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Décortiquez vos d'jeuns !

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Un bon moyen d'appréhender qui sont exactement vos jeunes clients et prospects consiste bien sûr à leur poser la question. Certains s'y sont essayés, comme Edouard Balladur, alors Premier ministre, en distribuant plusieurs millions de questionnaires dans les boîtes aux lettres. Deux millions furent retournés renseignés, soit 10 % de la cible…

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D'après vous, cet échantillon est-il représentatif de cette population ? Réponse :


Non. Au mieux, il n'est représentatif que des jeunes qui souhaitent prendre la parole et acceptent de le faire auprès d'un institutionnel. En l'occurrence un gouvernement, par définition connoté politiquement, de surcroît. La fiabilité d'un échantillon est liée à deux aspects : sa taille et la méthode utilisée pour le constituer. Sans entrer dans le détail des formules (liées notamment à la loi Normale, la loi de Poisson et au fameux test du khi-deux), la taille elle-même dépend du niveau d'hétérogénéité de la population étudiée d'une part, du degré d'erreur acceptée d'autre part. Et non, comme l'intuition pourrait le laisser supposer, d'un pourcentage de la taille totale du segment évalué. En d'autres termes, un échantillon de 2 000 personnes est autant représentatif des jeunes d'une (grande) ville que d'une nation dans son intégralité. Tout dépend ensuite de la méthode d'échantillonnage retenue. Parmi toutes les possibilités en la matière, trois sont plus souvent utilisées : 1/ La méthode des quotas, qui permet d'abaisser le nombre d'interviewés à un millier (avec l'économie que cela suppose) tout en préservant un bon niveau de fiabilité. Elle consiste à constituer l'échantillon en tenant compte des proportions présentes dans les sous-segments. Imaginons qu'il y ait 41 % de 15-17 ans, 27 % de 18-21 ans et 32 % de 22-25 ans dans votre cible, vous interrogerez respectivement 410, 270 et 320 représentants de ces tranches d'âge. 2/ La méthode des échantillons stratifiés, qui consiste à découper l'échantillon en tranches égales - 3 sous-segments de 333 interviewés dans notre exemple - afin d'analyser les différences de réaction d'une tranche d'âge à l'autre. 3/ Le tirage systématique : pour un fichier de 10 000 adresses à partir duquel vous souhaitez constituer un échantillon fiable de 2 000 destinataires, faites la division 10 000 / 2 000 = 5. Sélectionnez alors toutes les adresses de rang 5 dans votre fichier : la 5e, la 10e, la 15e, etc. Jusqu'à la 9 995e et enfin la 10 000e. En pratiquant ainsi, vous aurez bien constitué un échantillon test de 2 000 adresses, en vous étant totalement départi des incidences liées à l'ordre chronologique, alphabétique, etc.

Chère au MD, la personnalisation de la communication consiste à se réapproprier les mots et expressions utilisés par les cibles. Comment mieux connaître ceux des jeunes, grâce à votre étude ? Réponse :


Formulez vos questions de manière ouverte (“Où achetez-vous votre gel/spray coiffant ?”) plutôt que fermée ou à choix multiple (“Vous achetez votre gel/spray coiffant : 1. en hypermarché 2. chez le coiffeur 3. chez un petit commerçant près de chez vous…”). Vous pouvez aller plus loin en faisant prendre à votre étude les atours d'un jeu de questions ouvertes-réponses, avec gains à l'appui. Par exemple, demandez à vos cibles de reformuler de manière ludique des phrases types, celles-là mêmes que vous comptez utiliser dans vos offres : “Traduis en mots plus cool la phrase suivante : “Ce gel coiffant te permet de rester bien coiffée toute la journée, même après une séance de sport”. “Ta mère dit à ta petite sœur : « Ma chérie, je te prie d'aller chercher un livre chez ta grand-mère », comment le lui aurais-tu dit à sa place ?”.

Si on vous répond, “Comment j'kiffe grave Missy !*” ou, à l'occasion d'une étude-jeu par SMS “Vazi Touf ou kwa ?** “, comment comptez-vous faire pour traduire ? Réponse :


Vous pouvez bien sûr faire appel à des jeunes de votre entourage mais, comme pour toute approche qualitative en étude B to C, le recours à un psychosociologue s'impose pour déterminer ce que cache réellement le discours de chaque interviewé. La difficulté consiste ici à trouver un spécialiste qui connaisse le langage utilisé par les jeunes…

Pouvez-vous croire toutes les réponses données par les jeunes dans vos études ? Réponse :


Oui, à condition de prendre en compte le fait que le comportement dit de “cohérence interne” est particulièrement prégnant chez les jeunes. Cette notion désigne le fait que, à partir d'un (petit) mensonge initial, l'interviewé peut être amené à se construire toute une fausse image en rapport avec ce qu'il vous a annoncé sur lui-même, de manière à rester cohérent. Par exemple, si un adolescent a répondu “« Oui » à la question liminaire “Etes-vous sportif ?”, alors qu'il ne l'est pas en réalité, il va répondre aux interrogations suivantes en fonction de ce qu'il pense être en accord avec son imposture initiale. Il va de ce fait surestimer ses réponses aux questions “Combien d'heures consacrez-vous au sport chaque semaine ?” “Combien dépensez-vous chaque année pour votre matériel ?”, et ainsi de suite. Vous êtes alors en butte à une véritable falsification des réponses, qui peut biaiser l'analyse globale, pour peu qu'elle revienne trop souvent. En conséquence, évitez les formulations trop implicantes, surtout au début de votre questionnaire : préférez une question factuelle du type “Pratiquez-vous un sport ?”, à l'appel à un jugement de valeur “Etes-vous sportif ?”. Quant aux questions plus personnelles, les réponses sont faciles à obtenir pour peu que vous les posiez sous la forme de tranches, “Dans quelle tranche d'argent de poche mensuel vous situez-vous ?”, plutôt que de réclamer un chiffre précis, “Combien vous donnent vos parents par mois ?”. A noter également dans ce contre-exemple que l'introduction des parents est maladroite. * « J'adore la chanteuse Missy Elliott ! » ** « Laissez tombez » ou « Cela ne m'intéresse pas », selon le contexte.

 
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Xavier Lucron Conseil et formateur en marketing

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