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Picard, la force tranquille

Publié par Eloïse COHEN le | Mis à jour le
Picard, la force tranquille

Enseigne préférée des Français selon le cabinet E&Y, Picard Surgelés poursuit son ascension, rapidement, mais tranquillement. Une sérénité véhiculée par son p-dg, Philippe Dailliez, à la tête du groupe depuis le 1er octobre 2015.

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  • Vous avez lancé, le 16 octobre, Picard et moi, votre programme de fidélité. Pourquoi avoir autant attendu ?

Ce programme constituait, depuis un moment, une attente de nos clients. Cependant, nous ne voulions pas nous précipiter juste pour nous engouffrer dans le mouvement. Nous avons préféré miser, pendant toutes ces années, sur la qualité et la richesse de notre offre, ainsi que sur l'accueil en magasin. Le temps était désormais venu d'enrichir cette relation d'une meilleure connaissance client, et d'imaginer une carte à la hauteur de notre marque. D'où "Picard et moi" qui, ne se limite pas des remises, mais s'inscrit dans notre stratégie de proximité, de qualité produit et d'innovation. C'est pourquoi nous ne sommes pas dans une logique de générosité pure mais de promotion sur les produits. L'objectif, c'est d'offrir un contenu relationnel très fort, de garder notre offre au coeur du dispositif, et d'inscrire ce nouvel outil dans la construction de notre marque.

  • Quels sont les premiers résultats?

Nous venons de dépasser les 3,5 millions de porteurs de cartes. Ce chiffre va bien au-delà de nos espérances, nos objectifs initiaux étant d'atteindre, d'ici fin mars, les 2,5 millions d'adhérents.

  • Quelles stratégies data avez-vous déployées derrière ce programme de fidélité?

Nous ne sommes qu'aux prémisses d'une histoire passionnante et riche. Pourquoi? Car Picard a beaucoup à dire, et, avec Picard et moi, nous aurons d'autant plus d'occasion de susciter des discussions avec nos clients. D'autant que nous allons affiner, à un degré très fin, notre connaissance de ces derniers. Quelles sont leurs attentes? Quelles sont, en fonction des régions -et même des quartiers-, les habitudes de consommation? Et même, quelles sont les tailles des réfrigérateurs de nos habitués? Grâce à la collecte des data, et surtout grâce à leur analyse, nous allons gagner en personnalisation, et donc en pertinence dans nos interactions avec nos consommateurs.

  • Jusqu'à présent, de quels outils disposiez-vous pour entretenir vos relations clients? Et pour connaître vos clients?

Si nous disposions de nombreux mails de nos clients, le process n'était pas individualisé puisque, lors du passage en caisse, il n'y avait pas d'identification. Nous étions donc sur un traitement, et donc des campagnes de masse. Décidées au niveau national, leur mécanique était assez simple, et récurrente en fonction des saisonnalités.
Aujourd'hui, notre objectif est de personnaliser et d'affiner les stratégies, et de passer d'une communication "one to many" à une conversation en "one to one". Mais les unes, pour l'heure, vont s'ajouter aux autres. C'est le principe d'un mix marketing réussi.

  • Quelle est, aujourd'hui, la part de l'e-commerce dans la totalité de vos ventes?

Si, pour l'heure, ce canal représente 2,5 % de vente, il est déjà rentable et croît à un rythme avoisinant les 10 %. Certes, c'est encore modeste. Ceci dit, nous sommes dans la moyenne du marché sur l'alimentaire. Et surtout, nous ne communiquons pas spécifiquement sur cette offre, à part un peu sur le digital. Cette croissance n'est donc qu'organique, et s'explique, notamment, par l'amélioration du service, l'élargissement des plages de livraison, ainsi qu'au rajeunissement de notre clientèle, friande de ce nouvel usage.

Si nous sommes déjà fiers de ces chiffres, notre ambition est de doubler la part de l'e-commerce d'ici quatre ans, avec une moyenne de croissance de 10 % chaque année. Et pour ce faire, nous renforçons désormais la visibilité de ce service sur nos canaux et via des campagnes de publicité.

  • Comment sont répartis vos investissements média entre l'imprimé, l'affichage, la télévision et le digital?

Si j'ai coutume de dire que notre premier média reste nos clients, les prospectus et l'affichage constituent nos supports de communication principaux. Mais la part du digital progresse, de l'ordre de 10 % chaque année. Mais encore une fois, notre carte Picard et moi, en nous faisant gagner de l'autonomie et de la justesse à ce niveau, va rebattre les cartes.

  • Aujourd'hui, vous disposez de 1 000 points de vente. Et continuez à en ouvrir, en propre ou en franchise, à un rythme élevé : 20 en 2017. Quand considérerez-vous que le territoire sera saturé?

Quand nous en avions 500, tout le monde pensait que nous étions arrivés au bout. Idem pour les 700. Aujourd'hui, nous ouvrons une vingtaine de magasins en propre par an, et la croissance de la population ajoutée à celle de la marque nous font espérer des fréquences similaires dans les cinq prochaines années.

  • On parle beaucoup de la digitalisation des points de vente. Quelles innovations technologiques avez-vous récemment déployées dans vos magasins?

La digitalisation est, c'est vrai, peu présente dans nos magasins

La digitalisation est, c'est vrai, peu présente dans nos magasins. Même la livraison à domicile est peu développée. Il s'agit, pour nous, d'un point de réflexion. Suite à un partenariat avec Apple, nous avons d'ores et déjà équipé les vendeurs de plus de 400 de nos magasins de tablettes. Et ce afin que ces derniers puissent consulter le back-office, ou des recettes afin de conseiller, au mieux, nos clients. Cette initiative, nous allons la déployer, d'ici fin 2018, sur l'ensemble de nos réseaux. Cela étant dit, le concept Picard est assez simple : il est basé sur des magasins de proximité, des gammes courtes et des courses rapides, dont le besoin de digital en point de vente ne me paraît pas d'une urgence absolue.

  • Quelles sont les technologies que vous considérez, au contraire, comme des gadgets ?

Je dirais que certaines solutions, sans être inutiles pour d'autres enseignes, ne sont pas pertinentes pour nous. Tel est le cas des services liés aux courses longues, de 20 minutes à une heure, tels que le click and collect. Chez Picard, la question se pose moins, le temps moyen de course étant de six minutes. C'est demandé par nos clients, mais sans, selon nous, de degré d'urgence.

  • Que vous a appris votre longue expérience dans le non-alimentaire ? Qu'en avez-vous retiré pour le décliner chez Picard ?

De la famille Mulliez, actionnaire du groupe Adeo, dont j'ai été directeur général délégué, j'ai gardé l'obsession de l'écoute clients. Et c'est devenu ma marque de fabrique. J'écoute, j'écoute, j'écoute, que ce soit dans les magasins, sur Internet, sur les réseaux sociaux, sur l'évaluation des produits, des avis clients, et des magasins. Parallèlement, je suis beaucoup en magasin pour rencontrer à la fois nos consommateurs, ainsi que nos collaborateurs et les clients. En mars, nos 250 cadres passeront d'ailleurs une journée en point de vente. Ils feront cette expérience en groupe de cinq, ce qui promet d'être passionnant et très riche. Ainsi formalisé, c'est une première chez Picard !

  • Comment formalisez-vous les retours en magasin ?

Le process de remontées client est assez classique et réside dans l'écoute du management, des régionaux sur le terrain via des instances thématisées. Nous ajoutons désormais l'écoute directe des clients, via les réseaux sociaux, sans oublier notre service téléphonique Info Conso, toujours très populaire.

  • Vous avez lancé 230 nouvelles références en 2017. Et notamment une bûche avec Christophe Michalak. Allez-vous développer ce type de collaborations ? Si oui, sur quels types de produits ?


Nous étions très contents de la qualité du produit, et des retombées commerciales. Nous pensons donc renouveler l'expérience, mais de manière ponctuelle, sous l'angle d'une invitation ou d'un partenariat avec un grand chef autour d'un produit magique. Nous ne cherchons pas à massifier ce type d'initiatives, nos produits étant élaborés par une équipe de création incroyable, qui épate même les grands chefs!

  • Vous dites que le développement de vos produits bio se heurte à un problème d'approvisionnement. Comment comptez-vous contourner cette limite?

Nous favorisons la conversion des agriculteurs en leur assurant leurs ventes et un minimum de prix pendant les trois ans de leur transition. Nous avons également des accords avec la FNAB, Fédération nationale de l'agriculture biologique.

  • Après le snacking et la gamme de vins, quel type de diversification envisagez-vous?

Nous allons amplifier sur le snack-bar, avec notre offre à cinq euros incluant un plat et une boisson. Et ce, en favorisant des recettes limitant le sel et le sucre. Nous avons 20 corners et nous prévoyons d'en doubler le nombre en 2018.

  • 2018 a été marquée par l'affaire Lactalis. Vous-mêmes avez été visés par le scandale de la viande de cheval dans vos plats, en 2013. Quelles leçons en avez-vous retirées?

Nous avons un dispositif très complet de gestion de crise, incluant notamment une cellule sanitaire. Parallèlement, nous avons renforcé notre vigilance, en instaurant notamment un contrôle ADN de la viande.

  • Autre affaire qui touche la grande distribution : la promotion de 70 % des pots de Nutella qui avait presque viré à l'émeute. Qu'en avez-vous pensé?

Ce qui est frappant, dans cette histoire, c'est à quel point la question du pouvoir d'achat est sensible. Et nous devons garder cela bien en tête.

 
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