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[Chronique] Un marketeur doit-il avoir des devoirs ?

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[Chronique] Un marketeur doit-il avoir des devoirs ?
© Christophe Averty

Chaque mois, Hervé Kabla livre sa vison du marketing et de ses évolutions. Pour sa dernière chronique de l'année, il partage une approche très personnelle du marketer et souligne l'importance de la volonté.

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C'est peut-être par là que j'aurais dû commencer cette chronique, il y a bientôt un an. Un marketeur doit-il ceci, un marketeur doit-il cela, ça commence à bien faire : qui dit qu'un marketeur a des devoirs ? Et s'il en a, qui suis-je pour les lui rappeler ? Et si un marketeur n'assume pas ses devoirs, qui le fera pour lui ?

Genèse

Pour bien comprendre le sens de cette chronique, il faut remonter au tout début, à ce déjeuner avec Thierry Derouet [ancien rédacteur en chef d'emarketing/Marketing, NDLR] lors duquel nous décidâmes d'instaurer une chronique mensuelle, sur les devoirs d'un marketeur. Le monde change, la déferlante numérique bouleverse tout sur son passage, le marketing ne peut sortir indemne de tels chamboulements, voici le constat que nous fîmes entre le plat et le dessert. S'il y avait un sujet qui pourrait vous intéresser, vous lecteurs et lectrices de cette chronique, c'était bien justement quelle attitude devraient adopter les marketeurs face à ces évolutions majeures de leur métier. Vous avez bien lu, " devraient " : nous étions, Thierry et moi, dès le début partis sur cette notion de devoir.

Exode

De retour à mon bureau, ce jour-là, je m'interrogeai sur la meilleure façon de construire une telle chronique. L'exercice n'est pas simple, et tous ceux qui ont un jour fait face à une approche éditoriale se sont retrouvés confrontés aux mêmes questions : par où commencer, quel ton adopter, quels sujets aborder ? Les réponses, je les ai trouvées rapidement, par l'une des techniques les plus simples à notre disposition dans ces situations-là : se confronter au terrain.

Depuis un an, j'ai rencontré des dizaines de marketeurs, posé des centaines de question, lu au moins autant d'articles, en ligne ou dans la presse écrite, pour identifier ces sujets qui, s'ils peuvent paraître anodins, illustrent parfaitement le changement de paradigme du marketing : le rapport au temps, au consommateur, au pouvoir ou à la technologie. S'agissait-il encore de devoirs ? La question restait ouverte.

Nombres

Les marketeurs adorent les nombres, c'est une de leur caractéristique, et c'est aussi l'une des différences majeures que j'ai pu identifier entre les marketeurs et les communicants. Le marketing digital offrant la possibilité de tout mesurer ou presque, il était tentant de partir dans cette voie, et de baser ces chroniques sur une approche chiffrée, à base d'études et de données quantifiées.

Vous auriez eu droit à des propos du genre 95% des marketeurs qui font ceci font aussi cela, ou 57% des consommateurs qui boivent ceci mangent aussi cela. 79% des jeunes de moins de 18 ans passent tant d'heures sur telle plateforme. En seriez-vous ressortis plus instruits ? J'en doute. De telles données n'ont qu'une utilité limitée dans le temps : les usages évoluent, et ce qui est vrai un jour dans tel pays ne l'est pas forcément deux mois plus tard à l'autre bout de la planète. Et très sincèrement, je doute que des données statistiques suffisent à vous faire prendre conscience de vos devoirs.

Deutéronome

À l'aube d'une nouvelle saison de chroniques, je me suis demandé s'il ne fallait pas revenir, justement, sur les grandes questions que j'ai pu aborder, de manière parfois ironique ou détournée. Les problèmes d'hier restent d'actualité aujourd'hui encore, et l'authenticité ou la curiosité conservent, pour moi, un intérêt majeur pour aborder de manière correcte les évolutions du marketing.

Pourtant je n'en ferai rien, et tâcherai cette année d'aborder cette chronique avec une nouvelle interrogation : un marketeur doit-il, ou un marketeur veut-il ? La volonté suffit-elle à remplir correctement son rôle de marketeur ? Ou bien ne doit-on pas, dans une approche stoïcienne, à la Marc-Aurèle, commencer par apprendre à distinguer ce qui est de notre ressort, et ce que nous ne pouvons changer ?

Il existe trois sortes de volontés, m'a récemment appris Charles Pépin(1). La volonté des stoïciens est une volonté sage. Celle qui relève d'une approche kantienne agit en fonction de valeurs morales : je veux parce que je considère que c'est bien. Dans notre cas précis, c'est à la troisième sorte de volonté que je fais appel, la volonté folle, paradoxalement cartésienne, celle qui nous fait nous lever un jour, et décider de modifier le cours de notre existence.

Plus que sur des devoirs, la vie d'un marketeur est avant tout, et je le crois sincèrement, construite sur la volonté. Mon rôle, en tant que chroniqueur, n'est que de vous insuffler cette volonté, dussé-je en appeler à vos devoirs.

À l'année prochaine.

(1) [Charles Pépin : philosophe, écrivain, enseignant et journaliste français, né en 1973, auteurs de plusieurs ouvrages et nombreux articles. NDLR]

L'auteur: Hervé Kabla dirige Be Angels, agence digitale spécialiste des médias sociaux, et a cofondé une association qui rassemble les professionnels des médias sociaux et du digital en entreprise. Il accompagne des entreprises B2B et B2C dans l'élaboration et la mise en oeuvre de leur stratégie marketing sur les médias sociaux. Il est également coauteur de "La communication digitale expliquée à mon boss", paru aux Éditions Kawa.

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