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«Au-delà d'une voiture, nous souhaitons vendre de l'émotion»

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Créée en 1959, la Mini vient de fêter ses 50 ans. Emmanuel Bret, directeur de la marque, revient, pour Marketing Magazine, sur cette année de festivités, sa stratégie et ses nombreux projets pour 2010.

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Marketing Magazine: Comment s'est passée l'année 2009 ?

Emmanuel Bret : Les deux premiers mois ont été très difficiles. A cause de la conjoncture, mais aussi pour des raisons liées à notre organisation. En 2008, nous avons restructuré notre réseau de distribution. Cela nous a contraints à passer de 260 à 112 points de vente, tandis que nous avons renforcé nos Mini Stores dédiés à la marque. 90 % d'entre eux étaient prêts fin 2009 et 100 % le seront courant 2010. Concernant nos produits, nous avons été confrontés à une rupture de stock sur la gamme Cabriolet. Plus exactement la production avait été arrêtée en août 2008 et les nouveaux cabriolets n'arrivaient qu'en mars 2009. Ces quelques difficultés passées, à la fin 2009, nous avons lancé nos séries collectors «50 ans» et célébré dignement notre demi-siècle. Depuis, nous connaissons des semaines record.

A quoi attribuez-vous cette reprise ?

Tout d'abord, notre gamme est désormais très complète. De plus, même si la crise n'est pas finie, nous sommes un peu plus rassurés. Fêter les 50 ans de la marque a aussi largement participé à la bonne santé de la Mini. Enfin, nous avons beaucoup développé nos Mini Stores. Ces lieux étonnants, entièrement de couleur noire, dans l'ambiance de la Mini, attirent du monde.

Ces Mini Stores ont-ils autant d'importance dans d'autres pays ?

La France compte, avec les EtatsUnis, le plus grand nombre de Mini Stores. Nous en possédons aujourd'hui plus de 90 dans le monde et nous en aurons 112 à la fin de l'année.

Pourquoi avoir initié ces points de vente ?

En 2001, nous avons lancé la Mini, non comme une voiture mais comme un produit, sans connaître vraiment la réaction du marché. Nos prévisions de vente pour le monde étaient fixées à 100000 voitures. Aujourd'hui, nous avons déjà produit entre 230 000 et 240 000 voitures dans le monde. Nous avons totalement pulvérisé nos objectifs les plus ambitieux. Pour cela, il nous fallait un lieu d'expérience qui soit complètement dédié à Mini et non à BMW, car les deux marques ne partagent pas les mêmes valeurs. Les Mini Stores sont de vrais showrooms, séparés de BMW, avec les codes couleur de la marque. Dans ces lieux, nous pensons Mini, nous réfléchissons Mini, nous vivons l'expérience Mini. Et, depuis leur ouverture, nous avons retrouvé de très beaux chiffres de conquête. Grâce à toutes ces initiatives, nous savons que le potentiel de Mini est encore sous-développé.

Quels sont vos concurrents ?

Nous considérons que nous n'avons pas de concurrent parce que nous sommes la seule petite voiture de luxe sur le marché. Jusqu'à ce que Mini arrive, le secteur de l'automobile était assez basique : une petite voiture n'était pas chère, une voiture moyenne était vendue à prix moyen et une grande voiture était très chère. Mini est alors arrivée avec une stratégie de luxe où la taille n'a aucun lien avec le prix. Notre voiture, qui coûtait deux fois plus cher qu'une Twingo ou qu'une Fiat 500, a suscité des interrogations. Or, tout a très bien fonctionné car le produit est extrêmement qualitatif et nous nous sommes concentrés sur l'ADN du produit, sur son design et ses partis pris forts.

Par exemple ?

Nous sommes restés fidèles à la petite voiture, certes avec ses qualités, mais surtout avec ses défauts, à l'instar des suspensions un peu dures. Reste que cela lui donne sa tenue de route et la sensation de conduire un kart. Nous avons conservé la petite taille de la voiture d'origine, tout comme son petit coffre. Nous avons également décidé que la Mini serait une traction. Pour tous ces éléments, nous sommes partis d'une feuille totalement blanche.

Vous avez également choisi de maintenir son prix... élevé.

Oui. Nous vendons plus cher mais nous avons respecté tous les codes de la marque. A cela nous avons ajouté la qualité de fabrication de BMW. Additionnez le tout et vous obtenez un produit qui va au-delà d'une marque automobile. Mini est devenu un produit «life style» et de luxe.

Quelle est votre cible ?

Nous avons différentes cibles. Tout d'abord, les PMTS (Post Modern Trend Setters). Ce sont des leaders d'opinion, dont beaucoup gravitent autour du domaine de l'art. Ces personnes communiquent et savent quelles sont les grandes tendances de fond de la société. Elles réagissent souvent favorablement aux marques emblématiques. Nous avons même réussi à être reconnus par cette cible comme faisant partie des marques iconiques. Plus généralement, notre cible est composée à 70 % de femmes, mais nous sommes arrivés à nous faire très bien accepter des deux sexes.

Comment ?

Encore une fois en travaillant beaucoup sur le produit et sur la communication. Nous avons beaucoup communiqué sur des cibles masculines, tout en sachant que nous avons d'emblée une acceptation assez naturelle de la part des femmes. Leur reconnaissance a été immédiate. Nos campagnes en presse ont donc principalement été orientées vers des titres masculins et généralistes.

Vous développez également une large gamme de produits connexes.

Oui. Nous avons initié des partenariats avec des marques telles que Mandarina Duck pour les bagages, Onitsuka Tiger pour les chaussures ou Smeg pour l'électroménager. Nous fabriquons nous-mêmes certains autres produits... Des clients viennent même acheter des teeshirts ou des chaussures siglées Mini, simplement parce que ce sont des produits branchés. Nous allons d'ailleurs ouvrir dans les prochains mois un brand store de 800 m2 à Paris, dans le VIe arrondissement. Ce magasin représentera tout l'univers de la marque life style et automobile.

Vous avez fêté vos 50 ans avec deux collectors et de belles opérations. Etait-ce important de marquer l'événement ?

Mini est un produit historique, qui a un futur. C'est un produit jeune, qui a tout de même 50 ans. Il était donc important de le fêter comme il se doit. Nous avons, pour l'occasion, lancé deux voitures collectors : la Mini 50 Mayfair - un hommage à la Mayfair de l'époque - et la 50 Camden, une vision du futur. Toutes les deux ont été des succès absolus en 2009. Du point de vue événementiel, nous avons fêté cet anniversaire à la piscine Molitor, à Paris. Toute notre communauté s'y est rassemblée pour une fête unique. L'idée était de trouver un lieu peu connu. Nous avons aussi été les premiers à inaugurer le Showcase, puis les premiers à lancer un restaurant Mini au Petit Palais. Ce restaurant, fermé depuis mai 2009 pour travaux, ouvrira à nouveau ses portes dans les prochaines semaines.

Pourquoi avoir choisi la Fiac pour clore ce 50e anniversaire ?

Nous avons pris le parti d'être là où se génèrent les idées du futur. La Fiac, dont nous sommes partenaires depuis trois ans, en est un fabuleux exemple. Dans ce cadre, nous ne sommes pas qu'une voiture mais un produit d'avant-garde. Le lieu colle donc avec notre produit. Le modèle Clubman [le break, NDLR] y a d'ailleurs été lancé il y a trois ans, lors de notre premier partenariat.

Comment se porte le Clubman ?

Très bien ! Nous en avons vendu plus de 4 500 en 2008, entre 3 500 et 3 800 en 2009. C'est un très bon produit complémentaire qui a trouvé sa place.

L'an dernier, vous aviez évoqué le lancement de la Mini 4 x 4 Crossover. Où en êtes-vous ?

Nous allons, en effet, dévoiler notre Crossover au logo Mini, en mars prochain, au salon de Genève. Ce modèle, qui mesure 4 m 10, est à mi-chemin entre un petit monospace et un 4 x 4. Ce vrai cinq places (quatre portes et un coffre) sera disponible en deux roues motrices et quatre roues motrices. L'idée est d'explorer d'autres univers tout en respectant l'esprit de Mini.

A qui sera destinée cette voiture et quand sera-t-elle lancée ?

Nous serons les premiers à offrir un crossover premium pour les familles. Lancée en septembre prochain, elle sera utilisable en ville mais également pour de longs trajets.

Qu'en est-il de votre projet de voiture électrique ?

Il devrait être lancé fin 2010. Une cinquantaine de véhicules seront disponibles en flotte, dont 25 destinés à des clients ayant postulé sur Internet. Ces voitures «zéro C02» seront proposées à la location pour six mois à un an, avec une offre tout compris. Pendant la durée de la location, les clients nous donneront un retour avant que nous commercialisions réellement le modèle.

Vous lancez là une étude en condition réelle ?

Les clients devront, en effet, nous donner régulièrement leur perception du véhicule, nous faire part de ses avantages et de ses inconvénients. C'est une grosse révolution et il nous faut regarder ce que cela donne concrètement au quotidien. Nous connaîtrons le nombre de kilomètres parcourus par jour, leur manière d'utiliser le véhicule, de le garer et ce, en fonction de leur lieu d'habitation. C'est une étude «en live».

Cette expérience est-elle franco-française ?

Nous avons déjà initié une période de test aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne, en Allemagne... mais la réflexion est si grande et les infrastructures nécessaires tellement importantes que nous avons choisi de regarder ce que ce modèle donne en conditions réelles.

Pourquoi avez-vous cette ambition de décliner autant la Mini ?

«Le projet de la Mini électrique devrait voir le jour fin 2010.»

Nous avons voulu confirmer que nous sommes maintenant une marque à part entière. Il fallait faire entrer dans la gamme d'autres voitures qui ne sont pas des Mini mais qui en ont néanmoins le logo.

Mini a les mêmes clients qu'Apple. Quels sont les points communs des deux marques ?

En effet, quasiment tous nos clients possèdent un iPhone. Souvent, ceux qui achètent Apple raisonnent par marque et les griffes représentent leur style de vie. Cette cible est donc très attachée aux marques icônes ou mythiques. Quand on achète un iPhone, on achète bien plus qu'un téléphone. On accède à un univers. Il en est de même pour notre produit. Même si certains de nos clients n'ont pas plus d'affinités que cela avec l'Automobile, il leur faut une Mini. Plus qu'une voiture, ils achètent une marque.

Avez-vous un club Mini ?

Nous n'avons pas créé de club spécifique, car Mini est une marque qui vit par elle-même. Je n'ai pas envie de donner un côté marketing et officiel à ce rassemblement. En revanche, il existe un club créé par des possesseurs de Mini, qui est très bien fait.

Vous avez souvent rapproché la Mini d'un style de vie.

La Mini suscite la bonne humeur, la joie de vivre et une volonté de partager. Les clients de Mini font donc partie d'une communauté. Comme le sont, par exemple, les possesseurs de Harley Les conducteurs de Mini se retrouvent souvent dans des villes pour partager une passion commune. Ce n'est qu'une voiture et pourtant le produit est devenu mythique, une véritable icône.

Vous êtes très présents en télévision, en affichage et en presse. Qu'en est-il du Web ?

Nous avons un site très représentatif des valeurs de la marque. Mais du point de vue de la communication sur le Web, nous avons, en France, une stratégie assez spécifique, puisque nous ne communiquons plus depuis deux ans sur ce média.

Pourquoi ?

Il me semble que les internautes sont trop sollicités par les bannières. Internet n'a pas pris la position leader des médias comme certains ont pu le penser. Concernant la Mini, qu'on le veuille ou non, la presse et la télévision sont des canaux incontournables et extrêmement puissants. Internet n'est donc que complémentaire. Et notre présence en télévision est nécessaire en termes d'impact. Nous avons donc coupé nos investissements web. D'autant que mes homologues allemands, britanniques ou américains investissent largement la Toile. La France en profite forcément.

Quels sont vos projets pour 2010 ?

Au-delà de la voiture, nous souhaitons continuer à vendre de l'émotion et de l'expérience. Ce qui est finalement assez rare dans l'Automobile. L'ouverture de notre brand store sera donc un gros événement dans les prochains mois. Puis, nous allons étendre notre offre au Crossover et à la Mini électrique au dernier trimestre.

Parcours

42 ans, marié, 4 enfants
Depuis juin 2005 directeur France < marque Mini au sein de BMW Group Fr où il a effectué toute sa carrière.
2002 - 2005 Marketing Communication Manager.
2000 - 2002 Responsable du service ventes - et marketing véhicules d'occasion.
2000 Responsable du service promotion des ventes Rover/Land Rover.
1998 - 2000 Chef de district région Centre, puis Paris.
1994 - 1998 Assistant marketing, puis délégué commercial accessoires et pièces de rechange région Nord et Est.

Formation

1991 Licence de droit des Affaires à l'université Paris-II Assas.
1994 ESC Marseille / Euromed, spécialisation marketing.
2006 Formation en management d'entreprises à l'IMD Lausanne.

 
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AVA ESCHWEGE

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