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Made in Local

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«Penser global, agir local»... Le célèbre slogan n'a jamais été autant d'actualité. Après avoir signifié délocalisation, la mondialisation rimerait-elle aujourd'hui avec relocalisation?

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L'argument local revient en force dans les marques alimentaires, à l'image du dernier produit de Candia.

L'argument local revient en force dans les marques alimentaires, à l'image du dernier produit de Candia.

«Oui aux petits producteurs». La formule sonne comme un slogan politique. Elle est en réalité inscrite sur le nouveau produit de Candia. La marque a en effet choisi la proximité et la défense de l'agriculture locale comme seul argument de vente. Loin d'être anecdotique, cette démarche marketing est en parfaite adéquation avec la tendance du retour au produit «local».

Julie Devaux (Deep Blue)

«Il existe un attrait accru pour le local, lié à plusieurs facteurs, dont l'augmentation du prix du pétrole».

Produits locaux, produits écolos

Depuis quelques années, cet engouement se traduit par une vague de produits traditionnels jouant sur le régionalisme. «Ceux-ci répondent au besoin de repères des consommateurs aujourd'hui un peu perdus», précise Nicolas Chomette, directeur général de Black & Gold. On pense, par exemple, aux versions corses ou bretonnes du Coca-Cola. Ou aux déclinaisons locales, limites schizophréniques, des grandes marques comme Lay's ou Mc- Cain (L'frite de Ch'nord). Le filon est d'ailleurs loin d'être épuisé, comme l'atteste le succès des Ch'tis et de ses très nombreux produits dérivés.

Mais aujourd'hui l'intérêt pour le développement durable lui donne une autre dimension, incarnée dans sa version la plus extrême par les «locavo- res». Cette communauté, née à San Francisco il y a deux ans, essaime désormais dans le monde entier. Conscients des effets néfastes pour l'environnement du transport de marchandises (un produit alimentaire accomplit en moyenne un périple de 2 400 km avant d'arriver dans notre assiette) et de l'importance de la survie des producteurs locaux, les locavores consomment exclusivement des denrées provenant d'un rayon maximal de 150 km... La traduction française pourrait en être l'Amap (Association pour le maintien d'une agriculture paysanne), qui permet aux urbains de consommer la production d'agriculteurs situés à proximité des villes. Mais, en dehors de ces petits cercles d'engagés, la démarche fait son chemin à plus grande échelle.

En Angleterre, la chaîne de supermarchés Waitrose base son argumentaire de vente sur l'approvisionnement local. «Waitrose pense que les distributeurs ont un rôle vital à jouer dans la sauvegarde de l'environnement et des fermiers qui en prennent soin», explique l'enseigne sur son site internet. Et pour donner corps à cette vision, celle-ci multiplie les initiatives en invitant les producteurs locaux à rencontrer leurs consommateurs, pour parler de leurs produits et de la façon dont ils sont mis sur le marché quand ils quittent la ferme. Toujours au Royaume-Uni, Belu Water entend réconcilier bouteille d'eau et environnement. L'entreprise a ainsi imaginé une production neutre en carbone, en réduisant les émissions de ses camions et en limitant ses déplacements au maximum. Résultat: elle s'approvisionne et vend localement en refusant d'exporter ses produits. Quitte à perdre des marchés.

Un nouveau marché

«Ce levier n'est pas encore très puissant en France», concède Nicolas Chomette. Mais on note toutefois «un attrait accru des consommateurs pour le local, en partie dû à l'augmentation du prix du pétrole», selon Julie Devaux, l'un des auteurs du dernier cahier de tendance Carat-Aegis Media sur l'alimentaire. Déjà, des réseaux de distribution comme «Grand Frais» investissent ce créneau avec succès en vendant des fruits et légumes essentiellement locaux. Idem pour l'enseigne Casino, qui commence à indiquer sur ses étiquettes la quantité de CO2 dépensée en fonction du mode de transport utilisé, et donc de l'éloignement des producteurs.

D'autres hypermarchés voient déjà une partie de leur clientèle préférer des magasins plus proches. «Il existe certainement une carte à jouer sur ce thème», estime l'agence conseil en stratégie de marques Lippincott. «Cela permet de redonner un ancrage à la marque, précise Denis Bonan, Senior Partner de l'agence. C'est indissociable du phénomène de mondialisation... Nous avons d'abord connu les délocalisations et nous connaissons maintenant la phase de relocalisation.»

Emblématiques de ce phénomène, les marques American Apparel aux Etats-Unis ou Blank au Canada dont le claim est on ne peut plus explicite: «de la fabrication du tissu à sa teinture, de la coupe à la couture, tout est fièrement fait au Québec».

En mêlant authenticité, proximité et solidarité, le Made in Local devrait avoir de beaux jours devant lui.

 
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BEATRICE HERAUD

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