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Luxe : entre pénurie et metaverse, quel rapport à la rareté en 2022 ?

Publié par Clément Fages le - mis à jour à
Luxe : entre pénurie et metaverse, quel rapport à la rareté en 2022 ?

Face au risque de pénuries et au développement de produits virtuels liées aux NFT ou au metaverse, la rareté et la valeur qu'elle sous-entend seront elles encore d'actualité en 2022 ? On fait le point avec Adrien Moret, head of creative strategy chez l'agence Helmut.

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Vos clients dans le luxe sont des spécialistes du marketing de la rareté. Peut-on s'inspirer de leurs stratégies à l'heure où les pénuries vont devenir de plus en plus courantes ?

La pénurie n'est pas du tout un sujet pour nos clients, du moins du point de vue logistique. Cette notion entre plus comme un élément d'une réflexion sociétale, qui est menée par les acteurs de la mode et du luxe en réponse à la fast fashion. Là où auparavant, une ou deux collections étaient la norme, de nombreuses enseignes s'inspirent aujourd'hui des Maisons de haute couture pour alimenter des collections mensuelles. Le luxe doit alors d'une certaine façon cultiver la pénurie et en faire une stratégie marketing. Les collections capsules sont par exemple une aubaine pour les marques de luxe. Elles permettent de créer de la rareté et de l'unicité, ce qui est déterminant pour le luxe. C'est autant une pénurie marketing que réelle : on produit moins de vêtements, et on cultive ainsi un sentiment d'urgence permanent. Ainsi, le luxe ne connaît pas la crise et se trouve même très bien armé pour faire face aux évolutions à venir, compte tenu du rajeunissement des clients et des expérimentations en cours pour vendre autrement.

Vous évoquez également la généralisation de la culture du drop, technique basée sur le principe de rareté puisqu'un drop est la mise en vente d'un nombre limité d'articles. Pour pouvoir acheter un produit lors d'un drop, il faut s'inscrire et être tiré au sort !

De nombreux acteurs jouent sur l'effet FOMO de ces ventes, qui, grâce aux collaborations avec une marque ou un artiste peuvent toucher de larges communautés. Pour autant, le faible nombre de produits disponibles fait augmenter la valeur des produits, mais permet aussi de jouer sur la notion de responsabilité, la production et le transport de faible quantité de produits demandant des ressources limitées. Sur le court terme, les marques peuvent créer un fort sentiment d'attente, en misant par exemple sur des ventes flash ou des collaborations uniques avec une autre marque ou un artiste, à l'instar de ce que peut faire Supreme. À l'inverse de ce sentiment d'urgence, on voit aussi, sur le long terme, se développer la notion de slow-fashion ou long-fashion. Les gens cherchent du sens dans leur consommation. C'est ce que fait une marque comme Asphalte, en ne produisant qu'en pré-commande et en promettant des vêtements qui durent dans le temps. Mais plus globalement, je pense que la pénurie est un moyen pour les marques de rééquilibrer le rapport de force avec le consommateur. Ces dernières années, les marques ont dû se mettre en quatre pour répondre à leurs désirs. Au contraire, la pénurie va créer de l'attente, et faire émerger des marques gourou. À cela s'ajoutent les bénéfices pour les marques : produire moins, c'est moins de stock, d'invendus, de perte et d'impact environnemental. Aussi, disposer de moins de ressources et subir plus de contraintes permet d'être plus imaginatif, d'innover.

Mais que penser alors du développement de nouveaux espaces et usages liés notamment au metaverse et autres univers virtuels ? Comment réussir à marketer la rareté quand de nouveaux produits virtuels, une fois conçus, peuvent être dupliqués à l'infini ?

L'Asie à un temps d'avance sur nous. Observant ce qu'il se déroule là-bas, nous conseillons à nos clients d'aller sur le jeu, qui est le futur du social media. Quant à la notion de rareté, les NFT sont une réponse. Si chaque NFT est unique, c'est une façon de créer de l'exclusivité et de l'urgence à vouloir l'acquérir à l'occasion d'un drop. Nous parlons de plus en plus de NFT avec nos clients. On voit s'ouvrir de nouvelles possibilités, comme il y a une dizaine d'années avec le développement des réseaux sociaux. Mais là encore cela interroge sur les attentes des consommateurs, notamment vis-à-vis de la notion de possession. On parle de plus en plus de valeur d'usage au détriment de la possession, hors cet engouement pour les NFT, et plus généralement pour tout ce qui est rare, montre l'inverse.


Adrien Moret est head of creative strategy au sein de l'agence Helmut depuis 2017. Il a notamment la charge du planning stratégique et de l'encadrement des équipes créatives. Nommée agence de communication luxe de l'année en 2020, Helmut accompagne notamment L'Oreal, YSL, Dior, Givenchy, Guerlain, Paco Rabanne, Cartier ou encore Louboutin.

 
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