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Le point sur La TV connectée, nouvel eldorado?

Désormais interactive, la TV connectée offre de nouvelles opportunités aux annonceurs. Sur ce marché qui doit encore se structurer, géants du Web et chaînes traditionnelles se disputent déjà le butin.

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Les chiffres divulgués par les «Indicateurs avancés» de Kantar Media pour la fin décembre 2010 confirment une reprise des investissements publicitaires. La télévision a le plus contribué à la croissance en recettes publicitaires brutes (+15,7 %). Si, sur l'année, les chaînes de la TNT enregistrent la croissance la plus forte (+39,8 %), ce sont les chaînes historiques (hertziennes) qui contribuent le plus aux recettes du média (de 46,2 %). Fin 2010, le média a recruté 7,3 % d'annonceurs supplémentaires, tant sur les chaînes historiques (+8,1 %) que sur celles de la TNT (+8,3 %). Côté équipement des foyers, les chiffres des ventes de téléviseurs sont également prometteurs. En 2010, la Coupe du monde de football aurait eu raison de la crise. Les ménages se sont équipés de nouveaux téléviseurs. Grâce au passage au tout numérique, aux avancées technologiques avec les téléviseurs connectés et à la 3D, 8,5 millions de téléviseurs ont été commercialisés dans l'année (dont 775 000 connectables au réseau internet). En 2011 les ventes devraient atteindre les 9 millions, selon les chiffres du Syndicat des industries de matériels audiovisuels électroniques (Simavelec). Le syndicat estime que la part des téléviseurs dite «connectée au réseau internet» s'étendra progressivement à toutes les gammes de produits, pour atteindre, dès 2013, 75 % des volumes commercialisés. Après les émissions en haute définition et les images 3D, la télévision entame donc sa troisième mutation. Le fonctionnement est simple. Le téléviseur est connecté à Internet grâce à un accès wi-fi ou Ethernet et un navigateur HTLM, selon la norme européenne HBBTV (Hybrid Broadcast Broadband TV), ou via d'autres technologies, comme celle de Google TV, préinstallée dans le poste, ou encore grâce à un boîtier (Apple TV). Trois types de services, chacun lié à une technologie, font leur apparition sur le marché. On trouve, premièrement, l'image enrichie, avec la norme européenne HBBTV, qui permet aux chaînes de proposer des contenus interactifs en complément des programmes diffusés. Bernard Heger, délégué général de Simavelec, explique par exemple qu'une « une émission culinaire peut être enrichie par d'autres écrans qui affichent en surimpression la liste des ingrédients et la recette élaborée par le chef ».

L'utilisateur aura également accès à des widgets et des plateformes de services en ligne, élaborés en fonction des accords de partenariat noués par le fabricant. Aujourd'hui, chaque fabricant propose sa plateforme d'applications en ligne sous un nom propre (AquosNet, NetCast, VieraCast), avec un accès à YouTube, de la catch-up TV, de la VOD, des actualités et des prévisions météo. Ce kiosque constructeur, gratuit ou payant, dispose d'un nombre limité de contenus.

Dernière avancée, les moteurs de recherche permettent à l'utilisateur de bâtir sa propre grille de programmes en saisissant sa requête. Ainsi, Google TV offre un accès complet à Internet via une plateforme logicielle propriétaire intégrée aux téléviseurs ou à certaines boxes, qui embarquent tous les outils et technologies Google dans une interface adaptée aux téléviseurs. La puissance financière de Google étant inégalable, Google TV inquiète les chaînes traditionnelles.

La bataille est engagée

La communication audiovisuelle dynamique (CAD) permettant de diffuser un contenu multimédia sur tout type d'écran, afin de mieux capter l'attention de la cible, devrait rapidement attirer les annonceurs. Mais le marché doit se structurer. « Les technologies comme l'HBBTV sont testées depuis un an, elles fonctionnent, mais nous sommes en phase de chauffage, en train de décider comment le contenu va être géré et quel service en aura la charge », commente Bernard Heger. En effet, l'arrivée de la télé connectée bouleverse le monde de l'audiovisuel, tout en attirant les acteurs du Web et de la téléphonie. La guerre entre les uns et les autres pour remporter le pactole n'en est qu'à ses débuts. Lors des voeux du CSA, Michel Boyon, président, a dénoncé les effets du téléviseur connecté qui,selon lui, rendra le positionnement beaucoup plus difficile pour les chaînes: « elles ne joueront plus nécessairement leur rôle «d'agrégateur». Cela peut aussi mettre en cause la liberté de choix du téléspectateur dont les préférences seront conditionnées par des moteurs de recherche, par des médias ou par des annonceurs ». Le président du CSA faisait également part de ses craintes quant à la remise en cause du soutien à la création et à la production audiovisuelle et cinématographique française. Les chaînes nationales de la TNT ont pris les devants, en signant, fin novembre 2010, une charte pour se protéger. Saluant la mise en place d'équipements connectables, elles se sont engagées solidairement à s'opposer «à toute démarche visant à tirer profit de leurs programmes ou de leur audience en orientant les téléspectateurs vers d'autres contenus et services sans l'accord de la chaîne concernée», selon les termes du communiqué commun. Dans le collimateur, les stratégies des géants du Web (Google, Yahoo!) et des fabricants (Apple, Samsung), qui voient dans ce nouveau canal de diffusion un outil pour capter une partie des budgets publicitaires habituellement attribués aux chaînes TV. Sophie Goncalves, chargée d'étude média chez GroupM, commente: « Les chaînes verrouillent et essaient d'imposer des partenariats exclusifs, les constructeurs sont intéressés, mais les plus avancés demeurent les boxes des opérateurs, qui proposent des offres élargies ». Laurent Freysz, directeur général de Loewe France, confirme: « nous nous rangeons pour l'instant du côté de la norme HBBTV, en opposition à Goggle TV, mais personne ne s'interdit de nouvelles approches dans l'avenir. D'ailleurs, rien ne nous dit que les chaînes traditionnelles et Google ne trouveront pas un terrain d'entente ». Pour l'heure, la limite est également technologique. « La diffusion de la Google TV exige un processeur Intel préinstallé dans le téléviseur, alors que les autres technologies peuvent être mises en oeuvre à la faveur d'une mise à jour logicielle », explique ce dernier. Les constructeurs se trouvent donc face à un double choix stratégique.

De nouvelles opportunités pour les annonceurs

A l'heure actuelle, si le nombre des ventes de téléviseurs connectés augmente, les consommateurs ne savent pas toujours que leur poste est connectable. Selon l'étude «La TV connectée en pleine effervescence"Enquête Mpanel réalisée du 21 au 25 octobre 2010, auprès de 604 internautes de 16 à 65 ans (redressés sur la population française de 16 à 65 ans en termes de sexe, d'âge, de CSP et de région). publiée par le GroupM en novembre 2010, seulement 26,3 % des Français connaissent les services de la TV connectée. Pour autant, côté annonceur, le concept semble prometteur. Ainsi, explique Sophie Goncalves, « la TV connectée offre des opportunités de mesure des campagnes proche du Web, et les annonceurs vont pouvoir diffuser des campagnes de publicité personnalisées comme sur Internet. Alors que les chaînes traditionnelles visent la ménagère de moins de 50 ans, grâce à la TV connectée, les annonceurs peuvent définir des cibles beaucoup plus fines, jusqu'aux centres d'intérêts, à la composition de la famille, ou au lieu de vie », ajoute Sophie Goncalves. En abolissant les frontières entre le spot publicitaire télévisuel et la vidéo web, la TV connectée ouvre des perspectives en matière de publicité personnalisée de nature à redynamiser le support TV. « La télévision demeure le point central du salon chez le consommateur et en y intégrant la valeur ajoutée du Web, on peut lui redonner une véritable v a leur », argumente Toufik Lerari, p-dg de l'agence interactive Tequilarapido. Il voit, dans l'avènement de la TV connectée, l'occasion pour les marques de disposer de leur propre chaîne. « L'idée serait de transposer la web TV du Net sur la TV connectée, en adaptant le format. Pour autant, les exemples manquent à l'heure actuelle, puisque le taux de pénétration de la TV connectée dans les foyers est encore faible », ajoute-t-il. Tequilarapido accompagne la chaîne TV Equidia dans la transposition de son dispositif de télévision de rattrapage sur la TV connectée. « Nous travaillons sur des scénarios proches de ceux du Web: les abonnés à Equidia se connectent à la chaîne, qui leur suggère des contenus en fonction de leurs habitudes de consommation, de la dernière émission regardée par leurs amis ou encore au temps dont ils disposent », témoigne Toufik Lerari. Face aux incertitudes du marché, le danger est néanmoins réel de voir l'audience s'éparpiller. Reste aussi une grande inconnue: entre les géants du Web et les chaînes traditionnelles, qui des deux gagnera la bataille?

Euronews sur tous les fronts

En octobre 2010, Euronews, chaîne d'information internationale, annonce la signature d'un accord de partenariat avec Panasonic, afin de diffuser du contenu sur la plateforme Viera Cast du fabricant, une fonctionnalité qui permet d'accéder au Web sans ordinateur.
Désormais, les téléspectateurs peuvent accéder au contenu d 'Euronews en quatre langues (anglais, français, allemand et italien) , au dernier bulletin d'information, aux magazines Cinéma et Le Mag, et à l'émission No Comment, avec des images sans montage et le son d'origine en provenance du monde entier. Avec plus d'un million de pages vues en six mois, ces résultats, sans être significatifs, sont prometteurs au regard du taux d'équipement et de la méconnaissance des Français concernant l'offre de TV connectée.
« Aujourd'hui, nous sommes en négociation avancée avec tous les principaux constructeurs dans le monde. Notre offre les séduit, car nous sommes les seuls à proposer des informations disponibles en dix langues, grâce à nos rédactions linguistiques ad hoc, à partir d 'une source vidéo unique. Cette spécificité permet à nos journalistes d'adapter leurs commentaires à la sensibilité de chaque langue. Sur nos dix sites web, les articles sont mis en valeur dans un même esprit », affirme Michael Peters, le directeur général d'Euronews. Dans la bataille concurrentielle que les constructeurs et les FAI s'apprêtent à se livrer, le dg d'Euronews estime que sa chaîne en tant qu'éditrice doit être présente partout. Mieux, face à l'émergence d'une offre pléthorique, il croit profondément au retour vers les fondamentaux et à l'affirmation de la marque pour se différencier.
Enfin, Michael Peters observe qu'il est devenu indispensable d'adapter les contenus au type d'écran regardé (smartphone, tablette, ordinateur, poste de télévision): « L'utilisateur change de position selon l'écran qu 'il regarde, il ne consomme donc ni les mêmes formats ni les mêmes durées, selon qu'il est debout avec un smartphone à la main, assis devant un ordinateur (et donc actif) ou allongé devant un grand écran (et donc passif). Nous devons donc fournir le bon contenu, au bo endroit, au bon moment », conclut le dg, qui croit davantage à l'essor du programme choisi qu'à l'instauration d'une véritable interactivité via la TV connectée.

VERONIQUE MEOT

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