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Presse féminine recherche lectrices désespérément

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A limage des femmes auxquelles elle s'adresse, la presse féminine évolue dans une famille en constante recomposition. avec plus de 100 titres et 20 millions de lectrices, cette catégorie est la plus importante de la presse française.

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C'est une première qui n'est pas passée inaperçue des Parisiens et de la foule des «shopping addicts» de tous horizons qui se croisent chaque jour boulevard Haussmann. Du 28 août au 4 octobre, les neuf vitrines du Printemps ont mis en scène les nouvelles collections automne-hiver, signées «Rock Couture by Vogue». Le magazine était présent à travers la scénographie mais aussi dans les galeries d'ascenseurs relookées aux couleurs des devantures. Quant au sol du magasin, il était recouvert d'un patchwork de couvertures de la revue. Une déclinaison de cette exposition était également présente dans les magasins parisiens de Nation et Italie 2 ainsi qu'au Printemps de Lille. Cette opération, qui a été un grand succès, mérite d'être signalée car c'est la première fois qu'une revue créait les vitrines du grand magasin et s'offre un dispositif aussi conséquent. Au Printemps, on précise avoir choisi Vogue en tant que «magazine référent du luxe et de la mode, prescripteur de style et créateur de goût». Une belle vitrine pour le mensuel de Condé Nast et une nouvelle illustration de cette «puissance frivole», pour reprendre le titre de l'ouvrage que Vincent Soulier vient de consacrer à la presse féminine (éditions L'Archipel) . Ce dernier, après avoir dirigé le marketing du groupe Marie Claire de 2000 à 2007, souligne un «pouvoir d'influence trop souvent négligé» de ce média, «premier support publicitaire de presse et deuxième famille de diffusion».

Frank espiasse (Elle):

«La concurrence profite souvent au leader. Quand Jasmin est sorti, nos ventes ont progressé de 35%.»

Puissante, cette famille est, plus qu'une autre, en évolution permanente pour garder sa longueur d'avance. Comme toutes les courses de fond, elle compte son lot de victimes. Après 20 ans, Isa ou Jasmin, le mensuel Bien dans ma Vie vient à son tour de quitter les kiosques sans passer l'été. Le groupe Prisma Presse a, en effet, décidé de cesser la parution du magazine qu'il avait racheté en 2006 à Axel Springer France. «Malgré la nouvelle formule lancée en janvier, qui a, dans un premier temps, donné des résultats de diffusion encourageants, Bien dans ma Vie n'offre pas de perspectives lui permettant d'atteindre ses objectifs économiques de rentabilité», déclare Catherine Arnaize, directrice commerciale de la publicité. Ce magazine a-t-il été indirectement sacrifié au profit du lancement de Femmes? Le 21 mai dernier, Prisma a, en effet, fini par atteindre son objectif en se lançant sur le marché des mensuels haut de gamme avec ce magazine dont le positionnement «repose sur deux grands piliers, la mode et la culture, complétés par l'art de vivre au sens large», dixit Marie-Claire Pauwels, directrice de la rédaction. Avec 215000 exemplaires vendus, le premier numéro était largement au-dessus des objectifs fixés par le groupe qui souhaite, une fois l'effet nouveauté passé, stabiliser la diffusion légèrement en dessous de 100000 exemplaires. Un objectif prudent comme l'est aussi, dans une certaine mesure, le budget de lancement de 5 millions d'euros dégagé pour la première année et autant la deuxième année.

L'italien Grazia sur les rangs

Le prochain lancement attendu par le marché devrait bénéficier d'un investissement nettement plus important. Mondadori France s'apprête, en effet, à décliner dans l'Hexagone son hebdomadaire italien historique Grazia en consacrant quelque 25 millions d'euros à ce lancement (voir l'interview d'Ernesto Mauri). Grazia compte aujourd'hui 12 éditions internationales en Europe, Inde, Chine et tout récemment en Australie via le département Grazia International Network. En Italie, le magazine, vendu chaque semaine à 230000 exemplaires, a fêté cette année ses 70 ans et fait un peu figure d'institution. On ne peut s'empêcher de faire le parallèle avec l'hebdomadaire Elle, présent depuis 63 ans dans les foyers français, même si Grazia France s'annonce avec un positionnement plus haut de gamme que l'hebdomadaire du groupe Lagardère. «Certes, nous sommes confortés par une diffusion qui a fortement augmenté ces trois dernières années, mais toute concurrence est à prendre sérieusement, dit Frank Espiasse, éditeur de la marque Elle. Nous sommes néanmoins confiants car on a pu constater que la concurrence profite souvent au leader. Quand Jasmin est sorti, nos ventes ont, par exemple, progressé de 35%.»

Depuis trois ans, le poids lourd de la catégorie féminine a fortement travaillé la maquette, l'éditorial et réalisé des coups journalistiques comme sa Une du 19 octobre 2007 sur Cécilia Sarkozy, sous-titrée «Je veux vivre ma vie sans mentir». Un numéro vendu à 600 000 exemplaires, soit le double de la moyenne en kiosque et récompensé par le Prix de la meilleure couverture aux Prix de la presse magazine. «Tous les lundis, nous testons des choses, mais on n'est pas près de voir une nouvelle formule d'Elle », affirme Frank Espiasse. En juillet et août derniers, l'hebdomadaire avait innové avec un contenu différent estampillé Elle été. «Nous avions identifié six parutions avec lesquelles nous pensions avoir le potentiel pour recruter de nouvelles lectrices et la diffusion a suivi à hauteur de plus de 30%», se félicite l'éditeur de la marque. Pour renforcer son bastion, Lagardère a, par ailleurs, lancé en avril Very Elle, un semestriel et une nouvelle déclinaison de l'hebdomadaire, après Elle Déco et Elle à Table. «C'est un exercice de style et un outil très intéressant qui permet de sortir du rythme passionnant mais difficile de l'hebdomadaire et aussi de proposer au marché des formats techniques différents, note Frank Espiasse. Les résultats du premier numéro sont encourageants et le numéro 2 d'octobre revient avec de nouveaux changements.»

Le magazine Elle doit d'autant plus défendre son bastion que Grazia n'est pas encore lancé et que l'on parle déjà de la possibilité envisagée par le groupe Marie Claire d'adapter en France le Britannique Look. Cet hebdomadaire haut de gamme, mode et people, a été lancé en janvier 2007 en joint-venture 50-50 avec le groupe IPC Media-Time Warner, société qui édite Marie Claire outre-Manche. Selon le groupe français, Look représentait déjà l'an dernier une diffusion de 318 907 exemplaires et 760 pages de publicité. «Nous n'avons pas annoncé que nous allions le lancer. Nous ne le ferons que si nous nous sentons vraiment prêts. Dans ce cas, nous mettrons les moyens», déclare, de manière sibylline Jean- Paul Lubot, dga du groupe Marie Claire. Et d'ajouter: «Le marché n'est pas saturé, il y a toujours de la place pour les magazines innovants. Comme sur beaucoup d'autres marchés, l'offre crée la demande.»

Une stratégie web renforcée

Pour l'heure, le groupe Marie Claire se concentre surtout sur le développement de ses sites médias. L'accélération en a été donnée, à la fin 2007, avec la formation d'un Groupement d'intérêt économique (GIE) entre les sites du groupe et les 15 sites éditoriaux et événementiels de Magicmaman. «Notre alliance repose sur trois pôles d'expertises: l'expertise technique, l'expertise marketing afin de développer l'intérêt des annonceurs Beauté-Luxe qui ont besoin d'un écrin pour leurs marques, ainsi que l'expertise commerciale car nous sommes à même de proposer une offre purement féminine», explique Amalric Poncet, p-dg de Magicmaman et administrateur du GIE. Cette alliance avec un pure player a déjà profité à Cosmopolitan.fr. Lancé le 5 février, le site avait déjà atteint ses objectifs d'audience avec plus de 2 millions de pages vues et 600 000 visites en avril 2008. «C'est le premier site féminin à avoir donné la possibilité aux internautes de poster leurs contributions et articles», précise Amalric Poncet.

avec une moyenne de plus de 160 000 exemplaires vendus sur les trois premiers numéros, l'objectif de Femmes (groupe Prisma) est dépassé.

avec une moyenne de plus de 160 000 exemplaires vendus sur les trois premiers numéros, l'objectif de Femmes (groupe Prisma) est dépassé.

Après avoir migré la plateforme Marie Claire cet été et Marie Claire Maison à la rentrée, le GIE devrait mettre en ligne un nouveau site web avant la fin de l'année. La courbe de progression des sites et le développement de solutions nouvelles figurent bien sûr aussi parmi les priorités des autres groupes. Chez Prisma Presse, on se félicitait, il y a quelques mois, de compter plus de 340 000 nouvelles internautes à avoir fréquenté, en avril, un site du groupe, soit 2 241 000 internautes. Du côté de Lagardère, une étape a été franchie avant l'été avec la déclinaison d'Elle sur mobile. Le groupe peaufine aussi le lancement de sites pure players, sur le thème du mieux-vivre, dans la foulée de Psychologies.com. Succès des ventes papier, le mensuel dont Jean-Louis Servan-Schreiber a cédé, il y a peu, ses parts à Lagardère Active, cartonne sur le Web avec plus d'un million de visiteurs uniques.

L'autre grand site pure player à destination des femmes sera probablement signé Condé Nast. Comme Style.com aux Etats-Unis et Style.it en Italie, un Style.fr est l'un des chantiers auxquels s'attelle Carole Zibi, nouvelle directrice générale des Editions Digitales de Condé Nast. «J'ai été engagée pour faire grandir les sites existants et en développer d'autres», confirme-t-elle. La première réalisation visible d'ici à la fin de l'année concernera la refonte du site Vogue, qui génère entre 200 000 et 300 000 visiteurs uniques. «On y retrouvera l'expertise mode deVogue alliée aux possibilités qu'offre Internet de multiplier les sources de contenus», explique Carole Zibi.

2009 sera ensuite l'année de Glamour. «Le site qui a déjà connu des évolutions en 2007, sera enrichi de contenus photo, vidéo et micro blogging pour les filles qui aiment la mode et qui s'intéressent à la beauté et au people», indique Carole Zibi.

Concurrencer les pure players

Ces différentes offensives lancées par les groupes de presse sont destinées à aller dans le sens de l'histoire, en espérant au passage ébranler les positions de pure players comme auFeminin.com. Le premier éditeur de magazines interactifs féminins en Europe, tombé dans le giron d'Axel Springer, continue en effet de son côté à étendre sa toile. Il a ainsi repris la commercialisation publicitaire de madmoiZelle.com, magazine on line créé en octobre 2005 ciblant les 18-24 ans. Un partenariat qui renforce encore la spécialisation d'auFeminin.com, qui compte déjà les portails thématiques Marmiton (cuisine), Teemix (dédié aux jeunes filles), Joyce (Luxe), Santé AZ (féminin santé) et Tiboo ( grossesse-enfance). Autant de thématiques qui contribuent à se rendre incontournable à toutes les étapes de la vie des femmes.

trois questions à Ernesto Mauri, président du groupe Mondadori France

«Il faut adapter les formules existantes et le faire savoir»


Votre magazine italien Grazla arrive prochainement dans les kiosques en France. A quelle stratégie correspond ce lancement?
Il correspond à la volonté de nous développer sur le segment haut de gamme où nous sommes uniquement présents avec Biba et Mixte, deux mensuels. Nous avons choisi d'y entrer avec Grazia car c'est un produit extraordinaire, qui existe depuis 70 ans en Italie et qui a été lancé pour la première fois à l'international en Grande- Bretagne en 2005 avec succès. La formule y est totalement différente de l'Italie. On est plus dans le «glossy magazine», avec une formule dans l'air du temps qui mêle l'actualité, la mode autour de célébrités. Le concept est très différent des autres féminins avec, par exemple, systématiquement une sélection de produits sur la couverture. C'est, par ailleurs, le seul hebdomadaire féminin haut de gamme dans le réseau international car Elle est un mensuel hors de France.


Ne craignez-vous pas de lancer un nouveau titre quand le marché publicitaire donne des signes de ralentissement?
Absolument pas. Grazia est un lancement stratégique en France comme ce fut le cas pour les 12 éditions sorties en trois ans. Avec un rythme hebdomadaire, nous avons effectivement des objectifs de diffusion et de chiffre d'affaires plus importants qu'avec un mensuel. Mais au regard des tests du deuxième numéro, nous savons déjà que nous proposons un bon produit. Nous voulons seulement nous donner le temps de le présenter et de peaufiner les conditions de ce gros lancement. Le dernier hebdomadaire haut de gamme lancé en France était Madame Figaro. Grazia est un concept résolument différent, comparable à Glamour pour les mensuels et dont l'arrivée a boosté le secteur. Je crois en effet que la concurrence peut dynamiser le marché.


Quelle est la stratégie du groupe pour se développer dans la presse féminine?
Il faut constamment tenir compte de l'évolution du comportement des femmes et y répondre comme nous l'avons fait en créant Closer. Mais il s'agit aussi d'adapter les formules des magazines existants. Nous avons ainsi revu la formule de Modes & Travaux et celle de Biba qui est passée d'une mode faite pour faire plaisir à certains photographes à une mode s'adressant à la lectrice. Quand on change, il faut le faire savoir. Cela passe par des baisses de prix pour mettre le magazine dans les mains des lectrices, par des offres croisées et des «plus» produits. Nous avons fortement augmenté la valeur de ces derniers, en offrant par exemple une robe Agnès b ou un t-shirt Paul Smith. Il faut donner envie aux femmes.

Jean-Paul Lubot (groupe Marie Claire):

«Le marché n'est pas saturé, il y a toujours de la place pour les magazines innovants. Comme sur beaucoup d'autres marchés, l'offre crée la demande.»

L'exception Jalou

- Elles pourraient faire penser au village gaulois d'Astérix qui résiste encore et encore... En effet, les Editions Jalou résistent aux mouvements de concentration et recomposition du paysage de la presse en gardant la structure d'une société familiale. Autre différence: alors qu'Internet est le développement logique pour tous ses concurrents, la société est loin d'en faire une priorité. Elle n'est présente sur le Web qu'à travers deux sites, celui de la très spécialisée Revue des montres et le très «fashion» Jalou Gallery, «essentiellement un média d'image qui nous sert à produire des contenus et les vendre via Jalou TV», explique Olivier Jungers, éditeur délégué de l'ensemble des magazines. Priorité est, en revanche, toujours donnée au développement à l'international. L'Officiel, qui en est le titre phare depuis une quinzaine d'années, vient ainsi d'élargir son territoire à la Serbie. «L'Officiel fait partie du trio des revues de mode les plus développées à l'international avec Elle et Vogue, souligne Olivier Jungers. Cela nous donne à la fois une visibilité et une force patrimoniale mais aussi les moyens de développer nos titres sur le marché français.» Dernière étape en date: le lancement de L'Officiel Intérieur, consacré à la déco. Un concept original de supplément magazine tiré à 500 000 exemplaires, décliné avec quatre lignes éditoriales différentes, complémentaires et adaptées aux divers lecteurs des magazines des Editions Jalou (L'Officiel, Jalouse, L'Officiel Voyages et aussi les trois titres masculins L'Optimum, L'Officiel Homme et la Revue des Montres). Objectif: devenir à terme un seul et même magazine d'intérieur, s'adressant à toutes les cibles.

 
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ROSE LENA

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