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Pour un nouveau modèle consommatoire

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Réenchantez la société, réveillez le désir, créez une nouvelle alliance. Face à un consommateur plus pessimiste que jamais (1), l'heure n'est plus aux incantations. Les autorités, quelles qu'elles soient, ne peuvent plus faire l'économie d'un débat qui dépasse le cadre du seul marketing.

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Omniprésent dans chaque acte de nos vies, le marketing cristallise toutes les frustrations. Alors que le consommateur n'a cessé de muter pour s'adapter à un environnement mouvant, il campe sur ses positions. Incapable de sortir d'un modèle dont chacun sait pourtant qu'il est obsolète. « Le modèle consommatoire qui inspire la pensée marketing voudrait que le consommateur ait un intérêt pour les programmes de télévision et pour la publicité, qu'il soit attiré par les grandes marques de produits, qu'il ait de plus en plus de marques préférées, qu'il ait envie de dépenser, qu'il prenne plaisir à faire ses courses et qu'il privilégie, pour ce faire, l'hypermarché. Or, lorsque l'on confronte ce schéma idéal aux opinions exprimées par des groupes cohérents de consommateurs, nous nous apercevons que seuls 16 % d'entre eux adhèrent à ce modèle. Une très large majorité est soit indifférente (34 %), soit s'y oppose (24 %), ou fait preuve de lucidité et n'adhère plus aux plaisirs de la société de consommation (26 %) », indique Vincent Leclabart, président de l'agence Australie, qui révélait début novembre les résultats de la deuxième vague de l'étude Publicité & Opinion réalisée par Ipsos. Faut-il en déduire que les marques n'ont plus aucun attrait pour un consommateur rôdé depuis un demi-siècle aux pratiques du marketing et qu'un mouvement anti-marques se met en marche ? Les résultats de l'étude ne sont pas aussi négatifs. Les Français aiment les marques et leur attribuent une note moyenne de 5,8. Ils les considèrent innovantes à 72 %, elles leur donnent envie et sont sérieuses à 64 %, elles font plaisir (63 %) mais, et c'est là que le bât blesse, elles sont pour 61 % d'entre eux banales. Sur des critères aussi centraux que l'envie et le plaisir, les consommateurs sont plus nombreux à penser que les marques se sont disqualifiées. Elles donnent moins d'envie que par le passé (46 % d'accord contre 45 % pas d'accord), apportent moins de plaisir (45 % contre 42 %). Résultat, 69 % des interrogés estiment qu'en cas de disparition, ils ne regretteront pas le plaisir qu'elles apportent dans le processus d'achat.

Une nouvelle légitimité

« Une distance s'est créée entre les marques et les consommateurs, elles indiffèrent plus qu'elles ne séduisent. Et les gens sont fiers de cette indifférence. Cette attitude doit être une alerte pour ceux qui ont des pouvoirs d'autorité à défendre », estime Jean-Marc Lech, co-président d'Ipsos. Or, le travail du marketing consiste à asseoir l'autorité de la marque. « La perception de la légitimité des marques s'est construite sur leur capacité à accompagner les consommateurs dans leur changement de modes de vie, au premier rang duquel le passage de la vie rurale à la vie urbaine. Aujourd'hui, les consommateurs se sont totalement acclimatés à ce mode de vie urbain et dans le champ consumériste, les marques tendent à perdre leur valeur d'accompagnement », remarque Sophie Bertin, associée au cabinet d'études et de conseil marketing Innovacorp et auteur du rapport “Le saut de la ménagère”. Trop semblables les unes aux autres sur le fond et sur la forme, les marques ne sont plus des repères. Ou bien ce qu'elles expriment n'est plus en phase avec les attentes d'un citoyen-consommateur qui s'est forgé de nouvelles valeurs. En se mettant en marge de la vie réelle, elles ne comblent plus aucun désir. Toutefois, c'est du désir que naît la valeur. Certes, Apple avec l'Ipod semble avoir fait briller une étincelle. Mais combien d'autres exemples sommes-nous capables de citer ? « Les marques ne jouent plus leur rôle sur les valeurs d'hédonisme. Elles fondent leur légitimité sur une raison artificielle, le premium et l'innovation produits », avertit Jean-Marc Lech, avant d'ajouter : « Nous vivons dans une société sans merci, c'est-à-dire dans une société où les gens ont le sentiment qu'ils n'ont plus à dire merci puisqu'ils paient. » Face à ce consommateur décomplexé dont les stratégies sont imprévisibles, le marketing ne peut plus se contenter d'être un bon gestionnaire d'un modèle en crise. Il doit avoir le courage d'en changer.

69 %

des Français estiment qu'en cas de disparition des marques, ils ne regretteront pas le plaisir qu'elles apportent dans le processus d'achat. (source : Ipsos).

 
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Rita Mazzoli

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