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Formations en marketing: la fin du bling-bling

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Tendance Discipline-phare des sciences de gestion, le marketing a perdu de son aura. Les étudiants lui préfèrent la finance ou le conseil. Mais le digital, le design et plus largement l'innovation, viennent à la rescousse de cet enseignement fondamental.

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«Les étudiants ne se projettent pas dans un métier où il s'agit de séduire pour vendre », explique Christophe Benavent, professeur de marketing à l'université Paris X. « Ce sont les enfants des «consomm'acteurs», beaucoup ont lu l'ouvrage No Logo et sont adeptes du slogan «Less is more». Le marketing est souvent perçu comme un moyen de manipulation. » Preuve de ce désamour? La relative désaffection des étudiants pour la discipline. « On a assisté à une évolution des spécialisations en marketing correspondant à une courbe en «U» , explique Eric de Rugy fondateur du pôle Marques et Médias à HEC, maître de conférence à Sciences-Po et fondateur de l'agence Nékid. On comptait près de 80 étudiants dans les années quatre vingt-dix, 40 en 2008 et 60 aujourd'hui dans la spécialité. » La concurrence est venue de la finance, du conseil et plus récemment de l'entrepreneuriat (notamment dans le Web) largement plus rémunérateurs. La crise a remis les compteurs à zéro et la matière se spécialise (marketing du luxe, affinitaire, relationnel, ethnique, territorial, digital, SEO, du sport etc.), ce qui assure sa pérennité. « Les étudiants ont une vision stéréotypée du métier, car le champ de compétences est très vaste. Une soixantaine de métiers différents: de la communication au référencement, en passant par le consumer management, continue Eric de Rugy. Nous travaillons sur un outil de recensement des différentes fonctions pour aider les jeunes à y voir plus clair et rendre compte de la complexité du marketingCette matrice, «Les Métiers du marketing et de la communication», sera éditée avec Sciences Po en 2012.».

Les étudiants conservent une vision stéréotypée du métier.

Les étudiants conservent une vision stéréotypée du métier.

L'hégémonie des grandes écoles

Quelles sont les filières préférées des entreprises et des recruteurs? De ce point de vue, le verdict est sans appel. La dernière enquête sur les formations en marketing Parue dans L'Etudiant (2011) et dans Stratégies n°1 630 (avril 2011). Enquête réalisée en février auprès de 14 entreprises françaises. consacre à l'unanimité les grandes écoles. Seule l'université de Paris-Dauphine émerge dans le top 5. Pierre Desmet, directeur du groupe Formation et recherche en marketing de l'université parisienne est aux commandes du fameux master 204, devenu une vraie marque. Cette filière ultra-sélective n'a rien à envier aux grandes écoles: 1 000 dossiers reçus, 330 recevables, 100 passent l'oral pour 30 places... Elisabeth Tissier-Desbordes, professeur de marketing à l'ESCP Europe, dévoile ses nouveautés pour la rentrée 2011: « Un cours sur les réseaux sociaux en anglais et un autre sur marketing interactif. Le management de l'innovation est également demandé. Nous avons ouvert, en 2010, à Londres, un master Marketing et créativité, qui recrute de plus en plus. » Mais la grande école parisienne revient également aux fonda mentaux, avec le cours sur les études. « Un cours désormais obligatoire pour redonner de la rigueur méthodologique », conclut-elle. Qu'il s'agisse de filières courtes, d'excellence (type grandes écoles) ou encore de parcours universitaires, tous les professeurs confirment qu'il existe des incontournables: la pratique de l'anglais, l'ouverture culturelle, la sensibilité à la sociologie, une bonne analyse sensorielle et une approche des neurosciences... Il faut être à la fois autonome et s'insérer dans une équipe, gérer un budget, savoir travailler avec des cultures étrangères, être créatif... Bref, « Un HEC avec une guitare », résume le directeur d'une agence de communication.

Formation continue: place à l'humain, à l'heure du Net

- Corine Brouard, responsable des formations en marketing au sein de Demos confirme: l'immense besoin des entreprises de former leurs collaborateurs au e-marketing. « Nos nouveautés en la matière pour la rentrée sont des formations très orientées social marketing comme le cours «Comment intégrer les réseaux sociaux dans sa stratégie? » , «Animer et rentabiliser son site» ou encore «Elaborer une stratégie e-mail» ». L'entreprise n'offre pas moins de 52 formations dédiées. Des fondamentales aux plus spécifiques, dédiées à des secteurs comme la santé, le luxe ou les services. « Nous bâtissons des formations à la carte car les entreprises veulent du sur-mesure ». L'enquête annuelle de l'Afpa (Association nationale pour la formation professionnelle des adultes) sur les besoins en main-d'oeuvre démontre que parmi les profils les plus demandés figurent aujourd'hui les métiers de service. A eux seuls, ils représentent 39 % du nombre total des projets de recrutement. Conseiller service clients à distance, vendeur spécialisé en magasin, manager d'univers marchand, employé commercial et négociateur technico-commercial... Nicolas Diquero, p-dg d'Acemis, spécialiste des métiers de la vente, a bien compris ce besoin: « On se focalise sur le client. Revenir à l'humain est très urgent à l'heure du Net. La simplification du parcours client est dévolue aux marketeurs ».

Design et digital au secours du marketing

Le digital et le design constituent les deux horizons du marketing. Réza Bassiri, directeur de création design chez Euro RSCG C & O, confirme que « Le designer siège désormais au conseil d'administration des grands groupes. Entre le financier et le marketing ». Dans le même esprit, l'ESC Nantes a signé un accord avec l'école des Beaux-Arts de la ville. L'idée est de décloisonner les compétences. Dans la même veine, la délégation publicitaire de l'AACC a signé, avec l'école des Gobelins un certificat de qualification professionnelle dédiée au management de projets graphiques multicanal, qui démarrera en octobre prochain. Concernant le Web, la formation initiale est en retard et n'a pas anticipé les besoins des entreprises sur la professionnalisation des métiers. L'événement viendra sans doute de la future Ecole du Net, qui s'installera en septembre au Palais Brongniart. En effet, l'Ecole européenne des métiers de l'Internet a été voulue par trois poids lourds de l'e-économie: Pierre-Antoine Granjon (Vente Privée), Xavier Niel (Free) et Marc Simoncini (Meetic). A la rentrée 2011, nombre d'universités et de grandes écoles innovent sur le thème du marketing on line.

Le développement de l'open innovation

Côté innovation, l'Essec (la meilleure école des marketers selon le classement de l'Etudiant), Centrale et l'école de design Strate College ont bâti un cours commun particulièrement original. Le CPI (Création d'un produit innovant) entre au coeur du processus de création. Tous les projets menés depuis cinq ans ont une résonance pratique. « En termes d'innovation produit, nous nous attachons à décloisonner les compétences , explique Michel Andrieux, directeur du design produit au Strate College et directeur CPI design. On favorise ainsi l'éclosion de solutions, grâce au «design thinking». » Que deviennent les étudiants qui ont suivi les cursus de marketing? Jean-Michel Azzi, associé-gérant du cabinet Maessina analyse le phénomène. « Ils deviennent souvent commerciaux, car ils ne trouvent pas de postes dans le marketing. » Selon l'APEC, en 2011, 40 000 recrutements dans la fonction vente sont envisagés et seulement... 1 000 dans le marketing. Un chiffre qui parle de lui-même.

 
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AMELLE NEBIA

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