Créer de la rupture
Les entreprises doivent totalement repenser leurs schémas d'innovation. Le Web 2.0 est le symbole d'une nouvelle donne qui, en bouleversant le rapport marques - consommateurs, offre des perspectives de développement inouïes.
Je m'abonne«Nouveau!»: une précision inévitable apposée sur les packagings qui viennent rejoindre chaque jour une offre déjà colossale. Un signe qui témoigne de la nécessité pour les marques de se renouveler constamment et de fournir de l'inédit à des consommateurs insatiables, en attente permanente d'un renouvellement, synonyme de modernité et de jeunesse. Pour autant, communiquer l'innovation ne signifie pas nécessairement la créer. Les nouvelles technologies-notamment les nanotechnologies, qui seront de plus en plus présentes partout-ouvrent des perspectives certaines, tandis que les ingénieurs et les designers s'efforcent de concevoir des objets et des applications qui défient les conventions. L'objectif étant de «casser les codes» et d'apporter une vision en rupture avec les modèles du passé.
Or, faire table rase et produire des modèles en rupture réelle restent très rares: dans la majorité des cas, on a plutôt affaire à des processus itératifs qui transforment le produit par des améliorations mineures mais qui ne révolutionnent pas l'usage.
Recherche de sens
Si l'innovation produit se heurte à des difficultés, l'innovation en termes de modes de vie n'a, elle, jamais été aussi visible. Friands de produits écologiques et éthiques depuis déjà plusieurs années, les consommateurs clament haut et fort leurs valeurs et entendent bien vivre en accord avec elles. Face à une surenchère de produits et à des préoccupations environnementales ou sociétales désormais incontournables, il ne s'agit pas de consommer moins mais de consommer mieux. Des consommateurs plus exigeants, non seulement sur la qualité des produits mais aussi sur leur «respectabilité», c'est-à-dire sur leur provenance et leur mode de réalisation.
Quitte à payer plus cher: les Lohas - adeptes des «Lifestyles Of Health And Sustainability», au pouvoir d'achat élevé - n'hésitent pas à investir dans des produits plus onéreux qui, en contrepartie, participent à un mode de développement respectueux de la planète et des hommes. Cette consommation responsable, qui gagne chaque jour du terrain, témoigne d'une recherche de sens et de «bon sens», de la volonté de se poser les bonnes questions sur nos modes de vie et de renverser nos habitudes pour promouvoir des schémas bénéfiques pour tous. Les solutions imaginées sont très diverses mais elles contiennent, toutes, les ingrédients d'un équilibre juste et raisonné: plus de simplicité, un développement à hauteur d'homme - plutôt qu'à l'échelle de multinationales -, le respect d'un processus de réalisation de qualité, quitte à accepter une certaine lenteur...
«Mecompany»
Forts de cette nouvelle affirmation et conscients de leur pouvoir, les consommateurs constituent une source d'inspiration et amènent les entreprises à repenser leur offre. Ils vont même plus loin: ils prennent le pouvoir! On assiste à un véritable renversement des rôles entre marques et consommateurs qui, grâce à la technologie, sont aujourd'hui à même d'entreprendre: c'est l'émergence de la «me company». Le Web 2.0 est le lieu où se cristallisent des principes de coopération, qui sont ensuite repris dans le «monde réel» et qui définissent un nouvel esprit, empathique et volontaire: une nouvelle donne pour les entreprises qui doivent s'ajuster. Pour ne pas devenir des coquilles vides face à des consommateurs-créateurs, elles doivent apprendre à créer la confiance avec leurs consommateurs, partager leur savoir et leur capacité de contrôle. Elles doivent tenir un rôle de facilitateur de la circulation d'idées et d'émotions... pour leur propre bien, non seulement en termes d'image mais aussi en termes de capacité d'innovation: le partage et l'enthousiasme créent ainsi l'invention!
DOMINIQUE WEIZMAN, DIRECTEUR GENERAL DE DEZINEO