un portefeuille virtuel. Apple a déjà passé des accords avec American Express, Mastercard, Visa, mais aussi, et c'est peut-être le plus impressionnant, avec 83% des émetteurs de cartes aux États-Unis, à commencer par Bank Of America, US Bank, ou Wells-Fargo.

e-Marketing.fr : Que fait la concurrence ?

Guillaume Rio : Amazon, Google... Tout le monde essaye avec plus ou moins de succès de rentrer sur ce marché du portefeuille virtuel. Aux États-Unis, Walmart a développé sa propre solution, CurrentC, et a eu l'intelligence de l'ouvrir à d'autres enseignes. La solution rassemble aujourd'hui une cinquantaine de retailers. Walmart veut également désintermédier American Express et Visa, ne plus avoir à payer de commission et donc pouvoir pratiquer des prix plus bas que la concurrence. Le match des "digital wallets" est lancé et il y a fort à parier que les consommateurs vont se retrouver avec plusieurs porte-monnaie électroniques à gérer. Car un groupe comme Walmart n'a qu'une hantise : que ce soit Apple ou Google qui parviennent à "driver" le trafic des consommateurs vers tel ou tel magasin.

e-Marketing.fr : Plus qu'au portefeuille virtuel, on a le sentiment qu'Apple s'intéresse à la gestion de notre vie tout entière, qu'en est-il exactement ?

Guillaume Rio : Si l'on prend le cas d'Apple Pay, Apple, qui possède déjà le terminal (iPhone 6, et Apple Watch) et le hub, nous promet aujourd'hui qu'ils ne conserveront pas les infos des achats effectués sur mobile ou via la géolocalisation. Je pense que c'est une fausse promesse et que dans deux ans, leur objectif, c'est de devenir agrégateur de données et, selon notre parcours d'achat, de nous envoyer en push des offres contextualisées selon l'endroit où nous nous trouvons. Les enseignes y trouveront un intérêt et le consommateur également. À l'Echangeur, nous appelons cela le "retail ambiant". Un univers où le programme de fidélisation d'une marque est remplacé par une régie publicitaire en temps réel, en l'espèce Apple.

e-Marketing.fr : D'un côté, un "Health Kit" embarqué sur l'Apple Watch, de l'autre, un "Home Kit" présenté au printemps dernier... Aujourd'hui, Apple égrène des annonces qui, quand on les considère dans leur ensemble, pourraient avoir un impact fort à moyen terme sur notre vie quotidienne...

Guillaume Rio: Nos données bancaires, nos données "maison", nos données "voiture", nos données "santé", Apple a aujourd'hui les moyens et très certainement la volonté de centraliser toutes ces données du quotidien. En espérant devenir demain notre "personal life assistant". On peut très bien imaginer qu'Apple nous propose "des forfaits de vie" (assurance, compte bancaire etc.). Les objets connectés vont bien évidemment jouer un rôle très important, et c'est un marché sur lequel Apple est déjà extrêmement bien positionné.

Prenez l'exemple du Health Kit embarqué sur l'Apple Watch, il peut prendre notre cardio et notre pression sanguine. Et à l'autre bout de la chaîne, Apple a déjà passé des accords aux États-Unis avec des organismes comme United Health ou Mayo Clinic, une fédération hospitalo-universitaire et de recherche. Ou bien encore, un accord avec IBM pour Watson (un Siri plus avancé) qui, en croisant des données avec plein de cas similaires, peut vous apporter des suggestions de traitement. Vous vous souvenez de la publicité Apple en 1984 contre IBM? Apple a déjà peut-être inversé les rôles, et c'est peut-être maintenant lui le Big Brother sur l'écran. C'est à la fois passionnant et effrayant.

Guillaume Rio est Technology Trends Manager chez l'Echangeur by LaSer, centre d'innovation technologique et marketing dédiée à la relation client.

A lire ou à relire ici, la première partie de notre analyse marketing sur les nouveautés d'Apple présentées le 9 septembre 2014 : Le NFC intégré va-t-il révolutionner le paiement mobile?

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