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Le succès du tatouage à l'ère du tweet

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Le succès du tatouage à l'ère du tweet

D'un côté, l'instantanéité du tweet, de l'autre la pérennité du tatouage. Cette empreinte indélébile fait de plus en d'émules dans une société dématérialisée. Le physique est loin d'avoir abdiqué.

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Naguère décrié et réservé aux marginaux, le tatouage est aujourd'hui un phénomène de société, devenu l'objet d'un culte. Si seulement 5 % des adolescents français déclarent porter un tatouage, ils sont 35 % à envisager d'en avoir un jour ! C'est ce que révèle l'Observatoire international des 15-30 ans, conduit par Ipsos (1). Les jeunes Français ne sont pas les plus à la pointe de cette tendance. Si 17 % des 15-30 ans avouent être tatoués dans l'Hexagone, ils sont 20 % en Allemagne et 26 % aux États-Unis. Ce chiffre est appelé à augmenter, car près d'un tiers de la population interrogée a l'intention de se faire marquer le corps à l'avenir. Le tatouage fait aujourd'hui plus d'émules que le piercing.

Une empreinte dans une société dématérialisée

Cette même génération, qui participe à la dématérialisation croissante de pans entiers de l'économie (musique, commerce, rencontres, communication, etc.), est aussi celle qui est la plus encline à se marquer physiquement de façon irréversible.

C'est qu'au-delà de l'aspect esthétique fièrement revendiqué - une dimension à priori valorisante dans une société de l'image - les jeunes recherchent dans cette pratique un moyen d'expression qui résiste au changement permanent. Un jeune sur deux définit le tatouage comme un "moyen d'exprimer sa personnalité" et 34 % l'envisagent comme une façon de "se souvenir d'un changement ou d'un événement dans sa vie ".

Le tatouage est un repère qui permet de tracer sa route. 64 % des jeunes sont conscients que rien ne dure et que la volatilité, en matière de couple, loisirs ou look, sera la règle... Il devient donc impératif de trouver des manières de conserver ce que l'on possède de plus précieux. Internet y veille avec ses clouds et ses espaces de stockage sophistiqués, mais force est de constater qu'il ne suffit pas à satisfaire la soif de permanence des nouvelles générations. Celles-ci veulent préserver des symboles et perpétuer au coeur de ce qu'elles possèdent de plus intime - leur peau - des traces de ce qu'elles ont vécu.

Dans ce contexte, un match a d'ores et déjà commencé. Il oppose la culture de l'éphémère au culte de la permanence. D'un côté, le tweet instantané (aussitôt envoyé, aussitôt oublié). De l'autre, l'exact contraire. Là où l'un s'efface, le second demeure à jamais. D'un côté, l'inconséquence de l'oubli. De l'autre, la recherche d'éternité. Cette ambivalence reflète le combat auquel se livrent, au sein de chaque individu, les aspirations contradictoires de notre époque. Ce que nous vivons est de moins en moins tangible et de plus en plus provisoire. Le duel entre tweet et tatouage est un signe de plus que le physique n'abdique pas.

(1) "Jeunes attitudes" : étude réalisée dans quatre pays (France, Allemagne, États-Unis, Chine) auprès de 4 000 personnes âgées de 15 à 30 ans.

Rémy Oudghiri est directeur du département tendances et prospective de l'Ipsos. Il a développé des outils pour traduire en insights les enseignements issus des études prospectives sur le consommateur.

Retrouvez cette chronique dans le magazine Marketing n°177, juin-août 2014.


 
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