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Produits culturels la révolution sur Internet

Publié par La rédaction le

Produits à forte teneur informative, relativement peu implicants et facilement digitalisables, les livres et les disques ont très vite investi l'univers du commerce électronique. Aujourd'hui, les sites marchands d'articles culturels font florès. Pas encore au point de bouleverser les donnes du marché, mais sans doute suffisamment pour susciter des réflexions stratégiques sur la gestion de portefeuilles clients de plus en plus fournis. Cataloguistes ou adeptes exclusifs du Web, les entreprises se doivent de mettre en oeuvre des stratégies de fidélisation adaptées à une population on ne peut plus volatile.

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Le premier site marchand en France est un site de produits culturels. Fnac.com, lancé en décembre 1999 (ou plutôt rebaptisé, puisque fnac.fr existait depuis 1997), compte plus d'un million de références, recense entre 40 000 et 50 000 visites par jour, a réalisé un chiffre d'affaires 1999 de 42 millions de francs et vise un objectif 2 000 de 100 MF. Le site se veut un "magasin multispécialiste", à l'image des 53 points de vente de l'enseigne, et devrait bientôt ouvrir une boutique "matériel" afin d'intégrer sur le Net l'ensemble de son offre magasins. Mais fnac.com reste avant tout une entreprise de vente à distance de produits culturels : 650 000 livres, CD, DVD, vidéos auxquels s'ajouteront bientôt 400 000 disques importés. Le fait que le produit culturel ait trouvé sa place au sommet du podium de commerce électronique, ne doit rien au hasard. Certes, le groupe PPR a investi quelque 300 millions de francs dans la mise en place du site, espérant un équilibre financier vers 2004. Mais livres et disques constituent sans aucun doute les produits les mieux adaptés à la vente sur le Web. Pourquoi ? Parce qu'aisément digitalisables, à fort contenu en information, et à relativement faible valeur d'implication.

LE WEB, PAR-DELÀ L'IMAGE


De fait, Internet est aujourd'hui le média dans lequel les entreprises de VAD de produits culturels investissent. Y compris celles dont l'image n'est pas franchement porteuse d'un modernisme effréné. Il est à cet égard intéressant de constater que France Loisirs, fait partie des premiers à avoir mis en oeuvre un site marchand. Ce, il y a plus de deux ans. Site dont la vocation de départ se cantonnait à de la prise de commande, et qui affiche aujourd'hui des objectifs plus étendus : « Nous sommes un club, nous nous positionnons comme tel. Internet, par sa dimension communautaire, informative et interactive, constitue un moyen sans pareil pour donner du contenu à un club », affirme Valérie Pelissier, directeur marketing clients de France Loisirs. Le 14 février dernier (date de la Saint-Valentin, ça ne s'invente pas...), Harlequin Enterprises lançait en Amérique du Nord le site e-harlequin.com, adossé au portail women.com. Caractéristique majeure de ce site : il dépasse largement le seul espace marchand, se présentant avant tout comme un site féminin. Devant le succès remporté par e-harlequin.com, le groupe Harlequin entend lancer en Europe un produit Internet, aux ambitions également plus larges que l'e-commerce. « Nous avons déjà en France une expérience de site purement marchand, initié en association avec le site de Catalogue Service, à l'occasion de la Fête des mères. Nous nous sommes rendus compte que les deux tiers des commandes étaient passées hors de France. Or, si nous devions expédier à l'autre bout du monde des livres d'une valeur oscillant entre 19 à 36 francs, nous serions vite dans une situation critique », remarque Nathalie Bachelier, directrice marketing direct de Harlequin. Pour l'heure, la société se refuse à dévoiler la moindre indication quant à la date de lancement et au contenu éditorial du projet européen. En attendant, Harlequin SA, filiale à 50/50 d'Hachette Livre et du groupe canadien Harlequin Entreprises devrait ouvrir dès ce mois de novembre un petit site institutionnel, harlequin.fr. L'un des atouts majeurs de l'éditeur est, sans doute, sa couverture. En France, avec 800 000 colis par an, un million de livres vendus par mois et des vagues de mailings, Harlequin a en main un dispositif de communication hors pair. Puisque le produit culturel se prête si bien à la vente à distance électronique, certaines entreprises ont choisi de ne vendre sur le Net que du produit culturel. Lancé en France en février 1999, bol.fr n'a, selon des dirigeants, pas d'autre finalité. Pour Anne Yannic, directrice générale, la vente de livres en ligne est riche de perspectives : « On estime que la vente de livres par Internet représente 0,3 % du chiffre d'affaires de l'édition en France. Il s'agit en fait d'un marché très lié au taux d'équipement et aux habitudes d'achat en ligne. Il ne peut donc que se développer. »

LEVER LES PRINCIPAUX FREINS


Le livre reste par ailleurs un produit très prédictible. Il mène donc par lui-même le frein le plus solide au développement de la vente à distance : l'impossibilité de voir, de toucher, d'essayer le produit avant l'achat. Un inconvénient exprimé, selon une étude Cofremca-Sociovision, par 85 % de la population. Or, le livre constitue sans aucun doute, dans la grande majorité de son offre, l'un des produits que l'on n'a pas expressément besoin de voir ou de toucher avant de l'acheter. La clientèle de bol.fr est en grande majorité constituée de grands liseurs, qui dépassent largement, par leur profil, l'internaute type. « Et heureusement, souligne Anne Yannic. Les internautes ne sont pas spécialement de grands amateurs de lecture. » La filiale de Bertelsmann et Havas compte un tiers de sa clientèle en province, un tiers à Paris et un tiers à l'étranger, avec une proportion féminine de plus en plus importante puisqu'elle est passée en moins d'une petite minorité à 50 %, et qu'elle devrait, selon toutes les prévisions, croître davantage. En ce qui concerne bol.fr, la décision de ne vendre que des produits culturels est également liée à la nature de l'actionnariat. Filiale de Bertelsmann à l'échelle européenne, bol.fr est, en France, une joint venture à part égale entre le géant allemand de l'édition et Havas. « On ne vend pas des livres comme on vend des petits pois. Il y a toute une stratégie spécifique de mise en valeur et d'accompagnement », remarque Anne Yannic. Par ailleurs, selon Aujourd'hui, bol.fr référence quelque 470 000 livres et 100 000 cd et devrait bientôt étendre son offre à la vidéo, au DVD et au CD-Rom. Chapitre.com va plus loin dans la limitation de l'offre à un segment de produits : « Nous vendons du livre et exclusivement du livre. Nous nous définissons comme des vépécistes, mais aussi comme des libraires », affirme Catherine Johnston, responsable marketing de chapitre.com. Qui dit libraire dit conseil. Et, à en croire le discours tenu dans cette entreprise indépendante, le conseil paye : 8 000 visites enregistrées chaque jour, avec un taux de transformation de 4 % et un panier moyen évalué entre 280 et 300 francs. Alapage a fait un autre choix : celui de l'ouverture à d'autres produits. Produits culturels bien sûr, qui constituent le coeur de son offre, mais aussi produits blancs, produits bruns, cadeau... Avec deux approches bien distinctes : « Pour les livres et les disques, nous recherchons l'exhaustivité. Pour les autres catalogues, la sélectivité », précise Patrice Lozé, directeur général d'Alapage.

EN ATTENDANT AMAZON.COM...


C'est dans la marge entre l'exhaustivité et la sélectivité que va se définir la configuration du marché. « Le ticket d'entrée sur ce marché de la vente en ligne de produits culturels est aujourd'hui extrêmement élevé. Il n'existe pas de base de données recensant les livres disponibles sur le marché », remarque Anne Yannic (bol.fr). Il n'est pas anodin de relever que, jusqu'à une période récente, fnac.com et chapître.com louaient la base de données d'Alapage, qui est aujourd'hui un concurrent de poids. De ce fait, l'écart entre les gros et les petits acteurs du marché devrait sans doute s'accroître. Aujourd'hui, le commerce électronique de produits culturels en France se partage entre quelque 25-30 petits acteurs et trois grands sites, fnac.com, alapage.com et bol.fr. Un triptyque que devait perturber l'arrivée prochaine (prévue pour septembre selon la rumeur) sur le marché français d'Amazon, dont les responsables optaient encore en juin pour un mutisme total. Il est vrai que la plus grande librairie en ligne au monde connaissait ces deniers mois des déconvenues boursières, susceptibles de retarder le projet d'implantation. Quant à l'hypothèse de rapprochement entre les quatre gros, elle semble hasardeuse : fnac.com a été lancé dans le giron du groupe PPR, bol appartient à Bertelsmann, Alapage a été racheté par France Télécom Multimédia fin septembre 1999 et Amazon est en soi un géant. Pour l'heure, les stratégies mises en place par les compétiteurs relèvent clairement de la course à la part de marché : « Nous voulons être de plus en plus gros. Investir beaucoup et vite, en étant parfaitement conscients que la rentabilité est pour plus tard », résume Anne Yannic. La taille, telle est bien l'obsession des principaux acteurs du marché. Alapage.com annonce 2,5 millions de références, affiche un chiffre d'affaires 1999 de 14 millions d'euros et revendiquait en juin dernier 200 000 commandes passées depuis le lancement du site en 1996. L'adossement à de grands groupes apporte, non seulement, le soutien financier nécessaire à des entreprises extrêmement coûteuses, mais constitue également un atout stratégique important. En termes d'image et de force de conquête. En entrant dans le giron de Wanadoo, Alapage et ses différentes marques, alapge.com, marcopoly.com et librissimo.com, bénéficient d'une visibilité hors pair sur la Toile. « Nos clients savent que nous sommes une filiale de France Télécom. Cela les rassure, notamment pour des questions de facturation et de back-office », avance Patrice Lozé. La filiale e-commerce de Wanadoo bénéficie par ailleurs de synergies techniques de taille, comme un site Wap développé en partenariat avec Itinéris et le bouquet voila.com. Quelle que soit leur taille, les sites marchands de produits culturels affichent tous, peu ou prou, des visées européennes. Bol.fr est sans doute, en matière de vente à distance de produits culturels, le paradigme de l'entreprise internationale. Présent dans 13 pays, le site d'e-commerce de Bertelsmann dispose d'une version japonaise depuis le 27 juin dernier, et devrait prochainement être accessible aux internautes sud-américains et est-européens. Dans l'entreprise internationale bol, le développement technique se trouve à New York, les serveurs en Allemagne, les contenus éditoriaux dans chaque pays d'implantation. La dimension internationale offre à bol.fr des perspectives en termes de services, d'offres et de modes-mêmes de vente. La société travaille par exemple de manière soutenue au développement de l'achat par téléchargement. Une étape de plus dans le virtuel : il ne s'agit plus d'acheter du contenant, mais d'acheter un contenu éditorial numérisé. Le livre comme le disque se prêtent particulièrement bien à ce type de commerce.

LES PERSPECTIVES DU TÉLÉCHARGEMENT


Intérêt pour le public : les livres virtuels coûtent 20 à 70 % moins cher que leurs homologues papier. Barnesandnoble.com devait lancer en août le plus gros service de vente de livres électroniques en coopération avec Microsoft. Quelque 2 000 titres devaient ainsi, dans un premier temps, être disponibles par téléchargement ou par impression à la demande. Pour le libraire américain, qui affiche des pertes financières importantes, il s'agit ici de reprendre de l'altitude notamment face à Amazon. S'il investit lourdement dans ces procédés et dispose d'un rayon e-book très prisé, Barnes & Noble est aussi un partenaire important de bol. Le groupe Havas étant également entré dans une logique de numérisation des fonds, Bertelsmann étudiant lui aussi ces technologies de près, bol devrait bientôt proposer une offre construite autour du téléchargement. La dimension internationale de l'entreprise est ici déterminante, car les investissements en jeu sont proprement colossaux. Selon Barnes & Noble, le téléchargement devrait représenter 10 % du marché du commerce de livres en ligne dans les trois ans. De même chez France Loisirs, autre filiale de Bertelsmann et d'Havas, le téléchargement est à l'ordre du jour. « Nous avons déjà lancé le livre interactif. Nous réfléchissons également à des offres comme le livre personnalisé », souligne Valérie Pelissier (France Loisirs). Fnac.com a déjà franchi le pas en matière de téléchargement musical, et observe de près le marché du e-book. Quant à Alapage, il pourrait lancer son offre dès ce mois de septembre. « Nous préparons une offre complète livres et disques. A court terme, le téléchargement ne devrait pas bouleverser le marché et l'approche des différents acteurs. Mais les choses vont très vite. Et il s'agit de ne pas être en retard », souligne Patrice Lozé. Le téléchargement est une technique vers laquelle tous les acteurs du marché vont nécessairement s'orienter, et qui offre à la vente à distance des ressources radicalement nouvelles en matière de services. On peut en effet imaginer une énorme souplesse dans la quantité des contenus disponibles (une page de livre, une plage de CD), mais aussi dans les formules de commercialisation : achat, location, abonnemen... A quoi s'ajoutera la rapidité de transaction : plus de produit matériel, plus de logistique, plus de transport, plus de frais postaux. Du commerce en temps réel de bout en bout. Souplesse, réactivité... autant de facteurs qui devraient sensiblement optimiser la relation avec la clientèle. Les produits culturels pourraient ainsi faire office de fer de lance dans l'évolution de la vente à distance vers une ultra-personnalisation des contacts. Un avis en tout cas soutenu par France Loisirs. Synergie oblige, le catalogue et le site du club fonctionnent sur les mêmes schémas commerciaux : un engagement sur la commande de huit livres en deux ans ou d'un livre par trimestre sur deux ans.

 
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