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La boîte à outils du Design management
Chapitre VIII : Positionner le design en marketing

Fiche 04 : L'ergonomie du produit

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  • Publié le 28 nov. 2017
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La boîte à outils du Design management

9 chapitres / 52 fiches

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Les 3 piliers de l'ergonomie


En résumé

Pour un designer, le facteur humain est un paramètre essentiel dans la conception d'un produit. Le professionnel fait ici appel à l'ergonomie. Il définit la relation entre l'utilisateur et la fonction, le produit et la marque. Il couvre un large spectre de compétences et pourra, par exemple, améliorer l'efficience d'un système pour réduire l'occurrence d'erreurs lors de son utilisation, définir une logique de fonctionnement ou améliorer le confort d'usage. L'ergonomie est focalisée sur la relation matérielle ou logicielle, et propose d'établir des spécifications précises, des hypothèses pertinentes et des choix justifiés qui permettront d'exclure, atténuer, renforcer, créer les caractéristiques du produit.

Pourquoi l'utiliser ?

Objectif

Développer la politique produit pour un designer consiste à adapter la fonction à l'usage et au type d'utilisateur pour lui donner la capacité d'agir. Il est ainsi amené à recommander et spécifier les éléments qui favorisent la relation produit-utilisateur. Cela peut l'encourager à développer un produit adapté au besoin du client ; le designer parle alors de customisation de masse.

Contexte

  • Si le projet design concerne essentiellement un produit qui sera industrialisé.
  • Pendant la phase de définition des spécifications /cahier des charges par l'équipe projet.
  • En parallèle à l'étude design, au marketing puis engineering qui intègrent les recommandations.

Comment l'utiliser ?

étapes

Le " facteur humain " peut avoir plusieurs appellations différentes selon la culture ou le domaine industriel. La norme IEC 62366 couvre par exemple les aspects normatifs pour le domaine médical (appellation de la norme "Human Factors Engineering process ; Medical Devices - Application of Usability Engineering To Medical Devices"). Trois piliers se distinguent pour adapter la fonction à l'usage :

  • L'anthropométrie s'emploie à adapter au mieux les dimensions d'un produit pour en optimiser l'usage par le plus grand nombre. On détermine ainsi les paramètres de confort (ou de " moindre inconfort ") pour, par exemple, 95 % de la population de ses utilisateurs (calcul du 95e centile).
  • La biomécanique étudie la mécanique des mouvements, et mesure l'effort musculaire et articulaire à fournir pour adapter son corps à l'usage. On cherchera ici à limiter l'effort dans le temps ou dans son ampleur (amplitude de mouvement), à réduire par exemple les troubles musculo-squelettiques provoqués par la répétition d'une posture ou d'un geste.
  • La psychologie cognitive étudie la mémoire, le langage, l'intelligence, le raisonnement, la résolution de problèmes, la perception ou l'attention. Elle permet de définir une logique d'utilisation, ou de réduire la charge mentale d'un opérateur en vue de réduire l'occurrence d'un risque. Lorsque trop d'actions sont à mener en parallèle, l'opérateur d'un système peut être amené à faire un choix, dit " compromis opératoire ", lui permettant d'agir au mieux dans le contexte. C'est le cas lorsque l'on traite de la vigilance en conduite automobile ou lors d'une opération médicale.

Méthodologie et conseils

  • Intégrer les facteurs humains au plus tôt dans l'étude design pour en exploiter la valeur.
  • Créer un binôme designer-ergonome de façon à intégrer les recommandations ergonomiques directement dans la proposition design.
Avantages
  • Le facteur humain est essentiel à la qualité d'usage des solutions et à la valeur d'estime que la relation utilisateur-produit peut créer en terme marketing.
Précautions à prendre
  • Attention au sens des mots dans les différentes cultures. Le facteur humain distingue deux courants : l'ergonomie des conditions du travail humain (davantage développée dans les pays anglo-saxons), et l'ergonomie d'activité humaine (racines francophones).

Comment être plus efficace ?

Exemple de démarche centrée sur l'humain

Les produits ou équipements revêtent en général la forme que la technologie leur impose. Cette approche qui propose au design d'optimiser la présentation d'un organe technique défini a pour avantage d'améliorer le plus souvent la perception finale de l'ensemble sans contraindre l'étude de conception mécanique ni l'architecture du produit. Cette logique révèle pourtant deux écueils. L'un est que ce modèle n'optimise pas le design, mais la technologie. L'autre est qu'il ne permet pas de changements radicaux dans l'usage ni la perception. Non seulement le design doit-il être intégré à l'étude engineering dès son commencement, mais une partie de son travail doit la précéder.

L'organisation engineering est souvent jugée sur sa capacité à réduire les coûts (Internal Cost Value) ainsi que les temps de développement (Time To Market). Ces deux objectifs isolés de leur contexte sont des conditions nécessaires mais pas suffisantes pour remporter la préférence sur un marché. Une réduction de coût répétée se heurtera un jour à ses propres limites si elle ne s'accompagne pas d'une création de valeur. La perception de cette valeur a un impact sur la valeur marchande. Le design se positionne à l'intersection de l'optimisation et de la valorisation du produit. Si la forme suit la fonction, que suit la fonction ? La valeur marketing nait de la relation entre le client/utilisateur et la marque, il faut donc reconnaître que le facteur humain est au coeur de la chaine de valeur pour unmarketeur. Or, les organisations peuvent être tentées de placer au centre de l'équation une problématique technique dont l'homme s'accommodera.

Pour exemple, les systèmes d'échographie médicale sont historiquement constitués d'une sorte de chariot équipé d'un panneau de commande surmonté d'un écran. Le tout étant positionné à proximité du lit du patient. L'opérateur doit au cours de l'examen, constamment atteindre à la fois les fonctions de l'appareil, et la zone d'investigation sur le corps du patient, qu'il parcourt à l'aide d'une sonde à ultrasons. Or on constate qu'une grande majorité de manipulateurs souffrent de troubles musculo-squelettiques.

Pour réduire cet inconfort, des bras articulés ont été créés pour rapprocher l'écran de l'opérateur, ou encore le panneau de commande de sa main. Ces tentatives d'amélioration de l'usage sont louables mais renforcent la complexité sans traiter la cause du problème : le système d'échographie est physiquement éloigné de l'opérateur. Cette distance peut être réduite à grands renforts de moyens modernes, ou repensée, autrement. On aurait aussi bien pu se poser les questions suivantes : Où se trouve la zone investiguée sur le patient ? Quelle est la meilleure position pour le patient ? À partir de la préhension de la sonde, peut-on en déduire la meilleure posture pour l'opérateur ? Dans ces conditions, où doivent être positionnées les fonctions ? Ces données permettraient de créer l'architecture idéale du produit.

CAS de la recherche de cohérence dans le produit

Visuel utilisé avec l'autorisation de GE Healthcare.

Le facteur humain construit la cohérence du produit. Il gère la continuité entre l'objet physique et son contenu logiciel. Le lien qui unit " hardware " et " software " ne peut se distendre qu'au risque d'une incohérence dans son usage. Dans le couple clavier-écran, la logique des systèmes de commande impose de penser l'interface physique et logicielle comme un ensemble pour une compréhension intuitive des fonctions. L'ergonome définira le type d'interface qui représentera au mieux la fonction qu'il s'agisse d'un bouton-poussoir (données discrètes) ou rotatif (données continues). L'opérateur devra être en mesure de comprendre la logique de son geste sur l'écran, et de comprendre visuellement la conséquence de son action manuelle.

C'est ainsi que sur l'échographe VScan, l'interface est circulaire avec un bouton central en léger relief. Cette interface permet de piloter l'échographe tout en le tenant de la même main. La forme circulaire permet la rotation du pouce, seul doigt libre de mouvement lors du maintien de l'appareil. Sur l'écran, une représentation symbolisée de l'interface défile simultanément, permettant à l'opérateur de valider son action sans regarder son pouce, qui grâce à l'effet tactile, se positionne sans erreur.

Bérangère SZOSTAK, François LENFANT

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