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Géomarketing : mature, mais pas assez démocratisé 2/3

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L'arrivée récente des données Iris 2000 de l'Insee donne un coup de fouet aux outils géomarketing. L'offre se segmente, se précise, et les entreprises commencent à évaluer toutes les possibilités de cette technique qui allie cartographie et marketing. En s'appuyant sur les bases de données statistiques et comportementales, les logiciels et autres systèmes d'information géographique (SIG) sont de plus en plus perfectionnés.

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Les données socio-démographiques : pour la pertinence


Une fois dotés de solides fonds de cartes, précis et détaillés, les utilisateurs du géomarketing doivent ensuite trouver les données intéressantes à afficher sur ces cartes pour que les études marketing soient pertinentes. Première source d'informations : les bases internes. On trouve ensuite les données socio-démographiques de l'Insee, dont les fameux Iris 2000 basés sur le recensement 1999 (voir aussi Marketing Direct n° 45). Très attendus par les professionnels, ces Iris sont des fonds cartographiques numérisés associés à des données issues du recensement 1999. Ces cartes avec contours regroupent des îlots de 2 000 personnes dans les communes de plus de 10 000 habitants et de 5 000 pour toutes les autres. Quatre bases de données sont ainsi disponibles : les tableaux Iris 2000 (base France entière ou bases régionales), dotés de 17 000 indicateurs par Iris et communes ; les tableaux îlots, avec 110 indicateurs à l'Iris 2000, dont quinze à l'îlot ; les tableaux territoires, avec 17 000 indicateurs pour chacun des grands zonages : France, régions, départements, zones d'emploi, unités urbaines de plus de 10 000 habitants, aires et pôles urbains, communes, centres des pôles urbains. Le fichier logements décrit chaque logement selon environ 20 critères. Au 25 mars dernier, trois revendeurs des fonds numérisés des Iris 2000 étaient agréés par l'Insee : Asterop, Claritas et GeoConcept. Ce sont ces bases de données, entre autres, qui font monter la note sur les projets de géomarketing. Car, si un logiciel de SIG va coûter environ 15 000 francs (voir encadré), une base comme les tableaux Iris 2000 (base nationale) vaut déjà 332 000 francs, avant que le revendeur n'y ajoute sa marge commerciale. A côté de ces acteurs institutionnels, il existe des prestataires privés qui proposent leurs bases de données comportementales, enrichies grâce à des questionnaires envoyés en masse dans les foyers. Consodata est l'un d'entre eux. Sa mégabase réunit 3 millions de foyers qualifiés sur 2 500 critères en moyenne. L'échantillon de foyers pour les approches géomarketing est de 1,2 million. Sur les deux vagues d'envois postaux d'environ 18 millions de questionnaires, Consodata reçoit 300 000 réponses renseignées. « Cette taille d'échantillon permet une analyse fine des marques, des marchés et du taux de pénétration par famille de produits », explique Alain Renaudin, directeur du pôle études.

Des mégabases comportementales aux solutions globales


L'offre de Consodata en matière de géomarketing, c'est, par exemple, Consotrade, qui autorise une information nationale et locale, avec des profils de clients et de prospects, des taux de pénétration sur les clients fidèles. Il est principalement destiné aux enseignes de la grande distribution et à leurs fournisseurs, les fabricants de PGC (produits de grande consommation). Mais ce logiciel, qui coûte aux alentours de 200 000 francs, peut aussi servir à d'autres types d'entreprises en réseau, comme les banques. « Il est possible d'établir une typologie des zones sur la base des profils de clientèle, puis de faire un hit-parade du taux de pénétration des produits financiers auprès des populations locales », précise Alain Renaudin. Consodata a travaillé avec IRI Sécodip pour établir cinq grands groupes de zones de chalandise. Par ailleurs, la société propose IsaPlanning, outil servant à optimiser les actions de distribution d'imprimés sans adresses (ISA) Autre acteur historique de ce marché des mégabases : Claritas. Cette société d'origine américaine revendique l'invention des premiers concepts du géomarketing par Jonathan Robbin, sociologue, qui a posé les bases de cette discipline dès 1961. « Le premier modèle socio-comportemental, Prizm, a eu un gros succès au sein de la population américaine », affirme Marina Dédéyan Taïb. Après s'être dénommée Calyx, la filiale française coédite et distribue de manière exclusive le logiciel de SIG MapInfo, suite au rachat d'ADDE en 1999. Plus qu'un vendeur de logiciels, Claritas se positionne comme offreur de solutions globales de géomarketing, depuis les données jusqu'au conseil. Parmi ces solutions, on peut évoquer MapInfo Professionnal, station de travail complète, qui vaut 12 950 F HT pour une licence. On peut lui adjoindre des modules, tels que ChronoMap (calcul de zones isochrones), ChronoVia, optimisation de tournées, VerticalMapper (analyse 3D), etc. Pour la diffusion des données via Internet et Intranet, Claritas propose MapXtreme, disponible en deux versions : NT ou Java Edition, MapX étant le composant ActiveX (technologie Microsoft) pour les applications client/ serveur sous Windows. Le référentiel cartographique se nomme AdressMap-Géocode. Les Iris 2000 de l'Insee sont également disponibles. « Ce sont des cartes de contours d'excellente qualité », reconnaît la responsable marketing et communication. Au niveau des applications verticales, sont proposées par Claritas : StorePlanner, pour les industriels de la grande consommation, qui va servir d'argument aux forces de vente face à leurs interlocuteurs de la grande distribution ; Key Account Assistant, pour les category managers et responsables de comptes clés ; Décisionnel Sectorisation, solution d'optimisation du territoire commercial et des forces de vente. La société offre également des "e-services", dont eGeocoder (géocodage en ligne de fichiers d'adresses), eRapport (analyse en ligne de zones de chalandise), etc. Enfin, Claritas participe à l'OpenGIS Consortium avec Microsoft, Oracle Sun et IBM pour définir des normes pour les systèmes d'information géographique. Côté données, la mégabase recense les habitudes de consommation de 4 millions de foyers (10 millions de consommateurs), sur 2 000 critères. Une solution réunissant données, développement, cartographie, logiciel et études géomarketing peut valoir de 60 000 francs à 5 millions de francs. Le géomarketing pèse aujourd'hui 40 % du chiffre d'affaires de Claritas. « Il s'agit d'un marché en plein essor, mais il faut bien connaître les problématiques sectorielles », estime Marina Dédéyan Taïb.

Trois SIG majeurs


En France, figurent dans la catégorie des éditeurs de SIG (que l'on assimile souvent à l'ensemble du géomarketing) : Esri et son logiciel ArcView, MapInfo, coédité donc et distribué par Claritas France, GéoConcept et le produit du même nom. Pour Esri France, qui revendique l'antériorité en matière de SIG, il existe deux types d'applications géomarketing : opérationnelles et de communication. Les premières se présentent sous la forme d'un logiciel bureautique, qui remplit plusieurs fonctions : analyses de marché (zones de chalandise, types de clientèle) ; prospection (par ciblage) ; analyses de concurrence ; optimisation commerciale et simulations d'implantations. Le second type d'applications permet de communiquer et partager ces données, aujourd'hui via le réseau Internet. « Depuis deux ans, il existe des tableaux de bord intégrant les cartographies que l'on peut transmettre via Internet, un Intranet ou un Extranet », précise Fabrice Phelep, ingénieur technico-commercial. Cette application on line s'appelle ArcIMS (pour Internet Map Server). Elle se place sur un serveur qui se charge de publier des cartes avec tableaux de bord, dans lesquels il est possible d'intégrer des informations, les sélectionner et effectuer des requêtes. La version client léger utilise un browser classique, avec des images Gif. La version client Java permet de rapatrier les données sur son ordinateur pour ensuite les modifier ou les mettre à jour. « Le système peut anticiper et télécharger de lui-même les zones limitrophes », s'enthousiasme Fabrice Phelep. Destinée aux directeurs marketing ou informatique, cette application bénéficie de journées d'assistance pour aider le client à l'intégrer dans sa base de données et faire les premières analyses. Ce service est facturé en plus du prix de la licence du logiciel. A ce duo s'ajoute ArcPad, "SIG nomade" ciblé PDA (PocketPC et Windows CE pour l'instant)...

INVESTISSEMENTS : Le coût d'une solution géomarketing


Une solution géomarketing est composée de plusieurs postes plus ou moins onéreux. Le logiciel de SIG à proprement parler vaut entre 13 000 et 15 000 F, sans les multiples options qui peuvent faire monter les prix jusqu'à 50-70 000 F. Viennent ensuite les données à intégrer au système informatique. Là, tout est possible suivant les objectifs de l'entreprise. On peut débuter à 50 000 F pour aboutir à une note de plusieurs centaines de milliers de francs. Troisième composant : les prestations annexes. Conseil, études, accompagnement, formation : le coût de ces services diffère bien sûr selon la prestation demandée. Experian prend comme exemple une étude sur un point de vente de Toulouse. Celle-ci va demander de quelques jours à quelques minutes s'il existe une connexion directe à une base de données. Il en coûtera environ 10 000 F au propriétaire du magasin. Mais, s'il veut étudier 40 points de vente, et 20 de plus dans les six mois à venir, il devra payer le développement, l'accès direct à la base, la maintenance du système, le conseil. Total : autour de 500 000 F. Si l'enseigne veut étendre cette étude à la France entière, il lui faudra débourser plusieurs millions de francs.

DONNÉES : Accord entre l'IGN et TéléAtlas


TéléAtlas, société de cartographie privée, et l'Institut géographique National (IGN) ont signé un accord sur l'intégration de données géographiques IGN, dont certaines données de la base Géoroute, dans les produits cartographiques de TéléAtlas. Il s'agit d'un contrat d'exploitation de données, comportant la cession des droits, qui permettra à TéléAtlas de compléter son offre cartographique. Aujourd'hui, TéléAtlas revendique une base de données routières couvrant 51 % de la population française. Cet accord avec l'IGN permettra à la société de digitaliser l'intégralité du réseau routier français. La base cartographique sera également enrichie avec la numérotation des rues (adresses, habitations, bâtiments) pour toutes les agglomérations supérieures à 10 000 habitants. Par ailleurs, TéléAtlas annonce aussi un partenariat avec Maporama, "leader européen de la cartographie et de l'information géocentrique en ligne", d'après cette société. Il s'agit ici de réaliser une cartographie de l'Espagne mise en ligne par Maporama. Le portail maporama.com fournit aux entreprises ou aux particuliers des plans de villes ou des itinéraires via le Web.

DONNÉES : Un nouveau prestataire dans l'univers de la donnée localisée


Cartosphère est une filiale d'Esri France dont le métier est double, selon Mathias Fliti, responsable commercial : « Nous proposons une plate-forme européenne et mondiale de distribution de données localisées et l'édition de produits à valeur ajoutée à partir des bases des producteurs de données. » Ces derniers ont pour noms IGN, TéléAtlas, NavTech et GéoSignal. Par exemple, pour un client qui a besoin d'une solution géomarketing sur trois pays européens, sur certaines agglomérations et avec un géocodage à la rue, Cartosphère va identifier le besoin, regarder les logiciels à utiliser et définir les critères de la solution proposée. La filiale d'Esri France agit comme conseil et propose une expertise en données localisées, une diffusion de bases de données géographiques, des prestations d'assistance à la maîtrise d'ouvrage. Avec un chiffre d'affaires de 13 MF en 2000 pour quinze personnes, cette filiale est rentable et Cartosphere espère bien « voir son chiffre d'affaires évoluer de manière très importante en 2001 ». Enfin, un site (www.cartosphere.com) est en cours de création.

SOLUTION : Complex Systems passe le géomarketing au crible


Le spécialiste de l'analyse de données, Complex Systems, élargit le spectre de ses interventions vers le géomarketing avec la solution Crible. Développée avec Uniservices Informatique, spécialiste du traitement d'adresses en marketing direct, Crible se veut "une solution géomarketing à part entière, élaborée à partir des données socio-démographiques de la base Insee, utilisées au niveau local le plus fin". Crible permet de faire du scoring, c'est-à-dire d'attribuer une note à une cible en fonction de critères déterminés. Les applications sont diverses. « Sélection du Reader's Digest ou Dial s'en servent, par exemple, pour réactiver leurs clients inactifs. Ils nous confient un échantillon de leur clientèle, qui comprend seulement les adresses, et nous bâtissons un modèle de score à appliquer sur le fichier des inactifs », détaille Hélène Ivanoff, directrice associée de Complex Systems. Crible est élaborée à partir de données internes à l'entreprise, des données Insee et du fichier des anciens clients des 3 Suisses (5 millions d'adresses). Par exemple, Crible Adresses permet de louer des adresses VPC, sélectionnées à partir d'un score combinant plusieurs centaines d'informations socio-démographiques et sensibles aux produits de vente par correspondance. D'après Complex Systems, ce fichier 3 Suisses serait garanti avec un taux de NPAI de moins de 3 %. Pour faire fonctionner Crible, les deux sociétés associées ont besoin d'un échantillon de 10 000 clients récents avec identifiant, prénoms et adresses complets. Uniservices Informatique s'occupe du traitement des adresses et Complex Systems de la phase de modélisation. D'après Complex Systems, la réactivation d'inactifs coûte 20 centimes par adresse.

GLOSSAIRE : Le géomarketing décrypté


ASP : Application Service Provider, éditeur de logiciels qui propose d'héberger l'application sur ses serveurs contre le paiement d'un forfait pour les consultations. Base de données : Ensemble de données, classées par fichier, relatives à un thème déterminé et associées à un logiciel permettant leur entretien et leur utilisation efficace. Cartographie : Ensemble des études et des opérations - scientifiques, artistiques et techniques - intervenant à partir des résultats d'observations directes ou de l'exploitation d'une documentation, en vue de l'élaboration de l'établissement de cartes, plans et autres modes d'expression. Données cartographiques : Informations renseignant sur les objets observés à la surface de la Terre, y compris leur position géographique, leur forme et leur description. Géocodage : Traitement qui consiste à attribuer des coordonnées X et Y à des données qui ne sont pas dans un format spatial. Le géocodage par adresse postale, qui nécessite une carte des voies, permet d'attribuer aux coordonnées des adresses postales ainsi représentées par une série de points. Institut Géographique National (IGN) : Etablissement public, à caractère administratif, ayant pour vocation de réaliser l'équipement géographique de base du territoire national. Iris 2000 : Pour les communes de plus de 5 000 habitants, l'Iris 2000 est la zone géographique minimale, d'un seul tenant d'environ 2 000 habitants, définie par l'Insee, pour la diffusion à tous publics des comptages, listes et tableaux du recensement 1999 et du fichier logements. SIG : Système d'Information Géographique. Ensemble organisé intégrant différents éléments pour la saisie, le stockage, la manipulation et l'analyse de toutes les informations géoréférencées. Sources : IGN, Insee et GeoNet.

 
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Patrick Cappelli

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