E-marketing.fr Le site des professionnels du marketing

Recherche
Magazine Marketing

Picard, le bon élève de la galaxie Carrefour

Publié par le

Cascade d'ouvertures en France et en Italie, 1999 aura été pour Picard une année faste. Entrée dans le giron du groupe Carrefour en 1991, l'enseigne y fait aujourd'hui figure d'excellent élève, tant en termes de résultats qu'en matière d'innovations produits. Reste à transposer le concept hors de nos frontières pour relever le challenge du marché européen.

Je m'abonne
  • Imprimer


Les magasins Picard sont fortement présents à Paris et en région parisienne (la moitié du parc). Un déséquilibre qui devrait peu à peu s'estomper. En 1998, par exemple, les deux tiers des ouvertures ont été réalisées dans des villes moyennes de province. A noter que les magasins sont indifféremment installés en centre-ville ou en périphérie. Numéro un parmi les spécialistes des produits surgelés, numéro quatre de la distribution de produits surgelés, toutes enseignes confondues, Picard est une filiale de Carrefour. Le groupe de distribution en détient en effet 79 % (21 % pour la famille Decelle, fondatrice de l'enseigne). Dans ce groupe, Picard fait du reste figure d'excellent élève. Bien plus bavards que les dirigeants de l'enseigne elle-même, les responsables de Carrefour ne manquent pas une occasion de vanter les mérites de Picard, « entreprise merveilleuse, avec des ratios merveilleux », selon Daniel Bernard. Les performances de l'enseigne et la pertinence du concept sont-ils à l'origine du statut un peu particulier (privilégié, disent certains) dont jouit Picard dans le groupe ? L'enseigne bénéficie en effet d'une réelle autonomie dans sa gestion comme dans sa stratégie. Elle est du reste toujours dirigée par Olivier et Xavier Decelle, les fils du fondateur.

A la pointe du service clients


Les magasins, d'une surface de 200 à 300 m2, se caractérisent par leur très grande luminosité, avec leurs larges baies vitrées. Ainsi, les redoutables néons sont complétés par la lumière naturelle. Les produits sont rangés par grandes familles (viandes, poissons, desserts, plats préparés à base de légumes, etc.) dont les noms sont clairement indiqués au-dessus des bacs. On ne trouve que peu de meubles verticaux, l'enseigne ayant fait le choix de bacs avec couvercles transparents. Il se dégage donc une très grande clarté, dans tous les sens du terme, des magasins Picard. Il s'agit sans aucun doute d'un atout, surtout lorsqu'on connaît les problèmes que rencontrent les hypermarchés dans le merchandising de leurs rayons surgelés. Malgré tout, l'alignement des bacs, l'omniprésence du blanc et du bleu maison (pas franchement chaleureux) donnent une ambiance un pe... froide. Ce qui est peut-être voulu. Les collaborateurs sont là pour la réchauffer. Chargés à la fois de la caisse et de la mise en rayon, ils ont une connaissance poussée de l'assortiment et sont rarement pris de court par les questions des clients. Des publications aident le consommateur. Le catalogue, renouvelé tous les mois, présente la totalité de la gamme, avec ses nouveautés et ses promotions. Indispensable pour la livraison à domicile. La Lettre Picard, magazine de 16 pages, présente en détail les nouveautés, propose des recettes, des conseils pour mieux tirer parti des surgelés. Des fiches sont également mises à la disposition des clients. Les publications sont proposées sur un présentoir à l'entrée du magasin ou dans les différents rayons (lorsqu'il s'agit de fiches). L'enseigne a enfin mis en place un certain nombre de services : large amplitude horaire (en fonction des magasins), service consommateurs (à travers un Numéro Azur et un Minitel 3614), offre "satisfait ou remboursé", ou encore, livraison à domicile. Il s'agit pour ce dernier plus que d'un simple service dans la mesure où Picard se présente aussi comme une enseigne de home service, avec un service de livraison régulier. La livraison est assurée à partir de 350 francs d'achat dans la plupart des grandes agglomérations et alentours. 400 000 commandes par an sont livrées à domicile.

Une marque en pointe sur l'innovation


Pourtant, bien plus que dans le concept point de vente, c'est dans les produits que s'est faite la réputation de l'enseigne. L'assortiment est particulièrement large, avec près de 1 000 références. Soit la gamme la plus riche du marché et, en tout état de cause, un assortiment largement supérieur à celui des hypers. Du menu le plus simple au plus festif, de l'ingrédient de base au produit élaboré, de l'entrée au dessert, de la restauration rapide à la gastronomie, il ne manque absolument rien. L'assortiment est d'autant plus large qu'il est peu profond. Le plus souvent, on ne trouve qu'une seule marque : celle de l'enseigne. Les produits Picard représentent environ 75 % de l'assortiment. Tous les mois, une cinquantaine de produits sont proposés en promotion. Installés à l'entrée du magasin dans la "Sélection du mois", ils sont choisis dans le catalogue. Il ne s'agit donc ni de produits à part, ni de produits en fin de vie. Ces promotions jouent un rôle important dans l'image prix de l'enseigne. Sans elles, bien des clients seraient rebutés par une politique de prix parfois élitist... Chaque mois, 10 à 20 nouveautés font leur apparition. Au-delà de la quantité des nouveautés, Picard a su se forger une image à la pointe en matière d'innovation dans les produits surgelés. L'enseigne fut, par exemple, la première à proposer une gamme "mieux-être" ou des plats exotiques. Aujourd'hui, Picard est le premier à lancer des plats cuisinés à base de viande d'origine garantie. L'innovation passe également par l'invention de nouveaux procédés qui permettent l'élaboration de recettes inédites. Ainsi du clafoutis aux griottes portionnable, des cerises pré-enrobées de pâte qu'il suffit de passer au four avant de servir, etc. Derrière ces innovations, il y a une vraie politique en matière de qualité. Dans ce domaine aussi, Picard s'est forgé une image de leader. Chaque année, près de 50 000 tests sont effectués et des processus particulièrement rigoureux ont été mis en place, avec le développement de filières propres à l'enseigne. Le principe est simple : tout contrôler de la mise au point du produit à son arrivée dans les congélateurs des magasins. Cette démarche de filière a été développée pour les viandes, les poissons, les volailles et les légumes. Citons deux étapes particulièrement soignées : celle de l'élaboration des produits et celle des contrôles, effectués par les équipes Picard à tous les stades de la vie du produit. Bien évidemment, l'enseigne est particulièrement attentive au respect de la chaîne du froid, jusque dans le magasi... et même au-delà. Selon la longueur du trajet jusqu'au domicile, Picard offre différents types de sacs isothermes, en plusieurs formats.

Demain, l'international


Lorsqu'en 1994, Olivier et Xavier Decelle décident de céder une partie de leurs titres à Carrefour, l'objectif avoué est de « créer un bloc majoritaire stable afin de maîtriser la pérennité de l'entreprise ». Ils n'ont pas fait le plus mauvais choix. Alors que Gel 2000, le concurrent de toujours, se débat dans de grandes difficultés, Picard affiche une belle santé financière. Après une excellente année 1998, l'enseigne a profité des déboires de son concurrent et de ses cessions d'actifs pour passer la vitesse supérieure en 1999. En France, environ 25 magasins ont été rachetés à Gel 2000. Et en Italie, c'est la chaîne de magasins Gelmarket (près de 50 points de vente) qui a été rachetée au concurrent. De 20 à 30 nouveaux magasins par an (rythme de croisière enregistré depuis plusieurs années), l'enseigne est passée à plus de 50 ouvertures en France et autant en Italie. Le développement international devrait se poursuivre, avec des ouvertures dans les pays limitrophes. Ce faisant, Picard a un peu changé ses habitudes. On savait ses dirigeants plutôt adeptes d'une croissance interne, par création. En 1999, c'est la méthode Carrefour qui a prévalu. Faut-il en tirer des conclusions quant au devenir des "particularismes" Picard ?

DATES CLÉS


1973 : Armand Decelle ouvre dans la région de Fontainebleau le premier magasin Picard. 1991 : Carrefour fait son entrée chez Picard et prend 10 % du capital. 1994 : L'enseigne passe sous le contrôle de Carrefour, qui porte sa participation à 79 %. 1999 : Développement sans précédent de Picard, qui multiplie les ouvertures en France et en Italie.

PRINCIPAUX DIRIGEANTS


Président : Olivier Decelle. Directeur Général : Xavier Decelle.

EFFECTIFS


Environ 2 000 collaborateurs

LA DISTRIBUTION DES PRODUITS SURGELÉS


Dans le paysage de la distribution française, on n'évoque que rarement les enseignes spécialisées dans les produits surgelés. Celles-ci sont pourtant fréquentées par quelque 35 % des consommateurs. Enseignes de freezer centers (magasins de surgelés de type Picard, Gel 2000, Thiriet) ou de home service (livraison à domicile de type Maximo, Agrigel, Toupargel, mais aussi Picard) proposent des concepts très performants qui, pour les produits surgelés, offrent des prestations supérieures à celles des hypermarchés. Cette distribution spécialisée est néanmoins caractérisée par une grande hétérogénéité. Le meilleur y côtoie le pire, ce qui peut nuire à l'image du secteur dans son ensemble. Même si les enseignes de pointe sont globalement à l'abri des critiques en matière de professionnalisme. Sur la longue durée, certaines études évoquent une progression supérieure pour les circuits généralistes par rapport aux spécialistes. Pour l'heure, les chiffres ne confirment pas ces sombres prévisions. Au contraire, ce sont les circuits spécialisés qui prennent des parts de marché. En 1998 (+ 4 % de progression pour l'ensemble des surgelés, après des années 96 et 97 difficiles), les freezer centers (+ 7 %) et, surtout, les enseignes de home service (+ 19 %) ont particulièrement bien tiré leur épingle du jeu. Sans faire de bruit, ces dernières tracent leur chemin avec des parts de marché supérieures à celles des freezer centers. Il faut dire qu'avec elles, plus d'inquiétude quant à la rupture de la chaîne du froid dans le coffre de la voiture. Il faut savoir que cette rupture de la chaîne du froid entre le magasin et le domicile est le premier argument évoqué par les consommateurs réfractaires à ce type de circuits de distribution.

 
Je m'abonne

Jean-François Cristofari

NEWSLETTER | Abonnez-vous pour recevoir nos meilleurs articles