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Fidéliser on line: du potentiel technique aux pratiques

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D'un clic, l'internaute papillonne d'un site à l'autre : comment capter un flux de clientèle régulier dans un univers où la volatilité est la règle ? La fidélisation puise ses racines dans la qualité de service et l'observation des comportements. Les outils de traçabilité et d'analyse existants permettent de collecter et d'étudier d'innombrables données sur les internautes. Reste à en extraire des typologies utiles pour la mise en oeuvre d'une communication segmentée et progressive.

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Le marché du marketing relationnel sur Internet attire un nombre croissant d'intervenants, d'origine "ancienne économie" ou nouveaux venus. Ceux-ci proposent des compétences en conseil, des bases de données e-mail, des applications de gestion des campagnes marketing, des prestations de routage, etc. Signe de l'ébullition de la sphère internet, selon le Benchmark Group (enquête du mois de juin 2001), le nombre d'e-mails marketing (commerciaux et relationnels) envoyés dans le monde double tous les six mois. La croissance des revenus du marketing direct issus de l'e-mailing a crû de 110 % entre les années 2000 et 2001 (source E-marketer, 2000). Plusieurs facteurs expliquent la surenchère d'offre sur la fidélisation on line.

Anne Browaeys (FullSix)

: "Quand l'argent pour recruter se raréfie, les entreprises investissent dans le développement de leur clientèle existante"



Le premier est frappé au sceau du bon sens : relancer les inactifs, les petits acheteurs, et fidéliser revient moins cher que recruter de nouveaux. Le krach de l'e-économie a contribué à mettre la fidélisation à la mode. « C'est mécanique, quand l'argent pour recruter se raréfie, les entreprises investissent dans le développement de leur clientèle existante », observe Anne Browaeys, manager associé chez FullSIX, ex-Grey Interactive. Ce n'est pas un hasard si des sites comme Fimatex (broker en ligne) cherchent à réactiver leur base d'inscrits inactifs ou ayant "omis" de renvoyer un ordre de bourse signé. D'où le lancement au mois de mai 2001 d'un mailing classique, proposant à ce segment de prospects de s'inscrire à l'Université maison qui dispense des formations à la gestion de patrimoine, à l'univers boursier et aux outils de la marque. Une offre destinée à étayer le changement progressif de positionnement : de simple intermédiaire financier, Fimatex a diversifié son offre en créant ses propres produits financiers. Cette logique n'est pas spécifique à la galaxie internet. Les vépécistes travaillent depuis longtemps l'activation de leur base de prospects. « Internet offre un potentiel remarquable comparé aux médias traditionnels, estime Marc Salomone, directeur nouveaux médias chez MacCann Relationship Management. Il est d'abord un outil de connaissance client très puissant via une démarche de tracking (suivi du comportement des internautes sur le site) et par la mise en oeuvre d'une politique d'acquisition de données déclaratives (quizz, sondages, tests produits). » Cette connaissance permet alors de prévoir des scénarios de traitements différenciés, tant en termes de contenu éditorial que sur le plan commercial.

Une possibilité de personnalisation à moindre coût


Le Web offre des possibilités de personnalisation à moindre coût (production et envoi), comparé au print, qui supporte des coûts fixes élevés pour des envois en petite quantité. « On estime que le coût d'un e-mail est entre 25 et 75 % moins élevé que celui d'un message papier en raison de l'absence de frais d'impression et de papier, d'un coût de reproduction quasiment nul et d'un faible coût d'envoi », raisonne Patrick Amiel, consultant chez Tribal DDB. Et, selon le cabinet Jupiter (2000), le retour sur investissement d'une campagne d'e-mailing ciblée est plus élevé que celui d'une campagne print. Le taux de réponse serait entre trois et dix fois plus important que le taux de réponse des méthodes traditionnelles de mailing. Comparé à une bannière publicitaire, le taux de transformation serait cinq fois plus intéressant. En permanence ouvert aux sollicitations des clients, le Web multiplie les opportunités de contact et donc de fidélisation. Sa dimension interactive et multimédia (son, vidéo, animations Flash) facilite la mise en place d'une relation.

Developpement de la valeur client


« Une stratégie de fidélisation doit s'appuyer sur deux leviers, respectivement le transactionnel et le relationnel », affirme Marc Salomone. D'un côté la logique ROI (return on investment) vise à développer le panier moyen en suscitant des ventes additionnelles et croisées (up selling, cross selling) et en augmentant les fréquences d'achat. De l'autre, le ROR (return on relationship) vise à créer de la préférence pour une marque (éviter l'attrition, utiliser ses meilleurs clients comme ambassadeurs). « La fidélisation est le stade ultime d'une relation qui passe d'abord par le recrutement des clients et prospects pour les faire entrer dans un cycle relationnel, une communication sur les bénéfices du programme, la collecte et l'analyse de l'information client en vue d'une segmentation de la base », détaille Marc Salomone. Ladite typologie permettra ensuite de mettre en oeuvre une stratégie et des actions marketing différenciées selon la valeur du client. Et son degré d'ancienneté : la marque planifie une relation d'apprentissage réciproque avec ses consommateurs. On ne parle pas de la même façon à un vieil ami et à une nouvelle connaissance et surtout, on ne lui "vend" pas les mêmes offres. Par exemple, le site d'information boursière Boursorama construit la progression de la relation en trois temps : conseils boursiers d'initiation, création d'une dépendance en diffusant des informations ciblées par société, puis proposition de création d'un portefeuille. « En pratique, les programmes de fidélisation on line peuvent être classés en trois catégories, qui peuvent être amenés à se superposer au fil du temps », poursuit Marc Salomone. La première regroupe les politiques d'animation de site qui consistent à engager une relation fondée sur du contenu éditorial (newsletter, mailing list). Cette communication est en général peu segmentée. La seconde, les programmes à points qui stimulent et rémunèrent le surf de l'internaute. Quel est l'intérêt des programmes dits de fidélisation à points (Maximiles, Webmiles,...) dont les membres sont rémunérés pour leur surf à l'intérieur d'une communauté de sites affiliés ? « Ce sont plutôt des mécaniques qui créent de la multifréquentation et jouent à la marge sur la dimension transactionnelle de la fidélisation, ce qui est secondaire par rapport à la capacité à proposer des services personnalisés et à insuffler de l'émotion », commente Marc Salomone. Pour sortir des controverses non chiffrées, le premier programme national, Maximiles (220 000 membres, 50 sites partenaires en France en juillet 2001) a fait réaliser un panel de mesure d'audience par NetValue, qui a enregistré et analysé le surf de 400 membres "volontaires" de Maximiles. Le but étant de mesurer l'influence du programme sur la circulation des membres entre sites partenaires. « Cette étude met en valeur l'existence d'une création de trafic et l'augmentation de la fréquence des visites », résume Thomas Chatillon, directeur général de Maximiles (voir encadré en page 58). Enfin, troisième catégorie, les programmes personnalisés qui diffusent des offres segmentées et contextualisées de contenus, de services, de produits. Ils gèrent différents niveaux d'avantages et de services en fonction de la valeur du client ou de son degré d'implication avec la marque. A l'intérieur de cette catégorie, figurent les clubs, en général réservés aux meilleurs clients.

Gérer des avantages stratifiés


Pour accroître le niveau d'implication des membres, certains clubs prévoient deux niveaux successifs de qualification et de service. Un premier niveau de qualification et d'enregistrement permet l'accès à une offre de services limitée. Un second niveau de qualification et de mobilisation de l'internaute ouvre l'accès à un club type VIP (privilèges à plus forte valeur ajoutée, contact direct avec des spécialistes de la marque, offres exclusives). Cette mécanique à deux temps a l'intérêt de programmer une intensification de la relation en fonction de la mobilisation de l'adhérent envers la marque. Première étape du cycle de fidélisation marketing : la collecte des informations. « Il est essentiel de se concentrer sur la collecte systématique des adresses e-mail de ses visiteurs, conseille Hervé Paolini, dirigeant de l'agence Direct One.

Hervé Paolini (DirectOne)

: "Ne laisser jamais repartir vos visiteurs sans demander leurs coordonnées".




Ne laissez jamais repartir vos visiteurs sans leur demander leurs coordonnées ! Pour mesurer votre performance dans ce domaine, mettez en place un indicateur de captation des flux : nombre de prospects identifiés/nombre de visiteurs uniques. Si votre indicateur est aujourd'hui de 10 %, cela signifie que 9 visiteurs sur 10 ne reviendront peut-être jamais vous voir ; et vous n'aurez aucun moyen pour les solliciter à nouveau. »

Capter des adresses pour accélérer la constitution de la base


Mais comment "aspirer" les adresses e-mail ? Pour inciter un prospect à laisser ses coordonnées, il faut lui proposer une offre attractive. Ainsi, par exemple, e-Cortal offre 1 000 francs d'actions en ligne ; le Crédit Agricole Ile de France propose de recevoir une newsletter personnalisée. « On observe que les meilleures offres off line, comme une remise immédiate, un cadeau, ou l'envoi d'un catalogue, fonctionnent également bien sur le Web », ajoute Hervé Paolini. Mais Internet permet aussi de diffuser des conseils, du contenu éditorial à moindre coût (des conseils boursiers gratuits, des idées recettes hebdomadaires,...). En pratique, un annonceur qui souhaite améliorer son ratio de captation des flux devra disposer différents capteurs de noms sur son site : de véritables "aspirateurs d'e-mails" qui vont accélérer la constitution de la base. L'emplacement idéal pour capturer l'adresse e-mail de ses visiteurs est la page d'accueil, sur laquelle il faut réserver à l'offre (elle-même porte d'entrée de la qualification) un espace suffisant et visible. Utilisez si possible une animation. Présentez une offre simple et forte, précisez en toutes lettres "Votre e-mail" et laissez un espace vierge pour la saisie. En dehors de l'emplacement dédié sur la home page, les fenêtres pop up - qui s'ouvrent après 1 ou 2 secondes - s'avèrent souvent très efficaces. Elles attirent l'oeil immanquablement, et permettent de récolter en moyenne cinq fois plus de coordonnées qu'une annonce statique. Pour qu'elle n'importune pas les visiteurs réguliers, il est possible de la programmer pour la présenter uniquement aux nouveaux visiteurs non-inscrits. « Il est conseillé de tester plusieurs emplacements avec la même offre et de ne conserver à l'issue de la période-test que le (ou les) emplacement(s) le(s) plus performant(s) », conclut Hervé Paolini. Sans oublier de suivre en permanence son ratio de captation des flux et de remettre en compétition au moins une fois par mois sa création en testant de nouvelles combinaisons offre/format/emplacement.

Données utiles


Mais le plus délicat est encore de collecter les bonnes informations. Grande est la tentation de mettre en ligne un questionnaire fleuve pour recueillir le maximum de données. Mais ce penchant a souvent pour inconvénient de remettre à plus tard une réflexion capitale sur la nature des informations vraiment utiles pour initier une communication segmentée. « Au début, un annonceur qui tâtonne un peu sur le profil de ses clients, aura tendance à collecter des informations dans tous les sens dans le but de les analyser et ensuite de se recentrer sur l'essentiel », reconnaît Anne Browaeys. Un questionnaire long a aussi l'inconvénient de faire fuir les internautes. Un nombre trop élevé de questions fait baisser le taux de remplissage. « Pour un des clients de l'agence, nous avons réussi à augmenter le nombre de questionnaires remplis de 35 % en éliminant l'information "date de naissance", qui n'était pas une donnée segmentante, raconte Hervé Paolini. Il vaut mieux avoir 100 prospects à travailler que 40 légèrement mieux qualifiés. Avant d'inclure une nouvelle question, demandez-vous quelle serait la réaction du prospect si vous la lui posiez par téléphone. Une fois le prospect dans la base, vous avez le temps et les bons prétextes pour revenir vers lui et obtenir des informations complémentaires pour mieux personnaliser la relation. »

Instauration d'un climat de confiance


Présentées clairement, les obligations juridiques liées à la collecte et à la conservation d'informations (possibilité d'accès aux informations communiquées, possibilité de sortir de la base, voire intention ou non de louer le fichier...) peuvent contribuer à instaurer un climat de confiance. « Le principal avantage du Web sur le print, à savoir la possibilité de mettre en oeuvre très rapidement des campagnes, a pu se retourner contre certains annonceurs un peu trop zélés ou peu regardant sur l'origine de leurs adresses. Une marque a tout intérêt à donner la possibilité à ses abonnés de choisir le rythme et le type d'informations qu'ils veulent recevoir, voire de se désinscrire », estime Antoine de Lasteyrie, l'un des dirigeants de l'agence FullSIX. Et, en location, les listes "permission" - des adresses dont les possesseurs ont accepté de recevoir des e-mails commerciaux - sont certes plus coûteuses (de deux à cinq francs par adresse) que certains fichiers aux origines douteuses, mais elles sont aussi plus performantes. Sur le Web, deux types d'outils permettent de personnaliser. D'abord de coûteux logiciels de personnalisation de contenu tels Vignette, ou BroadVision (chaque internaute bénéficie d'une page d'accueil personnalisée : contenu éditorial et/ou offres commerciales). Ils offrent la possibilité de proposer des services à vocation fidélisante ou des contenus qui accroissent les coûts de basculement (tentation de changer de fournisseur), pour reprendre les termes des auteurs de l'ouvrage, Les Nouveaux marchands du Net, Philipp Gerbert, Philippe Kaas et Dirk Schneider, trois consultants spécialisés dans les stratégies sur le Web (First Editions).

Les bénéfices du jardin virtuel...


Parmi les applications les plus réussies du Web figurent celles mises en oeuvre par Garden.com. Boutique d'outils de jardinage, plantes et semences, ce site a construit une base de données très riche qui permet aux internautes d'obtenir des conseils personnalisés en fonction de la nature et de la superficie de leur jardin, de leur situation géographique et de la saison. Il est en outre possible de configurer et visualiser son jardin. Autant d'informations extrêmement précises que l'enseigne utilise pour animer son programme de fidélisation et dynamiser ses ventes. Passer d'une phase de conseil à l'achat est enfantin. Les produits proposés au client pour embellir son jardin virtuel apparaissent lors de la recommandation "technique" et peuvent être achetés d'un seul clic. « Les clients qui agencent leur jardin en ligne dépensent en moyenne dix fois plus que les autres et le taux de renouvellement de leurs achats est cinq fois plus élevé », explique-t-on chez Garden.com. Mais aujourd'hui, rares sont les boutiques de commerce électronique à utiliser des outils aussi sophistiqués. La plupart d'entre elles ont déployé des applications qui permettent de gérer des campagnes segmentées d'e-mailings, en relation avec la base de données maison. Spécialisé dans la vente de matériel informatique, WStore utilise l'application Unity Mail de la société MessageMedia pour personnaliser de façon automatisée ses propositions commerciales. Sur les 25 000 clients PME (coeur de cible entre 50 à 500 salariés) de WStore, la moitié d'entre eux sont régulièrement contactés par e-mail, via l'un des trente scénarios automatisés élaborés à partir de l'observation des comportements d'achat. Les principaux critères de segmentation portent sur la fréquence des visites, les produits achetés, les montants dépensés, ainsi que des données liées à la vie du produit et du client (date d'achat pour un renouvellement ou une proposition de consommables, cadeau à la Xième commande, date anniversaire du client, périodes de maintenance,...). Exemples de scénarios : un achat d'imprimante génère une relance sur des cartouches d'encre (à - 5 %). L'acquisition de plus de cinq PC déclenche ultérieurement une offre proposant trois options promotionnelles (ramette, stylos, - 5 % sur imprimante). En fidélisation, le taux de conversion tourne autour de 20 %, avec une amplitude variant entre 5 et 50 %. La marque de soins des cheveux Pantène joue la carte du relationnel et du conseil, spécialement sur ses fans, des accros de la marque qui achètent tous ses produits, ou presque. « Le stimuli consiste à les faire se sentir très privilégiées : on leur parle des nouveautés avant le lancement, on les positionne comme des expertes auxquelles on demande un avis sur ces nouveautés », raconte Anne Browaeys. La marque leur fait jouer un rôle d'ambassadrices. Un e-mail leur annonce un nouveau produit. Si elles font circuler ce message auprès de leurs amies, elles percevront des "goodies". Mais attention à ne pas "sur-chouchouter" ces excellentes clientes : « cela coûte de l'argent et ne rapporte rien de plus », estime Anne Browaeys. Mieux vaut investir sur des profils "moyens" que l'on peut faire monter en gamme...

De l'effet d'apprentissage


Une façon de séduire des membres "tièdes" est de leur diffuser régulièrement des conseils dans l'univers de la marque. « Il est souvent plus judicieux de donner des conseils, de l'éditorial déconnecté des produits. Trop mettre en avant les produits de la marque peut susciter une réaction de rejet de la part des consommatrices », poursuit Anne Browaeys. Mettre son produit de temps en temps au second plan faciliterait l'instauration d'une relation de confiance. Une expérience de télévision interactive proposait un diagnostic cheveux. Si celui-ci se concluait par une recommandation de produits, les consommatrices en venaient à douter de la qualité des conseils issus du diagnostic. Du coup, la marque a choisi de donner des explications générales dans le cadre d'un check-up avant de proposer de cliquer sur des pages produits. En pratique, cette démarche était bien mieux perçue et aussi efficace que la précédente : neuf consommatrices sur dix se sont avérées intéressées par l'information produits. Plus délicat, comment pousser toute une gamme auprès de consommatrices modérées ? Par exemple, comment les inciter à utiliser des produits de styling, alors qu'elles utilisent déjà un shampooing, un après-shampooing, un produit de soin de temps à autre ? Pantène repart du besoin de la consommatrice (avoir un certain look) pour préconiser un type de produit (spray, mousse ou gel). « Sur ce type de cliente, le discours passera s'il est très modéré », explique Anne Browaeys. A chaque profil, son ton et ses conseils ! Dans le cadre de son programme d'été pour les cheveux, la marque conseille aux accros sophistiquées de rincer leurs cheveux colorés à l'eau minérale dès qu'elles sortent de la mer. Une femme plus naturelle ou sportive aura simplement intérêt à "ne pas trop tarder à se rincer une fois rentrée chez elle". Les points de contacts peuvent eux aussi être personnalisés. La majorité des moins de 25 ans préfèrent les textos aux e-mails. Pantène teste en Grande- Bretagne un programme pilote "7 jours pour transformer ses cheveux". Le recrutement est réalisé en distribuant des cartes postales dans les écoles, les messages seront envoyés sur les mobiles. « Mais ne rêvons pas. Il y a encore un grand décalage entre les pratiques et les possibilités offertes par la technologie », estime Marc Salomone. Sur le papier, il existe tout une palette d'outils performants permettant de collecter des informations sur le comportement les goûts des internautes. Mais combien de sites ont réussi à engager des relations segmentées avec leurs clients ? « La plupart des boutiques virtuelles n'enregistrent pratiquement aucun achat de renouvellement : moins de 1 % des visites », affirment les auteurs des Nouveaux marchands du Net.

Les outils pour structurer la base clients


Inversement, aller trop vite peut coûter cher. Certains sites qui ont investi dans de coûteux moteurs de personnalisation n'en tirent pas parti parce qu'ils n'ont pas su construire une typologie client utile pour une communication segmentée. Ensevelis sous une foule d'informations issues de questionnaires de qualification et de la navigation, ils n'arrivent pas à structurer leur base clients dans un but de personnalisation efficace. « Notre outil, UnityMail, synthétise un grand nombre d'informations campagne par campagne, cible par cible, URL par URL et même par contact. Mais après, le travail du marketing consiste à sélectionner les bons critères pour bâtir une typologie opérationnelle », rappelle Olivier Mare, ingénieur avant-vente de Message Media Europe. Pour chaque segment, l'idée est d'appuyer sur les bons boutons en débloquant des freins ou en répondant à des attentes.

Un concept fidélisant


Sur Internet, il est possible de concevoir des offres promotionnelles pour de nombreux profils, voire pour chaque client. Mais l'analyse des résultats, issus d'un nombre élevé de critères, devient alors très complexe. Mieux vaut donc adopter une démarche itérative progressive en personnalisant avec un ou deux critères (exemple : le temps passé pour le soin de ses cheveux débouche sur la recommandation de tel ou tel produit), puis de mesurer les résultats pour mieux repérer les actions qui fonctionnent cible par cible. Lancé au mois de mars de cette année, Auchandirect, le site de commerce en ligne de l'enseigne, commence son programme de fidélisation avec trois segments : les inscrits n'ayant jamais commandé, les clients ayant commandé une fois, et enfin, les personnes ayant commandé plusieurs fois. Enfin, outre la nécessité de capitaliser sur un effort d'apprentissage, l'ajout progressif de nouveaux critères doit se faire dans un souci de rentabilité. Le potentiel de certaines cibles ne justifie pas d'accroître indéfiniment le nombre de messages et/ou la finesse du discours. « Avant d'investir des millions dans des technologies CRM, une marque doit se poser la question de la rentabilité de ces dépenses. Le budget dédié aux efforts de CRM dépend de l'estimation des revenus additionnels qui en seront issus », prévient Anne Browaeys. « L'année dernière, rares étaient les annonceurs à mesurer l'impact de leurs programmes de fidélisation en mesurant les achats avant et après chaque action. Depuis, 60 % de nos clients le font », observe-t-elle. Par exemple, la marque de soins des cheveux Pantène demande à un panel d'adhérentes et de non adhérentes au programme, quels sont les produits achetés sur les trois derniers mois, toutes marques confondues. « Le véritable moteur de la fidélisation repose essentiellement sur le contrat de base du site : la qualité de l'ergonomie, le service, la fiabilité des produits et de la logistique... Avant de nous lancer dans des opérations de communication segmentées sur les clients dont le panier moyen et la fréquence de visite sont élevés, nous nous sommes concentrés sur la qualité de service, notamment sur les délais de livraison », insiste David Larramendy, responsable marketing relationnel de Mistergooddeal.com. Le siteAuchan direct (www.auchandirect.fr), qui a adopté la même ligne de conduite, l'applique avec un grand souci de cohérence. « La valeur ajoutée repose essentiellement sur la livraison à domicile, et en particulier sur la qualité des produits ultra-frais. C'est la raison pour laquelle nous n'offrons jamais les frais de livraison, une démarche promotionnelle qui viendrait en contradiction avec la promesse du site. On préférera, par exemple, accorder un bon d'achat », explique Antoine de Lasteyrie, dont l'agence est en charge du budget de l'enseigne. Celle-ci est particulièrement attentive au rythme de programmation de ses opérations promotionnelles (à mi-2001, en test sur le Sud de la capitale et de l'Ile-de-France). Un enchaînement trop rapide a en effet toutes les chances de mettre la logistique en péril et de ruiner les efforts de personnalisation engagés. « Sur le fond, le client attend d'être reconnu par la marque. Il apprécie qu'elle se souvienne de ce qu'il aime, ce qu'il n'aime pas, qu'elle lui simplifie la vie en anticipant ses besoins », explique Jacques Ehny, président de Datavantages. Mistergooddeal mettra prochainement en place un système de mail-alert qui permettra aux internautes de communiquer les caractéristiques précises du produit recherché. Un système intelligent qui peut répondre à des besoins de façon personnalisée, et recueille aussi de précieuses informations pour les acheteurs maison.

CityVox : personnaliser le contenu


Contrairement à ses homologues marchands, le site CityVox.com ne cherche pas à faire acheter des articles ou des services mais à générer du trafic en incitant ses visiteurs à jouer les reporters culturels en ligne. « Donner son avis sur un spectacle ou un restaurant dans une grande capitale européenne est assez similaire, en termes d'implication, à un acte d'achat », compare Philippe Guguen, directeur marketing. La stratégie de fidélisation s'appuie sur deux piliers : un contenu éditorial segmenté par ville et des incitations à participer à des jeux. La partie ludique est elle-même animée par des jeux proposés dans la newsletter et par CityReporter, une formule astucieuse qui incite les visiteurs à rédiger des commentaires sur leurs sorties. A la fin de chaque mois, les reporters les plus actifs (ceux dont le nombre de commentaires dépasse 100) peuvent participer à un tirage au sort dont le premier prix est un bon voyage d'une valeur de 5 000 F. « Ce jeu a aussi l'intérêt de développer un sentiment communautaire entre les membres », ajoute Philippe Guguen. De plus, le site envoie chaque mercredi aux 15 000 inscrits de sa liste française une lettre segmentée par ville qui recense les sorties du mercredi et les bons plans du week-end près de chez eux. Vignette permet de produire des newsletters de façon "industrielle" en extrayant du contenu éditorial du site les informations qui intéressent les onze villes françaises couvertes par CityVox. Dans le but de générer un trafic de fidélisation, chaque newsletter propose un jeu de divertissement lié à l'actualité de la ville concernée. « Nous veillons à inciter nos abonnés à la newsletter à jouer à CityReporter et inversement, à encourager les participants aux jeux à s'inscrire sur notre mailing list », précise Philippe Guguen. La moitié des inscrits contactés par ce dispositif se reconnecteraient deux fois par mois sur le site. Le taux d'ouverture des newsletters serait de l'ordre de 50 %. Déjà segmentées par ville et par langue (Paris, Londres, Berlin et Madrid, elles sont éditées en 5 langues), le contenu européen on line, devrait, lui aussi, être utilisé pour éditer des newsletters. En attendant un stade encore plus élaboré de personnalisation via l'introduction des centres d'intérêt des internautes.

Le cas Maximiles Les programmes de fidélisation à points fidélisent-ils ?


A la tête du premier programme de fidélisation à points en France, fort d'une cinquantaine de sites partenaires (dont la SNCF), les gestionnaires de Maximiles ont souhaité mesurer "scientifiquement" l'impact de la mécanique proposée à leurs membres sur leur comportement. Rappel sur le principe : chaque site partenaire distribue des points en fonction d'actes jugés intéressants pour sa marque (visite, remplissage d'un questionnaire, achat,...). Ces points sont ensuite échangeables en cadeaux "offerts" par les sites partenaires au sein de la boutique du programme sur www.maximiles.com. Aussi ont-ils confié à l'institut de mesure des comportements sur Internet NetValue une étude, menée en avril 2001, dont l'objectif était d'analyser comment ses membres utilisaient ce média, comparé à un panel de référence NetValue France Résidentiel. Dans ce but, 400 "Maximilers" ont accepté de télécharger le logiciel Netmeter qui permet de traquer leur surf. « Les résultats de ce panel démontrent des effets de réseau liés à un programme mutualisé et des effets fidélisation », résume Thomas Chatillon, directeur général de Maximiles. En effet, les membres s'avèrent des surfeurs particulièrement actifs : ils se connectent plus souvent (près de 17 jours en avril 2001 contre 9,8 jours pour le panel de référence), plus longtemps et s'appesantissent davantage sur les domaines visités. Plus intéressant, les adhérents sont effectivement fidélisés au réseau de sites partenaires puisqu'ils étaient presque 90 % à avoir visité un site en avril 2001, contre 40 % pour l'échantillon d'internautes français à domicile. L'étude confirme leur potentiel d'achat : ils visiteraient plus de 17 sites marchands par mois contre 4,5 pour leurs homologues du panel France et réalisent un plus grand nombre de connexions sécurisées.

Les programmes on line de fidélisation multienseigne


www.cosmoplazza.com www.jooker.com www.ohpoints.com www.maximiles.com www.webavantages.com www.webmiles.com www.wizzclub.fr

 
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Delphine Sauzay

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