Max Havelaar développe trois nouvelles filières de commerce équitable
Dans un contexte économique globalement morose, Max Havelaar France affiche un bilan 2024 solide et trace de nouvelles perspectives. Lors d'une conférence de presse, Blaise Desbordes, directeur général de l'ONG, a annoncé plusieurs innovations majeures : le lancement de trois nouvelles filières françaises (blé, légumineuses et viande bovine), et la création d'un observatoire scientifique inédit sur la rémunération des agriculteurs.

Alors que la consommation en grande distribution a reculé de 0,9 % en 2024, les ventes de produits équitables labellisés Max Havelaar enregistre une hausse de 4,1 %, atteignant 1,38 milliard d'euros. "Dans un contexte qui reste relativement morose, jamais la pertinence de notre proposition à la société n'a été aussi forte", souligne Blaise Desbordes, directeur général de l'ONG, lors d'une conférence de presse organisée ce mardi 6 mai. Ces produits continuent de convaincre sur le territoire hexagonal, notamment dans les réseaux spécialisés bio (+28 %) et la restauration hors domicile. "Les enseignes bio rebondissent, ce qui est une bonne nouvelle pour l'équitable. Certaines comme Biocoop font presque de l'équitable un prérequis pour entrer dans leurs rayons", ajoute-t-il.
Le lancement de trois nouvelles filières françaises
Dans ce contexte et après avoir lancé le lait en 2021, Max Havelaar élargit son action à trois nouvelles filières agricoles françaises. Le blé ouvre la marche, avec les premiers produits issus de cette filière déjà en rayon. "C'est notre réponse à l'immobilisme législatif. Faute d'avancées sur la loi Egalim, nous avons décidé d'agir, et d'étendre sans attendre notre dispositif de prix sécurisés et rémunérateurs", explique Desbordes.
Les légumineuses (lentilles, pois chiches, haricots) constituent la seconde filière annoncée. Celle-ci s'appuie sur un nouveau cahier des charges équitable, construit en partenariat avec les producteurs. "Il y a toute une ingénierie derrière : prix minimums garantis, valorisation de cultures écologiquement vertueuses, accès facilité aux marchés publics...", détaille Blaise Desbordes. Ce développement s'inscrit également dans le cadre du plan protéines, pour pallier le déficit structurel de la France dans ce domaine.
Enfin, une expérimentation est lancée sur la filière viande bovine avec des éleveurs franciliens. L'objectif est de garantir, à termes, une rémunération décente aux éleveurs français et d'approvisionner les cantines scolaire avec une viande de qualité, éthique et durable. "Le monde agricole souffre. Sur le bovin, les enjeux de rémunération sont majeurs. Il nous faut stabiliser les revenus pour éviter l'hémorragie des éleveurs", insiste le directeur général de Max Havelaar.
Une ambition scientifique : l'Observatoire de la Rémunération Agricole Équitable (ORAE)
Tandis que, selon l'Insee, 1 agriculteur sur 5 vit sous le seuil de pauvreté en France, l'ONG entend aussi structurer le débat sur le revenu agricole en lançant un observatoire scientifique, citoyen et collaboratif. Baptisé ORAE (Observatoire de la Rémunération Agricole Équitable), ce projet vise à mieux définir ce qu'est un revenu juste, mais aussi un revenu "d'intérêt" : "On parle souvent de revenu décent. Mais est-ce suffisant ? La vraie question, c'est : quel revenu permet réellement de rester agriculteur ?", interroge Blaise Desbordes. "Le revenu d'intérêt, c'est celui qui fait qu'un jeune choisit ce métier et y reste." Pour rappel, pas moins de 100 000 exploitations agricoles ont disparu en 20 ans.
Deux études seront conduites dans ce cadre, en lien avec des établissements agronomiques partenaires, dont l'appel est lancé à l'occasion de la Quinzaine du commerce équitable. L'objectif est de présenter les premiers résultats lors du Salon de l'Agriculture 2026.
Le diagnostic de juste rémunération pour les acheteurs publics
Enfin, l'ONG déploiera en 2025 et 2026 une série de diagnostics de "juste rémunération" auprès de collectivités locales, grâce au soutien du Programme national pour l'alimentation (PNA) du ministère de l'Agriculture et de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe). Ces diagnostics permettront aux acheteurs publics de mieux évaluer s'ils rémunèrent justement les agriculteurs dans le cadre de leurs marchés. "Nous avons l'impression que notre démocratie alimentaire s'est enlisée. Il y a eu beaucoup de débats, mais peu d'actions concrètes. Nous voulons rouvrir cette discussion, outiller les décideurs et les consommateurs pour qu'ils puissent choisir en conscience", conclut Blaise Desbordes.
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