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Le risque de requalification du jeu-concours en loterie prohibée

Publié par Amina Khaled le - mis à jour à

Mais si les avantages des jeux-concours sont nombreux, pour autant, leur organisation est soumise à un cadre légal très strict qui risque d'évoluer prochainement.

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Fréquemment utilisés pour booster les ventes, promouvoir un nouveau produit, ou encore collecter des adresses e-mail, les jeux-concours fleurissent sur le web et constituent aujourd’hui un outil marketing efficace et incontournable.

Mais si les avantages des jeux-concours sont nombreux, pour autant, leur organisation est soumise à un cadre légal très strict qui risque d’évoluer prochainement.

1. Une distinction fondamentale entre concours et loteries

Il existe une distinction fondamentale entre le concours qui fait appel aux connaissances, à l’habileté, et à la sagacité des participants pour désigner un gagnant et la loterie qui s’en remet au pur jeu du hasard.

Un concours consiste par exemple pour une marque de cosmétiques à proposer aux joueurs un quizz sur les différents produits qu’elle commercialise, le gagnant étant désigné en fonction de ses bonnes réponses au jeu. Au contraire, un jeu est qualifié de loterie dans le cas où les lots seraient distribués uniquement aux 50 premiers joueurs tirés au sort. Dans cette dernière hypothèse, seul le hasard permet de désigner les gagnants.

Juridiquement, cette distinction est très importante dans la mesure où les concours, sous réserve du respect du cadre légal existant, sont licites, alors que les loteries sont en principe prohibées par la loi.

En effet, l’article L. 322-1 du code de la sécurité intérieure précise à cet égard : « les loteries de toute espèce sont prohibées ».

L’organisation de loteries prohibée est punie de trois ans d'emprisonnement et de 90 000 euros d'amende. Ces peines peuvent être accompagnées de peines complémentaires comme l’interdiction d’exercer par exemple.

2. Le risque de requalification du concours en loterie

La qualification de loterie prohibée suppose la réunion de quatre conditions, à savoir la présence d’une offre publique, l’espérance d’un gain, l’existence d’un sacrifice financier de la part du joueur, et la présence, même partielle, du hasard.

Ainsi, un jeu peut échapper à la qualification de loterie dés lors que l’un de ces quatre critères fait défaut. Un jeu payant échappera à la qualification de loterie s’il ne fait appel qu’aux seules connaissances du joueur. De même, un jeu totalement gratuit ne sera pas qualifié de loterie prohibée s’il fait appel, pour la désignation du gagnant à une part de hasard.

En pratique, la frontière entre ces deux qualifications reste floue et de nombreux opérateurs ont trouvé des astuces pour contourner notamment le critère de « sacrifice financier » et échapper ainsi à la qualification de loterie.

Sur ce critère, la jurisprudence est particulièrement stricte, la participation financière du joueur est acquise dés lors qu’il existe des frais de participation au jeu ou même des frais de communication nécessaires à la participation au jeu. Le montant de cette participation, aussi minime soit-il importe peu.

Ainsi, s’est développée sur le web la pratique qui consiste à proposer un jeu nécessitant une participation financière du joueur, même minime, tout en prévoyant le remboursement de cette participation et des frais liés au jeu.

Cette pratique s’appuie sur le constat simple selon lequel les consommateurs sont très peu nombreux in fine à demander le remboursement des frais exposés.
Cette exception qui a été admise par la jurisprudence sous certaines conditions risque bientôt de disparaitre avec l’adoption du projet de loi relatif à la consommation.

3. Vers une clarification de la notion de loterie et la fin de l’exception de remboursabilité

Dans le cadre du projet de loi relatif à la consommation actuellement en discussion au Parlement, un amendement vise à modifier le code de la sécurité intérieure afin de préciser la notion de loterie.

Cet amendement, déjà adopté en première lecture par l’assemblée nationale, poursuit une double finalité, à savoir, celle d’interdire explicitement les « jeux d’adresse » et celle de supprimer l’exception de remboursabilité des frais de jeu.

S’agissant de cette seconde finalité, le député socialiste Razzy Hammadi précise dans l’exposé des motifs que :

« certains opérateurs, notamment sur internet, ont cru pouvoir contourner la prohibition des jeux d’argent en prévoyant le remboursement des sommes engagées par les joueurs sur leur demande. Dans la réalité, rares sont les consommateurs qui sollicitent le remboursement auquel ils ont droit, notamment parce que les modalités de celui-ci sont définies au sein de conditions générales dont la lisibilité et la mise en œuvre se révèlent souvent complexes. Le modèle économique de ces jeux repose ainsi sur le fait que les consommateurs n’exercent pas les possibilités de remboursement ».

Ainsi, le projet de loi relatif à la consommation prévoit d’insérer dans le code de la sécurité intérieure un article L. 322‑2‑1 ainsi rédigé :

« Cette interdiction recouvre les jeux dont le fonctionnement repose sur le savoir-faire du joueur. Le sacrifice financier est établi dans les cas où l’organisateur exige une avance financière de la part des participants, même si un remboursement ultérieur est rendu possible par le règlement du jeu. »

En conséquence, si cet amendement venait à être adopté dans la version définitive du texte, tous les jeux-concours qui échappent aujourd’hui à la qualification de loterie grâce à la faculté de remboursement des frais exposés par le joueur pourraient tomber sous le coup de la prohibition des loteries.

Passionnée de créations et d’innovations, Amina Khaled est dotée d’une double formation en France et au Royaume-Uni. Amina a obtenu son [...]...

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