Les magasins d'usine se recentrent
Grand commerce et centre-ville ont rarement fait bon ménage. Aujourd'hui pourtant, certaines enseignes n'hésitent pas à clamer leur vocation urbaine. Ainsi Monoprix a fait de ce créneau un axe de développement et de communication majeur. Plus surprenant, les magasins d'usines, rebaptisés magasins de marques ou boutiques de fabricants.
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On imaginait difficilement plus “périphérique” comme concept que ces
immenses boîtes à chaussures dans lesquelles les marques louent des boutiques
pour écouler leurs surstocks de l'année précédente à - 30 %, voire davantage.
Sauf qu'avec le temps, les boîtes à chaussures sont devenues des centres tout à
fait corrects, voire de véritables œuvres architecturales. Quant aux marques,
elles sont devenues grandes marques... Ainsi, pour réaliser son projet
roubaisien, McArthurGlen a entièrement recréé en centre-ville une rue piétonne
de 300 mètres de long. De part et d'autre, des boutiques, déclinées à travers
17 façades traditionnelles parmi les plus représentatives de l'agglomération
lilloise. A Romans, en plein centre-ville également, le “village de marques”
créé par Concepts & Distribution avec le célèbre architecte Jean-Michel
Wilmotte, se veut un modèle de réhabilitation d'un patrimoine architectural. En
l'occurrence, une ancienne caserne. Dans les deux cas, les investissements sont
très largement supérieurs à ceux d'un projet classique. A Roubaix, ils
s'élèvent à plus de 160 millions de francs, hors aménagement des boutiques.
Qu'est-ce qui a changé à ce point ? La volonté des McArthurGlen et autres
Concepts & Distribution de trouver des sites privilégiés n'a rien de nouveau.
C'est plutôt au niveau des pouvoirs publics, des régions et des municipalités
que le point de vue a évolué. Troyes, “capitale” des magasins d'usines, en a
fait la preuve éclatante : ces concepts constituent un pôle d'attraction
considérable. Les magasins d'usines drainent plus de 50 % de la fréquentation
touristique du département de l'Aube ! « En créant un espace de vente de
qualité, le centre contribuera au développement de l'animation locale,
développera les emplois locaux et fera de ce lieu une destination touristique
régionale profitant aux autres sites touristiques, culturels et commerciaux
environnants », explique Mohammed Najafi, directeur marketing de McArthurGlen
France, au sujet du centre de Roubaix. La démonstration n'a pas échappé aux
pouvoirs publics. D'autant que bien souvent, les centres s'établissent dans des
zones en difficulté, voire sinistrées. « Au cours des dix dernières années,
Roubaix a perdu 30 000 m2 de surface commerciale, poursuit Mohammed Najafi.
L'implantation de McArthurGlen s'inscrit dans un plan de redynamisation du
centre-ville, avec l'ouverture d'une nouvelle ligne de métro, qui desservira le
centre depuis Lille, d'un Musée de l'art et du textile industriel, et enfin,
d'un hypermarché avec une galerie marchande de 7 000 m2. »
Un véritable marathon
Reste la volonté de se lancer dans le véritable
marathon que constitue l'ouverture d'un tel centre. C'est au début de l'année
1995 qu'ont eu lieu les premiers contacts entre McArthurGlen et l'Association
pour la Promotion Internationale de la Métropole Lilloise. En 1996, la
municipalité de Roubaix propose à McArthurGlen de répondre à un appel d'offres.
En 1997, le projet d'ouverture est adopté par la CDEC du Nord. Et c'est en août
1999 que le centre ouvre effectivement ses portes. Au passage, McArthurGlen a
signé la charte de développement local du commerce et de l'artisanat de
Roubaix, s'est engagé à promouvoir les sites touristiques et culturels de la
région, et à participer à des actions pour l'artisanat local... En fin de
compte, un vrai projet donnant-donnant. « En France, la réglementation de
l'urbanisme est très contraignante, constate Mohammed Najafi. Avant de se
lancer dans un tel projet, il faut donc s'assurer qu'il y a une réelle volonté
politique au niveau local. » Dans les autres pays, les choses sont beaucoup
plus simples. Est-ce la raison pour laquelle le groupe McArthurGlen, qui
possède huit centres en Europe, ouvrira ses prochaines unités à l'étranger ? En
partie sans doute. Mais le potentiel de ces centres n'est pas illimité.
Rappelons que les magasins d'usine sont une sorte “d'exception commerciale”. Et
que les marques qui y sont présentes doivent chercher à ne pas nuire à leurs
autres circuits de distribution. De ce point de vue, le développement de
magasins d'usine en centre-ville n'apparaît-il pas comme une sorte “d'exception
dans l'exception”...
MCARTHURGLEN A ROUBAIX
Surface de vente : 15 000 m2. Nombre total de boutiques : 87 (en septembre 2000). Marques présentes (dans la première tranche de commercialisation) : Blanc Bleu, Bruce Field, Status, Petit Boy, Fila, Linvosges... Zone de chalandise : 11 millions d'habitants à 2 heures de voiture. Nombre de visiteurs : 3 millions par an. Chiffre d'affaires prévisionnel : de 260 à 300 millions de francs. Capacité des parkings : 1 500 places.