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Pourquoi faut-il s'inspirer des Digital Native Vertical Brands?

Publié par Floriane Salgues le - mis à jour à
Pourquoi faut-il s'inspirer des Digital Native Vertical Brands?

Face à des consommateurs en quête d'expériences, de transparence, et de personnalisation, les Digital Native Vertical Brands (DNVB) semblent avoir tout compris pour les séduire. Comment s'inspirer de ces modèles gagnants ?

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Nom de code : DNVB. Derrière l'acronyme se regroupent des acteurs à surveiller de près, les Digital Native Vertical Brands, des marques nées sur le digital et sans intermédiaire avec les consommateurs (de la fabrication à la distribution), qui se sont, bien souvent, emparées de marchés délaissés par les marques traditionnelles pour monter leur propre business. Avec succès, alors que les marques historiques vivent de plus en plus dans l'ombre des géants de l'e-commerce Amazon et Alibaba... et de ces nouvelles venues fortement disruptives. "Avec le digital, la façon dont les marques et leurs consommateurs interagissent a été bouleversée, analyse Olivier Martin Dupray, cofondateur et directeur associé d'Addiction Agency, agence de conseil en communication digitale. Les nouveaux entrants s'imposent plus rapidement dans les modes de consommation et dépoussièrent les secteurs existants avec une meilleure offre de produit ou de service, et bien souvent un mono-produit", complète-t-il.

Sézane, Le Slip Français, Made.com, Tediber, Gemmyo ou, encore, Bonobos et Jimmy Fairly, appartiennent toutes à cette nouvelle génération de marques "inspirantes", aux nombreux traits communs. "Les DNVB portent toutes en elles une vision sur le monde ou un engagement sociétal fort avant même de mettre en avant leurs produits", poursuit Valérie Piotte, directrice générale de l'agence Cosmic (groupe Altavia), exemple de Warby Parker à l'appui. La marque américaine, née en 2010 et qui propose depuis sa plateforme e-commerce de tester à domicile, gratuitement, 5 paires de lunettes, a mis en oeuvre, depuis son lancement, le programme "Buy a Pair, Give a Pair" ("Achetez une paire, Donnez une paire"). Ainsi, pour chaque paire de lunettes achetée, l'entreprise paye la production d'une autre paire pour l'ONG VisionSpring. Selon Warby Parker, 4 millions de paires ont déjà été distribuées dans les pays en développement. "Cette démarche donne aux consommateurs la sensation d'avoir un impact positif sur le monde, en faisant un don aux plus démunis", complète la DGA de l'agence Cosmic. Et répond, aussi, à la quête d'authenticité et de sens de plus en plus exprimée par les consommateurs, lassés par le marketing de consommation. Car les DNVB développent avec leurs clients un lien plus émotionnel que transactionnel.


La griffe Sézane soutient, via son projet "Demain", des actions en faveur de l'accès à l'éducation et à la culture des enfants défavorisés ainsi que le combat pour l'égalité des chances. Chaque 21 du mois, une nouvelle pièce est mise en vente dont l'intégralité des bénéfices est reversée à Demain, ainsi que 10 % des ventes de la journée. Maison Château Rouge, créée en 2015 par Youssouf Fofona, a été à l'origine imaginée par son fondateur pour financer le projet associatif conçu avec son frère, Les Oiseaux Migrateurs, visant à soutenir des initiatives entrepreneuriales durables en Afrique. Pour Anne-Sophie Royer, directrice générale de l'agence Vaudoo (Herezie Group), les DNVB priorisent bien l'expérience humaine sur le message commercial. "Ces marques excellent à satisfaire le niveau d'impatience des consommateurs, à fluidifier les interactions et les transactions et à proposer des expériences de marques mémorables, au-delà du produit."

Une expérience client mémorable

Innovantes, les DNVB "associent le produit et l'expérience de façon indissociée, poursuit Valérie Piotte, contrairement aux marques traditionnelles qui font du mass market et se différencient les unes des autres par le prix et les promotions. Au sein des DNVB, la production est liée à la demande, donc réalisée en petite quantité et avec zéro stock. L'idée est de créer de l'attente." Ainsi, l'expérience d'achat est travaillée grâce à des services complémentaires, comme l'essai du produit à domicile proposé par Warby Parker ou la marque de literie Casper.

En bonne DNVB, Casper travaille sans aucun intermédiaire et s'invite directement dans le foyer des consommateurs. "Nous proposons aux clients de tester un matelas haut de gamme, à son domicile, pendant 100 jours et de nous le renvoyer s'il ne convient pas, témoigne Constantin Eis, co-fondateur de Casper et directeur général Europe. Ce qui n'arrive pratiquement jamais, glisse-t-il. D'ailleurs, quel meilleur endroit que chez soi pour essayer un matelas ? L'expérience en magasin ne pourra jamais être aussi naturelle." Les matelas renvoyés ne sont pas revendus, mais recyclés "de manière éthique", précise la marque. Fondé en 2014, le spécialiste américain du sommeil a été désigné en 2015 comme l'une des entreprises les plus innovantes dans le monde par le magazine Fast Company. Et pour cause : 50 ingénieurs en R & D travaillent ainsi à San Francisco à élaborer des matelas de haute qualité pour un sommeil idéal (soutien ciblé et évacuant la chaleur, notamment) et observent, dans des tests bedrooms, la résistance des produits - via des capteurs d'humidité. Sans compter, une livraison gratuite, entre deux et quatre jours. Autre particularité de Casper, arrivé sur le marché français en avril 2017 : la vente de deux modèles de matelas à mémoire de forme, disponibles en 8 et 9 tailles différentes. La marque s'est, depuis sa création, diversifiée dans les oreillers, les draps, les protèges-matelas... et même les matelas pour chiens - eux-aussi retournables sous 100 jours. De quoi inspirer les marques historiques.

Etam, l'enseigne centenaire, a ainsi lancé dans son magasin des Champs-Élysées, et sur son site Web, le service "Try at home", soit la possibilité d'essayer à domicile jusqu'à 7 produits dénichés online et offline - la lingerie, notamment - et de les renvoyer sous trois jours, sans être débité avant le renvoi de la commande.

100 % client centric

"Les DNVB sont souvent décrits par leur business model, sans intermédiaire avec les consommateurs et avec le digital chevillé au corps, mais leur vraie particularité est d'avoir remis le client au coeur de tout et de repenser l'expérience qui lui est délivrée de manière omnicanale, grâce à l'intégration des données", relève Anne-Sophie Royer. 100 % client centric, donc, les Digital Native Vertical Brands observent les parcours clients et changent leurs offres en conséquence, à l'image de la box de vins Le Petit Ballon qui s'est appuyée sur sa communauté pour faire évoluer son business model, de la vente via un site e-commerce au showroom... jusqu'à l'ouverture d'une boutique en propre.

Nombre de ces pure-players ont d'ailleurs fait le choix d'un passage du 100 % digital à l'ajout d'une brique retail physique. Mais, attention, les DNVB ne créent pas des magasins, mais des "lieux de destination pour découvrir la marque et nouer une relation culturelle", poursuit Anne-Sophie Royer. Exemple phare, L'Appartement Sézane, showroom cosy dans lequel essayer les collections de vêtements de la marque - mais, sans possibilité d'achat. "Les DNVB adressent l'online et le offline de manière indissociable, fait part Olivier Martin Dupray, à l'image du spécialiste du mobilier design en ligne et en physique, Made.com, qui porte dans son nom ce double positionnement". Les marques jouent sur l'esthétique, comme Maison Château Rouge et sa boutique en propre "hautement Instagrammable", témoigne Youssouf Fofona. "La marque est née sur le digital, et sur Instagram plus précisément avant même l'ouverture de notre site e-commerce, mais il était important pour nous d'être également présent dans le physique pour rencontrer nos clients."

Mais, s'il est compliqué pour les marques plus traditionnelles de copier-coller le modèle des DNVB, il leur est toutefois conseillé de "repenser le magasin comme un lieu d'expérience dans lequel se raconter différemment, fait part Anne-Sophie Royer, comme a pu le faire Barilla aux États-Unis en ouvrant une chaîne de restauration ou Moleskine, avec ses cafés conçus pour encourager la créativité, valeur totem de la marque." Comment s'y prendre ? "Il est nécessaire d'avoir une meilleure intégration des insights consommateurs pour davantage de corrélations entre l'offre et les besoins, mais aussi, une simplification des discours avec la communication d'un seul message", liste Olivier Martin Dupray. Parmi les autres bonnes pratiques : un positionnement assumé des actions menées, la proposition d'une expérience qui vaille le coup d'être partagée, ainsi que l'utilisation du test and learn pour innover sans être disrupté. Mais, la solution peut également être de "créer sa propre DNVB ou de l'acheter, poursuit le professionnel. "Comme Orange qui, avec le lancement de sa marque Sosh à chercher à se concurrencer pour s'adresser aux Millennials qui se détournaient."

La dernière option ? Constituer des partenariats pour bénéficier d'une notoriété mutuelle, à l'instar de la récente collaboration entre Maison Château Rouge et Monoprix, en mai 2018. Avec 130 références disponibles dans 150 Monoprix de France, la marque avoue avoir "gagné plus de 6 000 followers en deux semaines sur Instagram" et "être passés, dans les mentalités, de marque parisienne à marque française, voire même internationale", se réjouit Youssouf Fofona. Quant à l'enseigne, elle s'installe de plus en plus comme dénicheuse de talents.


Le Slip Français, le DNVB bien dans ses baskets


Est-il encore besoin de présenter Le Slip Français, 7 ans d'existence et 20 millions d'euros de chiffre d'affaires attendus pour 2018 ? La plus connue des DNVB en possède toutes les caractéristiques : un parcours direct de l'usine au client, des marges faibles - "x3, là où des marques traditionnelles sont sur du x8", glisse Guillaume Gibault, fondateur de Le Slip Français - et une forte communauté sur les réseaux sociaux, véritable ambassadrice de la marque. Sans compter sur un engagement fort pour le Made in France. "Nous portons, depuis le début, cette ambition sociétale de produire en France", explique Guillaume Gibault, convaincu de la quête de transparence et d'authenticité des consommateurs. En témoigne le slogan choisi par la marque, "Le Changement de Slip c'est Maintenant !", "d'abord pensé comme une blague, mais qui en réalité est chargé de sens, car nous faisons travailler quelque 200 salariés dans le textile en France", poursuit-il.

Digital Native, Le Slip Français réalise 70 % de son chiffre d'affaires sur son site e-commerce, mais a également ouvert 11 boutiques en France sans gadget digital. "Nous prenons le temps d'échanger avec les clients, de raconter notre concept, simple à notre image", fait part le fondateur. La marque soigne aussi sa présence sur les réseaux sociaux, Facebook et Instagram - le chouchou des DNVB - en tête, via des investissements sur les nouveaux formats. Sur un budget marketing de 2 millions d'euros en 2017, 40 % sont ainsi consacrés à ces deux réseaux. Prochaine étape pour la marque : développer la gamme femme, démarrée il y a un an et qui représente déjà 15 à 20 % du chiffre d'affaires.

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