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Quand les clients répondent aux clients

Publié par Mégane Gensous le | Mis à jour le
Quand les clients répondent aux clients

Un service client dans lequel les téléconseillers ne sont autres que des clients, c'est ce que promettent les communautés de clients, qui misent sur l'authenticité du conseil.

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Le marché de la relation client serait-il en train de se faire uberiser ? Oui, à en croire les projections du Gartner, qui, en 2015, a annoncé ce chiffre étonnant : en 2017, les services clients tels qu'on les connait aujourd'hui ne traiteront plus qu'un tiers des interactions. Mais qui sont ces conseillers clients d'un nouveau genre ? A côté des "bots", ces robots qui répondent 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 par le biais de messageries instantanées (trois mois après le lancement du service chez Facebook Messenger, la firme de Mark Zuckerberg en recensait déjà 11 000 dans le monde !), les consommateurs sont LA nouvelle catégorie de conseillers qui a le vent en poupe.

Le consommateur au service du consommateur

Harley Davidson, Nutella ou encore Apple, les consommateurs se sont toujours rassemblés autour de leurs marques préférées. Comme le rappelle Katy Keim, chief marketing officer de Lithium, l'un des acteurs américains de ce marché, les communautés d'aficionados de marques existaient, de façon spontanée et informelle, bien avant que n'existent les communautés online. Elles réunissaient déjà des consommateurs, salariés, partenaires, experts et influenceurs. "Mais avec le Web, poursuit l'experte, les marques peuvent fédérer ces personnes et leur offrir un cadre formel pour interagir". Pour Laetitia Pfeiffer, directrice générale adjointe de Publicis Nurun (en charge de la stratégie digitale et de l'innovation chez Carrefour), c'est d'autant plus vrai dans le retail que les enseignes disposent d'une "communauté tacite liée à la carte de fidélité ou à la carte de paiement des enseignes". "Désormais, les plateformes communautaires offrent aux clients un point d'entrée unique vers la marque, qu'ils fassent leurs achats en magasin, en ligne ou par n'importe quel autre point de contact", observe Katy Keim (Lithium).

"Les communautés de clients sont pensées pour permettre une utilisation en libre-service de l'univers de la marque", poursuit Katy Keim. Elles prennent la forme d'avis clients, de chats communautaires ou de boîtes à idées crowdsourcées. Elles s'appuient généralement sur des plateformes SaaS externes à l'image de HowTank, TokyWokky ou Wibilong. L'enjeu réside alors dans leur intégration au reste de l'écosystème digital (site web, blog, CRM). Bientôt, le Chinois WeChat arrivera en Europe. Un fait majeur, selon Laetitia Pfeiffer (Publicis Nurun) : "WeChat est un réseau social sur lequel ont été pluggés des sites marchands et de paiement, de façon à ne plus sortir de la communauté."

Un service clients compétitif et crédible

Les bénéfices des communautés sont de plusieurs ordres. Il y a, bien sûr, l'argument financier. Une question résolue par la communauté, c'est un service client moins sollicité, et donc une réduction des coûts. Chez Best Buy, distributeur américain de produits électroniques, on estime que la mise en place de la communauté de clients réalisée par Lithium a permis une économie de 5 millions de dollars par an. Les communautés servent également les objectifs business, car les clients membres d'une communauté entrent dans un cercle vertueux : plus ils parlent de la marque, plus ils en sont fans, et plus ils dépensent, etc. Aux Etats-Unis, l'enseigne française Sephora a créé, avec Lithium, une communauté baptisée "Beauty Talk". L'expérience montre que les membres de la plateforme dépensent deux fois plus que les clientes classiques, tandis que les "superfans" (utilisatrices reconnues comme expertes par la communauté) ont un panier dix fois supérieur à la moyenne!

Enfin, derrière le fait de faire témoigner des clients, se cache l'idée - vraie ou fausse - d'une parole crédible car désintéressée... La liberté et l'authenticité de la parole consommateur sont donc les conditions sine qua non de succès. Pour Katy Keim (Lithium), il est impensable de rémunérer les membres de la communauté : "c'est la reconnaissance de leurs pairs et l'appartenance à la communauté qui motivent les membres et non l'aspect financier", argumente-t-elle. Des avantages non financiers - tests de produits, invitations à des évènements ou même accès aux dirigeants de l'entreprise - s'inscrivent mieux dans la stratégie communautaire. Pourtant, chez Ibbü, les clients sont rémunérés pour répondre aux questions d'autres clients. La plateforme, créée en mai 2016 par iAdvize, permet à la marque d'auto-administrer sa campagne en définissant le profil de consommateurs qu'elle recherche, la période couverte et la rémunération qu'elle offre (à minima 2 euros par chat, incluant la commission de 20% d'Ibbü).

De nombreux annonceurs tricolores ont franchi le pas ou sont en train de le faire. On citera, pêle-mêle, le pionnier Bouygues Télécom, le cas d'école Darty, mais aussi L'Occitane, BlaBlaCar et Leroy Merlin. Chez Dacia, les propriétaires d'un véhicule jouent même les apprentis concessionnaires en accueillant des acheteurs potentiels pour des essais, grâce à la plateforme de mise en relation "Système Dacia" conçue par Publicis Conseil. Bien entendu, la plupart des observateurs du marché s'accordent à rappeler que ces plateformes communautaires n'ont pas vocation à se substituer aux centres de contacts traditionnels mais à les compléter. Un complément certes low cost, mais ouvert tard le soir et le week-end. Comme le rappelle iAdvize, "les sites marchands manquent en moyenne 70 % des opportunités de transformer leurs visiteurs en clients, ce qui représente 5 à 10% de leur chiffre d'affaires". Pourquoi ? Parce que "60% des achats sont réalisés le soir et le week-end, au moment où les services clients sont fermés et donc indisponibles pour conseiller les visiteurs". CQFD.

Priceminister sollicite ses experts avec HowTank

Parmi ses 15 millions de membres, Priceminister se targue de rassembler une puissante communauté, les " Price Lovers ". Une communauté sur laquelle le site marchand du groupe Rakuten n'a pas hésité à s'appuyer, mettant en avant la cohérence pour un acteur de l'économie collaborative de faire appel à ses consommateurs. Pour décharger son service client, l'e-commerçant a donc déployé en 2013 la solution de chat communautaire HowTank, dont les co-fondateurs ne sont autres que des anciens de Priceminister. Chaque jour, 2800 " experts " (dont 50 " hyperactifs ") répondent à 1500 requêtes au cours de conversations allant d'une minute à une heure. Cette initiative a permis de réduire de 20% le nombre de questions entrantes au SAV et d'accroître le taux de conversion de 2%.

 
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