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DossierMarques de luxe : le privilège d'être client

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1 - Marques de luxe : dialogue avec les fans et fidélisation client

Les marques de luxe utilisent désormais les canaux digitaux pour conserver leurs fans. Pour fidéliser leurs clients, elles misent sur l'excellence de leurs produits et un service irréprochable.

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Vincent Bastien (HEC Paris)

Faire parler de la marque et entretenir le désir, miser sur la qualité des produits et du service, animer des clubs et organiser des événements VIP... Si les leviers traditionnels de fidélisation ont fait leurs preuves, les maisons de luxe ont adopté les canaux de contacts digitaux pour s'adresser à une clientèle internationale et entretenir la ferveur de leurs fans. " Dans le luxe, tout repose sur la façon de faire ", résume Vincent Bastien, professeur affilié à HEC Paris et ancien directeur général de Louis Vuitton(1).

Christophe Benavent (professeur à l'Université Paris-Ouest)

" Le premier outil de fidélisation demeure la marque ", assure, de son côté, Christophe Benavent, professeur à l'Université Paris-Ouest. Les consommateurs sont clients d'une marque, pas d'un produit. Et les gens adorent les marques de luxe. Sur Facebook, Louis Vuitton compte 13 millions de fans dans le monde ; Dior, 11 millions ; Chanel, 9 millions... Pour maintenir leur légitimité, elles doivent continuer à incarner le rêve, le désir et l'inaccessible, à l'image des films "L'Odyssée" de Cartier et "L'invitation au voyage" de Louis Vuitton. " Une marque qui ne fait pas parler d'elle ne fait plus rêver personne et perd de la valeur, estime Vincent Bastien (HEC). La publicité maintient indirectement la fidélité. " Mais pour conserver leur statut, les entreprises doivent parvenir à rassembler beaucoup d'admirateurs et à avoir peu de clients, à conjuguer forte notoriété et faible pénétration : " Tout le monde doit voir le ROI, très peu doivent pouvoir le toucher ", résume Christophe Benavent.

Les marques de luxes doivent se montrer généreuses et attentionnées

Au jour le jour, les marques doivent entretenir la flamme. " Le storytelling nourrit la fidélité ", analyse Christophe Poisson, président de l'agence Paris en Australie, filiale mode et luxe du groupe Australie. Or, il est facile de jouer sur ces ressorts, puisque le propre des maisons de luxe est d'avoir une histoire. " Les marques doivent prendre l'habitude de prendre la parole pour des actes positifs ", explique Lionel Meyer, cofondateur, avec Erik Perey, du cabinet de conseil Luxury Attitude(2). Plutôt que de chercher à argumenter pour vendre, elles racontent de belles histoires : l'histoire d'un parfum, la naissance d'un produit... Pour mettre en exergue son patrimoine historique, LVMH a organisé, en 2011, ses Journées particulières : le groupe y a dévoilé son patrimoine à travers des démonstrations, conférences, expositions... Surtout, le Web permet de se dévoiler plus largement et de faire du brand content, à l'image de Van Cleef & Arpels, qui diffuse, sur Internet, des vidéos sur son savoir-faire.

Michel Campan (Same Same but Different)

Les marques prestigieuses tirent la fidélité de leurs clients de la qualité, sinon de l'excellence, de leurs produits. " Celles qui ont oublié cela en sont mortes ", rappelle Michel Campan, fondateur de l'agence digitale Same Same but Different(3). Les flagships sont, d'ailleurs, destinés à mettre en scène le produit. Le luxe implique également un prix élevé. Les marques veillent à ne jamais communiquer sur ce sujet ni à proposer de promotions sur leurs produits. " Les clients du luxe n'existent que parce qu'il y a des millions de gens qui ne peuvent pas s'offrir les produits : cela crée le désir et l'attente chez ceux qui ont les moyens de les acheter ", reprend Michel Campan. Le luxe, c'est aussi et surtout la rareté. Face à l'industrialisation du secteur, certaines marques parviennent à éviter l'uniformisation, à l'image d'Hermès, qui mise sur la création et l'innovation. La maison affirme renouveler les deux tiers de son offre tous les six mois, soit 33 500 références changées sur un total de 50 000. Le classique sac Kelly est décliné dans des couleurs et des cuirs différents, le célèbre carré dans de nouveaux motifs.

Enfin, plus encore que le produit, c'est le service, dans toute sa dimension humaine, qui nourrit la fidélité à la marque. Le client doit se sentir unique. " Il veut avoir le sentiment que la marque a des gestes et des attentions pour lui, qu'elle a envie de lui faire plaisir ", explique Lionel Meyer (Luxury Attitude). La fidélisation, c'est la somme de petites initiatives : incliner la tête pour saluer un client, citer son nom, lui proposer un café pendant qu'il patiente, faire le tour du comptoir de vente pour lui remettre son achat, le raccompagner à la porte, lui souhaiter un excellent séjour... Autant d'initiatives renforcent son attachement. Le service est fondé sur la générosité. " Le client recevra le don et se sentira redevable. Il en parlera autour de lui ", explique Lionel Meyer. Il s'agit d'offrir un service perçu comme un privilège mais qui ne représente pas obligatoirement un coût pour la marque, à l'exemple d'Ermenegildo Zegna : le tailleur offre la retouche aux clients qui voient leur silhouette se modifier... Dans les faits, la plupart préfèrent s'offrir un nouveau costume.

Consulter l'étude d'Enora consulting : Comment les marques de Luxe peuvent-elles être performantes et innovantes sur le online et les nouvelles technologies tout en conservant leur statut et en offrant à leurs clients une expérience toujours aussi majestueuse ?

(1) Vincent Bastien est l'auteur, avec Jean-Noël Kapferer, du livre Luxe oblige, éditions Eyrolles, 2008.

(2) Lionel Meyer et Erik Perey ont écrit, avec Gabrielle de Montmorin, Luxury attitude, éditions Maxima, 2011.

(3) Michel Campan est ex-directeur digital d'Hermès et de Lancôme et ex-directeur marketing de Dior Couture.

Florence Guernalec

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